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Accès à la formation : certains salariés mieux lotis que d’autres


Les salariés les plus qualifiés, au sein de grands groupes, accèdent plus facilement à des formations. (photo illustration Vincent Lescaut)

Sur un marché de l’emploi en tension, la Chambre des salariés réclame le droit à la formation pour tous les travailleurs, alors que d’importantes disparités existent sur le terrain.

C’est sur le dossier de la formation que la Chambre des salariés (CSL) a choisi de braquer les projecteurs pour attaquer cette rentrée, en mettant sur la table des propositions concrètes pour promouvoir la formation professionnelle initiale, mais aussi améliorer l’accès à la formation continue pour tous.

Un «sujet sociétal crucial» dans un contexte de transition écologique et d’importantes mutations du monde du travail, a pointé la présidente Nora Back en préambule.

«On doit se battre»

«Certains métiers vont disparaître, d’autres émerger : le domaine de la formation doit s’adapter», a-t-elle martelé, déplorant au passage le manque de soutien au niveau politique. «On doit toujours se battre, alors que beaucoup de gens sont au chômage et que les pénuries de main d’œuvre s’aggravent.»

Si attirer des talents du monde entier est une bonne chose selon elle, cela ne suffit pas, le marché de l’emploi ayant besoin de travailleurs locaux, du Luxembourg et de la Grande Région.

La CSL mise sur la touche?

Dans cette situation tendue, elle fait part du sentiment de la CSL d’être tenue à l’écart par le gouvernement CSV-DP au pouvoir depuis un an.

«On ne nous implique plus et certaines décisions sont prises sans nous», s’agace Nora Back. «Or, nous avons besoin d’une stratégie nationale en faveur de l’apprentissage tout au long de la vie.»

«Tout le monde est d’accord – même le patronat – pour avoir des salariés bien formés. Cela demande des moyens financiers, juridiques et législatifs», conclut-elle, ajoutant que le Luxembourg n’est pas bien placé en termes d’objectifs européens dans le domaine de la formation.

Revaloriser les indemnités des apprentis

D’où la nécessité d’agir. Du côté de la formation professionnelle initiale, la CSL est d’avis que l’augmentation des indemnités d’apprentissage est «incontournable pour que cette voie reste attractive.»

«Les chambres patronales nous donnent raison, mais ne font rien. Elles pensent que c’est à l’État de compenser», explique Françoise Schmit, conseillère de direction.

La CSL plaide aussi pour que tous les diplômes de techniciens ouvrent l’accès aux études supérieures dans leur spécialité, et pour la création d’une offre de formation en alternance à ce niveau d’enseignement. Des discussions sont d’ailleurs en cours avec le ministère.

Moins de formation dans les PME

Concernant l’accès à la formation continue, la Chambre des salariés observe des inégalités : «Les gens qui sont peu qualifiés ou qui travaillent dans des petites entreprises ont moins de possibilités de se former», indique Jeannine Kohn, elle aussi conseillère de direction à la CSL.

Alors que l’enveloppe de l’État pour l’accès individuel à la formation plafonne à 2,3 millions d’euros pour 2024, le budget formation au sein des entreprises atteint 36 millions. De quoi creuser des différences entre salariés, ceux occupant les plus hauts postes bénéficiant de davantage d’opportunités.

«Manque de flexibilité et de soutien financier»

Ce qui justifie la création d’un droit à la formation pour tous, revendique la CSL, arguant que chacun doit avoir le droit de se former tout au long de sa vie. Or, selon elle, le congé individuel de formation tel qu’il existe ne répond pas aux besoins des salariés.

La preuve : seul 1 % de la population en profite. Le gouvernement projette d’ailleurs de le réformer. «Ce congé rémunéré manque de flexibilité et de soutien financier», poursuit Jeannine Kohl.

La piste du modèle autrichien

«Il prévoit 80 jours étalés sur toute la carrière, et se limite à 20 jours maximum par période de deux ans. C’est clairement insuffisant», note-t-elle, regrettant aussi que certaines aides restent conditionnées à l’avis favorable de l’employeur.

Le modèle mis en place en Autriche s’avère intéressant aux yeux de la CSL : une réduction du temps de travail est accordée pour se former, tandis que l’équivalent de l’Adem paye une compensation pour le salaire perdu.