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Accès aux démarches : les administrations peuvent mieux faire selon l’Ombudsman


Claudia Monti bataille pour qu’une démarche administrative ne soit pas exclusivement digitale. (Photo : alain rischard)

L’Ombudsman, Claudia Monti, estime qu’elle reçoit encore trop de réclamations d’administrés se retrouvant dans l’impossibilité de contacter un gestionnaire par téléphone ou par mail.

«La réalité du non-accès au droit, c’est une atteinte à notre démocratie. Si on a des droits et qu’on ne peut pas y accéder, c’est totalement décourageant! Ça mine la cohésion sociale, et la confiance qu’on a dans les services publics.» Voilà pour la citation choisie par l’Ombudsman, Claudia Monti, et empruntée à Claire Hédon, Défenseure des droits en France, en guise d’introduction au rapport d’activité 2023 de l’institution.

L’Ombudsman s’est attardée sur un problème récurrent qui est l’accès aux démarches administratives qui ont été digitalisées. Les deux tiers des ayants droit ne font pas les démarches pour obtenir la subvention loyer, rappelait Luc Frieden, le Premier ministre, dans son discours de politique générale. «Si la dématérialisation des démarches administratives est certes perçue par bon nombre d’administrés comme une avancée et un gain de temps, elle reste cependant pour les plus vulnérables un énorme défi», écrit Claudia Monti.

Ce qui explique, en partie, la réticence d’un grand nombre de personnes de demander les aides au logement auxquelles elles ont droit. La récente annonce du Premier ministre concernant «un changement de paradigme» satisfait l’Ombudsman. En effet, l’accès aux aides sociales sera simplifié et harmonisé en intégrant le principe «once-only». Les données et tous les documents dont dispose déjà l’État seront rassemblés par l’administration elle-même. «Cela réduira drastiquement le nombre de refus dus à des dossiers incomplets», précisait Luc Frieden. Les personnes pouvant prétendre à une aide n’auront plus à faire la démarche. L’État enverra de manière proactive les formulaires au citoyen, qui n’aura plus qu’à le signer et à le renvoyer.

Cela fait des années que Claudia Monti attirait l’attention du législateur sur ce point, mais jusqu’ici, rien n’avait été fait, sinon déplorer le peu d’intérêt pour les différentes aides. «Des personnes déjà perdues face à la complexité des procédures administratives s’avèrent pourtant incapables de répondre aux obligations somme toute très strictes qu’entraîne la digitalisation, état pouvant entraîner l’abandon d’une démarche ou la simple renonciation à une procédure donnée», rappelle-t-elle dans son rapport.

Claudia Monti déclare batailler pour qu’une démarche administrative ne soit pas exclusivement digitale. «La digitalisation administrative, aussi pratique et économique puisse-t-elle paraître, ne doit pas entraîner la disparition totale d’un accueil personnel ou, a minima, téléphonique pour recevoir les doléances du public et surtout d’un public particulièrement fragilisé», écrit-elle.

Personne au bout du fil

L’Ombudsman reçoit encore trop de réclamations d’administrés se retrouvant dans l’impossibilité de contacter un gestionnaire par téléphone ou par mail, sans parler d’obtenir un rendez-vous auprès d’un service donné.

«Dans bien des dossiers, un simple échange de quelques minutes avec un réclamant permet de clarifier une situation ou d’obtenir un document nécessaire à l’accomplissement de ma mission», déclare-t-elle en encourageant tout agent à contacter l’administré en cas de doute sur la recevabilité ou le bien-fondé d’une demande. «Afin de rappeler les bonnes pratiques administratives, l’Ombudsman recommande au gouvernement de bien vouloir procéder à une rediffusion des lignes de bonne conduite administrative auprès de l’ensemble de ses agents.» Une doléance qui ne devrait pas laisser le Premier ministre indifférent.

Le rapport fait état également de certaines «dérives ou incohérences rencontrées par les administrés dans leur relation avec l’administration». Dans les précédents rapports, Claudia Monti citait des exemples concrets concernant des problématiques qui naissent de l’absence de mesures transitoires dans le cadre d’une abrogation ou d’une modification législative ou règlementaire.

«L’élaboration de mesures transitoires adaptées doit ainsi faire l’objet d’une attention particulière lors du processus législatif», recommande-t-elle. Cela permettra de limiter le préjudice qui trouve «sa seule cause, sinon sa cause principale, dans le délai de traitement d’une demande par l’administration». C’est souvent le cas pour des demandes introduites en temps utile mais n’ayant pas fait l’objet d’une décision au jour de l’abrogation ou de la modification envisagée.

Les députés auront l’occasion d’en débattre lors d’une prochaine séance publique.

1 456 demandes

Cette année encore, l’institution a été très sollicitée. Le nombre de réclamations continue d’augmenter chaque année et passe de 1 247 en 2022 à 1 456 en 2023. Au cours de l’exercice concerné, l’Ombudsman est intervenu auprès de l’administration dans le cadre de 249 réclamations et dans 85,9 % des cas, son intervention a permis d’obtenir une correction totale ou partielle de la situation administrative contestée.

Pour autant, l’Ombudsman précise que «pour l’ensemble des statistiques, la notion de correction totale ou partielle ne signifie pas forcément que l’administration a suivi les recommandations ou avis de l’Ombudsman, mais «qu’un réclamant avait saisi l’Ombudsman pour obtenir des éclaircissements, précisions ou tout simplement une réponse, même si la décision obtenue était en définitive négative».