Après deux ans de lutte contre l’Etat islamique, les Etats-Unis battent mercredi le rappel de leur coalition militaire internationale rassemblée près de Washington, mais sans avoir terrassé le groupe jihadiste qui multiplie les attentats dans le monde.
Car si l’EI a reculé en Irak et en Syrie, il a revendiqué ces dernières semaines de terribles attaques à Nice, Istanbul, Bagdad ou Dacca qui ont fait des centaines de morts et de blessés. Et en Libye, la mort de trois soldats français des forces spéciales en mission contre « le terrorisme », annoncée mercredi par Paris, vient rappeler que le groupe ultra-radical est également implanté dans ce pays d’Afrique du Nord en pleine tourmente.
« Nous allons tous devoir en faire plus », a martelé le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter devant des dizaines de ses homologues étrangers, réunis sur l’immense base aérienne d’Andrews, dans la banlieue de la capitale fédérale.
« Nous devons nous assurer » que les forces irakiennes et les groupes syriens alliés de la coalition « ont ce qu’ils faut pour gagner la bataille » contre le jihadisme, puis « reconstruire et gouverner leurs territoires », a insisté le patron du Pentagone.
Le secrétaire d’Etat John Kerry doit également accueillir à la mi-journée une conférence des donateurs pour l’Iran, puis, jeudi, il recevra ses homologues étrangers pour une nouvelle réunion de la coalition anti-EI mise sur pied à l’été 2014. Pilotée par les Etats-Unis, cette coalition d’une soixantaine de pays a mené en deux ans quelque 14.000 frappes en Syrie et en Irak. Mais ce sont les attentats de l’EI en Europe qui « seront évidemment une préoccupation première dans les discussions », selon Brett McGurk, le représentant du président Barack Obama auprès de la coalition.
« Cent complots de l’EI depuis 2014 »
De fait, il y a eu plus de « 100 complots terroristes liés à l’EI contre l’Occident depuis 2014 », a compilé dans un rapport le président de la commission de la Sécurité intérieure du Congrès américain, Michael McCaul. Ce qui fait dire à l’expert Michael Weiss que « l’EI est à la peine, mais pas hors jeu ». Certes, le groupe jihadiste « a perdu sa capacité à conserver de grands pans de territoire, mais pas sa capacité à mener des attaques (…) opportunistes », a jugé ce spécialiste du centre Atlantic Council.
Selon Washington, l’EI a perdu en Irak et en Syrie respectivement près de 50% et de 20% à 30% des territoires conquis à son apogée en 2014. En Irak, après la reconquête du bastion sunnite de Fallouja par les forces irakiennes, la coalition a Mossoul en ligne de mire. Mais M. Weiss doute que Mossoul et Raqa, la « capitale » de l’EI en Syrie, soient « reprises » avant la fin de l’administration Obama en janvier.
En Syrie, où la guerre a fait plus de 280.000 morts et des millions de réfugiés et de déplacés, l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), une ONG basée à Londres, a affirmé mardi que près de 60 civils, dont des enfants, avaient péri dans des raids de la coalition près d’un village tenu par l’EI dans la province d’Alep. John Kerry revient tout juste de Moscou, où il s’est mis d’accord avec le pouvoir russe sur une coopération accrue et des « mesure concrètes » entre les deux puissances pour tenter de sauver la trêve et lutter contre les jihadistes.
Deux milliards de dollars pour l’Irak
La coalition parlera aussi de l’après-EI. En particulier en Irak, pays pour lequel les Etats-Unis, le Japon, le Canada, l’Allemagne, les Pays-Bas et le Koweït tablent sur deux milliards de dollars de promesses de dons, selon des diplomates américains. De fait, Bagdad a besoin d’argent pour que des réfugiés retournent dans les zones reconquises et pour reconstruire le pays. « Le moment est venu d’aider l’Irak pour l’après libération », avait plaidé mardi à Washington son ministre des Affaires étrangères Ibrahim al-Jaafari en invoquant l’esprit du plan Marshall.
Les forces irakiennes ont repris Fallouja et ont avancé dans la vallée du Tigre vers Mossoul. Elles ont reconquis la base aérienne de Qayyarah, à une soixantaine de kilomètres au sud de la ville, qui sera un « tremplin vital » pour l’offensive sur Mossoul, selon des militaires américains.
Washington a aussi annoncé l’envoi de centaines de soldats américains supplémentaires en Irak pour aider l’armée gouvernementale à combattre l’EI et reprendre Mossoul. Les Etats-Unis compteront alors plus de 4.600 militaires dans ce pays, dont ils s’étaient retirés militairement fin 2011.
Le Quotidien / AFP