Jasmin, 59 ans, reconnaît avoir volé des montres dans la vitrine d’une bijouterie pendant qu’il faisait la manche. Il n’en serait pas à son coup d’essai.
«J’avais remarqué un petit trou dans une des vitrines de la bijouterie. Je l’ai agrandi et j’ai récupéré les montres les unes après les autres. Huit ou neuf le premier jour. Je ne me souviens plus bien», reconnaît Jasmin, originaire de Bosnie-Herzégovine, à la barre de la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, la semaine passée. Ce grand gaillard à la carrure impressionnante, aux cheveux clairsemés coupés en brosse et à la mine patibulaire est accusé de vol.
L’homme qui purge actuellement une peine de trente mois de prison jusqu’à fin mai 2023 faisait la manche à Luxembourg à l’époque des faits. Il précise qu’il échangeait les montres contre sa dose quotidienne de drogues et de quoi vivoter quelques jours avec ses amis de galère.
Jasmin raconte être arrivé au Luxembourg après avoir été expulsé de Bosnie à la suite de la guerre des Balkans lors de laquelle il dit avoir été blessé. Après son arrivée il y a 18 ans, le prévenu aurait travaillé pendant sept ans avant que sa dépendance aux stupéfiants le rattrape. Il a fini par atterrir dans la rue où il vit depuis de petits vols. «J’ai déjà été condamné une dizaine de fois pour des faits similaires», précise Jasmin, qui semble ne rien avoir à cacher.
Le prévenu, jovial malgré les circonstances, s’est montré plutôt bavard, voire fier de ses nombreux faits d’armes. Entre le 14 et le 17 novembre 2020, il reconnaît avoir subtilisé plus ou moins 23 montres. Quarante-deux, près du double, selon la bijouterie lésée qui ne s’est pas portée partie civile. Il a «pêché» les montres à l’aide d’un fil de fer détourné en crochet et accroché à un bâton qu’il passait par le trou dans la vitrine. «En pleine journée, pendant que je faisais la manche avenue de la Porte-Neuve», situe Jasmin. «J’étais installé au pied de la bijouterie en face d’une supérette.» Avant cela, il avait agrandi le trou dans la vitrine avec un instrument qui n’a pas été retrouvé par les enquêteurs de la police.
«J’ai tout ce qu’il me faut en prison»
La présidente de la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg a du mal à croire que Jasmin ait pu voler les montres en plein jour sans que personne le remarque. Une vendeuse avait constaté la disparition des montres le lundi matin en ouvrant le magasin. Jasmin est pourtant formel : il a pêché les montres le vendredi et le samedi pendant la journée, jusqu’à ce que sa canne à pêche improvisée tombe dans la vitrine. Il aurait ensuite tenté sa chance avec un bâton. La pêche a été moins fructueuse.
«Vous avez 59 ans, vous n’envisagez pas de vous arrêter un jour ?», l’interroge la présidente de la chambre criminelle après lui avoir demandé s’il n’aurait pas également commis des vols rue Beaumont à Luxembourg, une voie perpendiculaire à l’avenue de la Porte-Neuve, le même week-end. «Non», sourit Jasmin. «Si je n’ai plus d’argent, je devrais recommencer à voler.» «Vous aimez être en prison ?», poursuit la magistrate. «J’ai tout ce qu’il me faut en prison, mais je ne m’y sens pas bien», avoue le gaillard en mal de liberté.
Jasmin travaille en prison. Ce qui lui permet de gagner un peu d’argent, intervient son avocat, Me Éric Says. Il demande à la chambre correctionnelle de ne pas être trop sévère avec Jasmin et de ne pas prononcer d’amende à son encontre pour permettre au prévenu «de pouvoir prendre sa retraite».
La représentante du parquet estime que «son métier est le vol». D’ailleurs, ses nombreuses condamnations pour des faits similaires constituent des circonstances aggravantes. Elle a ainsi requis une peine de 24 mois de prison contre Jasmin, mais ne s’est pas montré favorable à une peine d’amende pour la même raison que celle avancée par l’avocat.
Le prononcé est fixé au 12 mai.