Areva a devancé la publication de ses résultats 2014 en annonçant lundi une perte nette record provisoire de 4,9 milliards d’euros, un montant supérieur à sa valeur en Bourse, conséquence de nouvelles provisions et de la dépréciation de certains actifs.
La nouvelle direction doit faire face à une série de difficultés, dont le retard du chantier du réacteur de troisième génération EPR en Finlande, ou encore le décalage dans le redémarrage du nucléaire au Japon. (Photo : AFP)
Au delà de l’impact comptable, cette annonce laisse augurer de l’ampleur du plan de compétitivité que le groupe doit annoncer le 4 mars lors de la présentation de ses résultats 2014, et qui pourrait se traduire notamment par des suppressions de postes, une première pour le groupe détenu à plus de 87% par des capitaux publics.
Cette présentation sera d’ailleurs une première pour le duo formé de Philippe Varin (président du conseil d’administration) et Philippe Knoche (directeur général), officiellement en place depuis début janvier. Le montant provisoire de la perte, estimé par le comité d’audit et d’éthique, s’élève donc à 4,9 milliards d’euros, supérieur à la valeur du groupe en Bourse, qui est de 3,7 milliards d’euros, et qui représente aussi près des trois quarts de ses capitaux propres (6,6 milliards d’euros à fin 2013).
La nouvelle direction doit faire face à une série de difficultés, dont le retard du chantier du réacteur de troisième génération EPR en Finlande, le décalage dans le redémarrage du nucléaire au Japon, et un marché des services aux installations existantes peu dynamique. Areva a donc été contraint de procéder à un nettoyage en profondeur de ses comptes, à coups de dépréciation de certains de ses actifs et en amplifiant ses provisions pour des pertes enregistrées sur certains contrats.
Le groupe va ainsi réévaluer à la baisse des impôts différés et son projet d’usine de conversion d’uranium Comurhex II dans la Drôme et augmenter une nouvelle fois les pertes enregistrées sur le contrat de construction de l’EPR Olkiluto 3 en Finlande et sur un projet de réacteur de recherche, a-t-il précisé dans un communiqué.
Enfin, il va devoir passer des provisions en lien avec l’application de la réglementation sur les obligations de fin de cycle (traitement des combustibles usés). Le détail précis de ce nettoyage comptable n’a pas été dévoilé par le groupe, mais il rend probable la nécessité d’une augmentation de capital. La question est de savoir qui pourra venir renflouer le groupe.
> Problème de compétitivité
Alors qu’EDF a démenti toute prise de participation, l’État pourrait se mobiliser via la cession de participations dans d’autres entreprises, estime un analyste. « Cela ferait plus de sens de la part de l’État de vendre un peu d’EDF (pour réinvestir dans Areva, NDLR) que de demander à EDF de mettre 4 milliards au pot, surtout qu’il y a quand même des marges de manœuvre pour garder le contrôle de l’entreprise », dont l’État est actionnaire à 84%.
Après cette annonce, le titre Areva cédait 0,88% à la Bourse de Paris à la mi journée (13h40, 12h40 GMT) à 9,49 euros, après avoir ouvert en forte baisse de près de 3%. Mi-novembre, le groupe avait déjà suspendu ses perspectives financières pour 2015 et 2016, avec pour sanction immédiate le relégation de sa note en catégorie spéculative par l’agence de notation Standard and Poor’s.
Outre son montant record, cette perte, la quatrième consécutive depuis 2011, illustre aussi les difficultés structurelles d’Areva sur ce marché du nucléaire. « Ce qui passera dans ces provisions, c’est pour partie aussi des dépréciations d’actifs sur des niveaux d’activité anticipés qui sont aujourd’hui clairement moins évidents ou moins élevés que ce qu’on imaginait il y a six ou douze mois », explique un analyste.
Et puis le groupe souffre d’un véritable problème de compétitivité, qui sera au cœur du plan stratégique qu’Areva annoncera le 4 mars. Pour réduire ses coûts, le groupe aurait deux leviers majeurs: sa politique d’achat et ses frais de personnel. Areva comptait 45 340 collaborateurs, fin 2013, dont les deux tiers en France. « Protéger la structure, c’était aussi se garder la capacité de participer à un redémarrage du marché. Donc aujourd’hui, cela veut dire que le groupe acte le fait que le marché ne repartira pas », estime le même analyste.
AFP