Les Catalans ont manifesté massivement lundi après-midi à Barcelone pour revendiquer l’indépendance de leur région, à trois semaines d’un référendum d’autodétermination interdit par les institutions espagnoles.
Les vues aériennes montraient des avenues débordant de manifestants – ils étaient des dizaines de milliers au début du rassemblement -, où ondoyaient les drapeaux indépendantistes : ils devaient former dans le centre-ville une croix de plus d’un kilomètre représentant les « X » que les indépendantistes comptent inscrire dans la case du « oui » au moment du vote du 1er octobre. « Je suis convaincu que le référendum aura bien lieu, des milliers et des milliers de personnes veulent voter, on ne peut pas bloquer ça », disait un fonctionnaire de 63 ans, Sever Salvador.
« Motivation intacte »
Sur des pancartes, on lisait déjà, en catalan : « Adeu Espanya » (« Adieu l’Espagne »). La principale association organisatrice du rassemblement, l’Assemblée nationale catalane (ANC), a assuré avoir enregistré plus de 450 000 inscrits. Ses participants souhaitent que cette « Diada » soit la dernière avant l’indépendance que le gouvernement séparatiste de Carles Puigdemont compte proclamer si le « oui » l’emporte au référendum convoqué pour le 1er octobre. « Il reste vingt jours et la mobilisation qui a motivé ce processus est intacte ».
Lui et ses alliés sont menacés de poursuites judiciaires pour avoir défié l’interdit de la Cour constitutionnelle. Mais « ne pas réaliser le référendum n’est pas une option pour nous », quelques soient les risques judiciaires, a-t-il affirmé.
Le slogan général de la manifestation était « une Diada pour le oui ». « Cela fait des années que la Diada n’est plus la Diada de tous les Catalans, mais là, c’est la démonstration claire que l’on cherche à exclure ceux qui ne sont pas favorables à l’indépendance », a regretté Inès Arrimadas, chef de file en Catalogne du parti libéral et anti-indépendantiste Ciudadanos, la première force d’opposition régionale. Le chef du gouvernement espagnol, le conservateur Mariano Rajoy, a quant à lui souhaité sur Twitter une « Diada de liberté, cohabitation et respect pour tous les Catalans ». « Il n’y aura pas de référendum et je ferai tout le nécessaire pour cela, car c’est mon obligation (…) de préserver l’unité nationale », avait martelé samedi Mariano Rajoy, ce scrutin ayant été déclaré anticonstitutionnel par la haute cour, à la demande de son gouvernement.
Carles Puigdemont soutient, pour sa part, qu’il aura bien lieu, soulignant qu’à l’étranger des Catalans ont déjà commencé à voter… « Peut-être qu’en Catalogne on ne pourra pas voter, mais moi c’est fait », a ainsi affirmé Salvador Macip, un chercheur en oncologie vivant à Leicester (au Royaume-Uni) qui a posté son bulletin sur Twitter. Chaîne humaine sur 400 km à travers la région, défilés dans cinq villes ou marée humaine à Barcelone : depuis 2012, ce rassemblement à l’occasion de la Fête de la Catalogne a mobilisé entre un demi-million et 1,8 million de personnes selon les années et les comptages.
Une route semée d’embuches
Comme tous les 11 septembre, la manifestation a officiellement commencé à 17h14, pour rappeler l’an 1714, la date de la prise de Barcelone par les troupes du roi Felipe V qui supprima ensuite l’autonomie de la région… Le cortège s’est ébranlé peu après une minute de silence observée par la foule à la mémoire des victimes des attentats jihadistes qui ont fait 16 morts en Catalogne le mois dernier.
Pour empêcher que le référendum interdit ait lieu – dans cette région de 7,5 millions d’habitants, grande comme la Belgique et qui fournit 20% du PIB espagnol -, les autorités espagnoles ont commencé à riposter.
La semaine dernière, la justice a ouvert une enquête visant le président catalan Carles Puigdemont et les membres de son gouvernement, pour déterminer s’ils ont commis les délits de « désobéissance », « prévarication » et « malversation de deniers publics ». La garde civile a aussi perquisitionné dans une imprimerie et dans les locaux d’un hebdomadaire local soupçonnés d’avoir participé à l’impression de bulletins de vote.
Le Quotidien/AFP