Des apiculteurs de Caroline du Sud, dans le sud-est des Etats-Unis, ont découvert cette semaine des millions d’abeilles mortes après une campagne d’épandage aérien d’un pesticide controversé, lancée afin d’éliminer les moustiques porteurs du virus Zika.
« Notre petite entreprise familiale a été détruite par la pulvérisation aérienne », se désole Juanita Stanley, apicultrice à Summerville, après avoir découvert des centaines de milliers d’abeilles mortes près des ruches de la Flowertown Bee Farm and Supplies, dont elle est copropriétaire.
« Aidez-nous à partager cette histoire, pour que les abeilles productrices de miel ne soient pas mortes en vain », poursuit-elle sur Facebook, accompagnant son message de photos d’abeilles mortes et d’apiculteurs brûlant les ruches désormais inutiles. Une collecte de dons a été organisée en ligne.
Selon la chaîne locale WCSC, le groupe apicole a perdu 46 ruches et 2,5 millions d’abeilles depuis lundi.
Le comté de Dorchester en Caroline du Sud, dont dépend en partie Summerville, a reconnu avoir ordonné l’épandage aérien d’insecticide tôt dimanche 28 août, après la détection de quatre cas de personnes touchées par le Zika dans cette zone deux jours plus tôt.
Zika se transmet par la piqûre d’un moustique infecté mais il peut se transmettre par contact sexuel. Les personnes touchées ont peu de symptômes mais la maladie peut être dramatique pour les femmes enceintes car le virus peut provoquer de graves malformations du foetus comme la microcéphalie.
Interdit par l’UE
« Le comté de Dorchester a appris que certains apiculteurs de la zone ciblée dimanche ont perdu leur ruche », avait indiqué mardi Jason Ward, l’un de ses responsables, promettant de contacter les exploitants touchés.
L’insecticide employé aux Etats-Unis pour lutter contre le virus du Zika est le Naled, un pesticide organophosphaté servant à la lutte antimoustique depuis des décennies.
L’Union européenne en a interdit l’utilisation en 2012 en raison des dangers qu’il présente pour la santé et l’environnement. Des scientifiques et des écologistes l’accusent de présenter un risque pour le système respiratoire et peut-être de provoquer des leucémies chez les enfants.
Qui plus est ce produit chimique ne tue pas seulement les moustiques mais se révèle toxique pour les abeilles, les papillons, les poissons et autres organismes aquatiques.
Mais les autorités américaines estiment qu’il est sans danger s’il est utilisé correctement et avec parcimonie. Tom Frieden, le directeur des Centres fédéraux de contrôle et de prévention des maladies (CDC), a assuré par exemple que le Naled, utilisé aux Etats-Unis depuis 1959 pour tuer les moustiques adultes, n’est pas nocif en faibles quantités. Mais le site de l’Agence de protection de l’environnement (EPA) recommande aux personnes sensibles aux produits chimiques de rester enfermées chez elles, fenêtres fermées, pendant l’épandage.
« Naled est un insecticide qui ne différencie pas », a expliqué à l’AFP Elvia Meléndez Ackerman, professeure de sciences de l’environnement à l’Université de Porto Rico. « Il peut tuer de nombreuses espèces d’insectes et avoir des effets néfastes sur d’autres espèces ».
Le territoire américain de Porto Rico, frappé de plein fouet par Zika avec 14.000 cas d’infections locales, a d’ailleurs refusé les campagnes de pulvérisation de Naled depuis juillet. L’île utilise uniquement du BTI, un larvicide naturel également utilisé à Miami.
La Floride a jusqu’ici recensé 49 cas d’individus ayant contracté localement le virus, selon le département de la santé de l’Etat, qui fait également état de 656 cas contractés à l’étranger. En tout, 80 femmes enceintes ont été touchées en Floride.
Les Etats-Unis ont identifié 2.600 cas de Zika liés à des voyages à l’étranger, selon les autorités sanitaires américaines.
Le Quotidien / AFP