Chris Froome a remporté dimanche sa troisième victoire dans le Tour de France, la quatrième pour la toute puissante équipe Sky, qui a dominé la plus grande course du monde conclue sur les Champs-Elysées par le succès au sprint de l’Allemand André Greipel.
Sur la célébrissime avenue, placée sous haute sécurité dans le contexte post-attentats que connaît la France, la 103e édition du Tour s’est terminée sans incident majeur. Avec un podium d’habitués, à la seule exception de Romain Bardet, le jeune Français (25 ans) qui a devancé pour la deuxième place le Colombien Nairo Quintana.
Bardet, crédité de la seule victoire d’étape française, a séduit, si besoin était. « Il est méthodique, réfléchi, intelligent. Et, en même temps, il attaque avec panache », a souligné le directeur du Tour, Christian Prudhomme, en relevant la rareté que représente une deuxième place au classement final pour un Français à l’époque contemporaine. Seul Jean-Christophe Péraud, lui aussi de l’équipe AG2R La Mondiale, avait atteint ce stade en 2014.
« J’étais un peu amer sur ce Tour d’entendre des commentaires négatifs, qu’il n’y avait pas d’attaque, que c’était un Tour soporifique. Mais on était tous à fond. J’attendais juste l’ouverture », a expliqué le très lucide Bardet, qui n’en espérait pas tant.
A l’heure du bilan, Froome, comme à son habitude, a insisté sur l’importance de son équipe, « la meilleure » que Sky a présenté dans le Tour depuis la première participation de la formation britannique en 2010.
« Ils ont inventé le coaching »
L’omniprésence des hommes en noir a permis à Froome de décourager par avance les attaquants en montagne et de prendre l’avantage à d’autres moments. Dans les contre-la-montre mais aussi dans la plaine (à Montpellier) et en descente (Bagnères-de-Luchon), en courant de façon agressive pour surprendre ses adversaires.
« On a vu un Froome différent », a estimé le directeur du Tour à propos du Britannique, désormais triple vainqueur de l’épreuve, comme trois autres coureurs avant lui (Philippe Thys à l’époque des pionniers, Louison Bobet dans les années 1950, Greg LeMond voici un quart de siècle).
« Si Froome a couru autrement, son équipe a cadenassé la course », a ajouté Christian Prudhomme, qui a comparé la formation britannique à la domination outrancière du PSG dans le championnat de France de football.
Depuis le succès en 2012 de Bradley Wiggins, premier Anglais à figurer au palmarès, la supériorité du groupe dirigé par Dave Brailsford n’a été prise en défaut qu’une seule fois, en 2014, après les chutes à répétition de Froome.
« Ils ont inventé le coaching dans le cyclisme », a relevé Prudhomme. Les lieutenants de Froome sont mis à contribution à tour de rôle dans les étapes, afin d’économiser leurs forces en vue des rendez-vous ultérieurs. Ce qui incite les amateurs de suspense à prôner une réduction du nombre de coureurs par équipes dans le but de rééquilibrer les forces.
Sagan battu de justesse
« Cela permettrait surtout d’améliorer la sécurité, notre souci principal », corrige Prudhomme, favorable à des équipes de huit coureurs (au lieu de neuf). Car le Tour, toujours menacé par le gigantisme, le nombre de véhicules et les risques liés à son succès populaire, est en permanence sur le fil du rasoir. L’édition 2016 l’a prouvé une nouvelle fois.
Image forte du mois, Froome s’est retrouvé à pied dans le Ventoux, lors de l’arrivée improvisée (à cause du vent interdisant l’accès au sommet) et chaotique de l’étape du 14 juillet. Une moto avait dû stopper brutalement devant les favoris du Tour.
Le sanglant attentat de Nice, quelques heures plus tard, a vite relégué cette péripétie au second plan, en même temps qu’il bouleversait coureurs et spectateurs.
Après cette course, durant laquelle le dopage technologique a été traqué pour la première fois par des experts indépendants, Froome peut se tourner vers un possible titre olympique dans le contre-la-montre des JO de Rio. Les chances du favori logique, le Néerlandais Tom Dumoulin (vainqueur de deux étapes), se sont réduites brutalement après son abandon forcé sur chute.
Le Britannique Mark Cavendish, renaissant dans les sprints (quatre étapes!), a lui aussi quitté la course avant son terme. Mais par choix personnel, pour préparer Rio. Il a laissé la voie libre à Paris aux autres sprinteurs, hormis Bryan Coquard, retardé par une crevaison dans les 3 derniers kilomètres.
Peter Sagan, le Slovaque maillot vert pour la cinquième fois consécutive, s’est incliné de justesse face à Greipel dans le sprint qui a conclu cette 103e édition. Le champion du monde, vainqueur de trois étapes depuis le départ, n’a pu remonter complètement l’Allemand, à la recherche de son premier succès.
Froome s’est relevé bien avant la ligne pour savourer ses derniers instants de course. Bras dessus, bras dessous avec ses coéquipiers.
Le Quotidien / AFP
Tableau d’honneur de la 103e édition
Classement général: Chris Froome (GBR/Sky)
Classement de la montagne: Rafal Majka (POL/Tinkoff)
Classement par points: Peter Sagan (SVK/Tinkoff)
Classements des jeunes: Adam Yates (GBR/Orica)
Classement des équipes: Movistar
Combativité: Peter Sagan
Les victoires d’étape
1re étape (Utah Beach): Mark Cavendish (GBR/Dimension Data)
2e étape (Cherbourg): Peter Sagan (SVK/Tinkoff)
3e étape (Angers): Mark Cavendish
4e étape (Limoges): Marcel Kittel (GER/Etixx)
5e étape (Le Lioran): Greg Van Avermaet (BEL/BMC)
6e étape (Montauban): Mark Cavendish
7e étape (Lac de Payolle): Stephen Cummings (GBR/Dimension Data)
8e étape (Bagnères-de-Luchon): Chris Froome (GBR/Sky)
9e étape (Arcalis): Tom Dumoulin (NED/Giant)
10e étape (Revel): Michael Matthews (AUS/Orica)
11e étape (Montpellier): Peter Sagan
12e étape (Mont Ventoux): Thomas De Gendt (BEL/Lotto)
13e étape (La Caverne du Pont-d’Arc, c.l.m.): Tom Dumoulin
14e étape (Parc des Oiseaux): Mark Cavendish
15e étape (Culoz): Jarlinson Pantano (COL/IAM)
16e étape (Berne): Peter Sagan
17e étape (Finhaut-Emosson): Ilnur Zakarin (RUS/Katusha)
18e étape (Megève, c.l.m.): Chris Froome
19e étape (Saint-Gervais Mont Blanc): Romain Bardet (FRA/AG2R La Mondiale)
20e étape (Morzine): Ion Izagirre (ESP/Movistar)
21e étape (Paris Champs-Elysées): André Greipel (GER/Lotto)
Le palmarès depuis dix ans
2006 Oscar Pereiro (ESP) sur tapis vert (après déclassement de l’Américain Floyd Landis pour contrôle antidopage positif)
2007 Alberto Contador (ESP)
2008 Carlos Sastre (ESP)
2009 Alberto Contador (ESP)
2010 Andy Schleck (LUX) (après déclassement de l’Espagnol Alberto Contador pour contrôle antidopage positif)
2011 Cadel Evans (AUS)
2012 Bradley Wiggins (GBR)
2013 Chris Froome (GBR)
2014 Vincenzo Nibali (ITA)
2015 Chris Froome (GBR)
2016 Chris Froome (GBR)