Lors d’une rixe fin 2017, un trentenaire avait poignardé un homme dans le quartier de la Gare. Vendredi, le parquet a requis 10 ans contre lui.
Se sentant agressé par trois jeunes hommes à la sortie du café en rentrant chez lui, le prévenu, Saido E., avait récupéré un couteau de cuisine à la maison avant de redescendre dans la rue de Bonnevoie. La rixe a dégénéré. Depuis cette nuit, le trentenaire dort à Schrassig.
Les rixes éclatent bien souvent à cause d’un motif très futile. Celle du 3 décembre 2017 dans la quartier de la Gare n’a pas dérogé à la règle.
«C’est l’accumulation de petits faits anodins qui a abouti à la tentative de meurtre pour laquelle Saido E. (32 ans) se retrouve aujourd’hui devant la chambre criminelle», récapitulait le représentant du parquet, vendredi matin.
Ce dimanche-là, vers 1 h du matin, le trentenaire alcoolisé a porté quatre coups de couteau dans le dos d’un homme. Si le prévenu ne conteste pas les coups, c’était pour effrayer ses agresseurs, prétend-il : «Ils m’agressaient pour quelque chose que je n’avais pas fait. J’ai senti que ma vie était en danger.»
«Il n’y avait qu’une seule vie en danger cette nuit-là. Ce n’était pas la vôtre», l’a très vite recadré la présidente. Même si trois des blessures étaient superficielles, la quatrième était potentiellement mortelle, en cas de complications éventuelles.
«Les coups ont été portés avec une force considérable», avait noté le médecin, citant le coup planté à 6 cm de profondeur dans la cage thoracique. La victime, également alcoolisée à l’époque, dit n’avoir rien senti sur le moment. «C’est quand on m’a dit que je saignais que je l’ai senti», a témoigné, jeudi, l’homme de 34 ans. Il avait passé une semaine et demie à l’hôpital. En arrêt maladie jusqu’à juin 2018, il raconte avoir perdu toute sensation dans l’omoplate.
Des dreadlocks et une femme dans un café
À entendre les différents protagonistes, tout s’est passé très vite. À l’origine de cette rixe sanglante se trouve, quelques instants plus tôt, une scène dans un café. Une scène qui a visiblement été appréciée différemment. La future victime et ses deux amis déclarent avoir vu, à travers la vitre, une femme agrippée par un homme. Ils ne savaient pas que quelques instants plus tôt ce dernier s’était fait tirer par les dreadlocks. Bref, ils décident de suivre l’homme afin de pouvoir, par la suite, indiquer à la police où le trouver.
Au lieu d’accélérer le pas et de poursuivre son chemin, Saido E., accompagné de sa copine, finit par se retourner. S’ensuit une première altercation. À la question de savoir qui a commencé, les versions divergent. Toujours est-il que Saido E. finit par s’éclipser… avant de revenir quelques instants plus tard armé d’un couteau.
Selon ses dires, c’était pour récupérer sa compagne : «La seule chose que je voulais, c’est rentrer à la maison avec ma copine. Je sentais ma vie en danger.» Tout seul, il n’aurait pas fait le poids contre les trois hommes. En fin de compte, il aurait utilisé le couteau lors d’un corps à corps avec la future victime pour se dégager de son étreinte.
C’est l’argument de la légitime défense, comme Me Mathieu Richard l’a invoqué au cours de sa plaidoirie. Selon l’avocat, Saido E. n’a pas eu l’intention de tuer : «Un simple couteau à éplucher n’est, par sa nature, pas destiné à tuer.» Et d’insister : «S’il avait eu l’intention de tuer, il aurait pu se procurer une arme plus dangereuse.»
Mais de l’avis du parquet, il y a bien eu tentative de meurtre. Saido E. n’est peut-être pas redescendu dans la rue pour tuer quelqu’un, n’empêche que quand il a enfoncé à quatre reprises le couteau dans le corps de sa victime, il ne faisait l’objet d’aucune attaque violente. Dans ces circonstances, impossible de retenir la légitime défense.
«Monsieur était en sécurité chez lui. Il a pris la décision de revenir et d’affronter à nouveau ses prétendus agresseurs. Mais à ce moment sa copine n’était pas retenue. Il n’avait donc pas besoin de venir à sa rescousse», a appuyé le parquetier avant de requérir dix ans de réclusion contre le trentenaire sans casier judiciaire et qui se trouve depuis son arrestation en détention préventive à Schrassig. Il demande aussi de retenir les coups et blessures volontaires portés sur la femme dans le café. Pour ce qui concerne un éventuel sursis, il se rapporte à prudence de justice. Enfin, il demande la confiscation du couteau.
Prononcé le 15 mai.
Fabienne Armborst