Les rebelles prorusses ont infligé mercredi une nouveau revers militaire aux autorités de Kiev, forçant l’armée ukrainienne à abandonner après des combats acharnés Debaltseve, verrou stratégique pour le contrôle de l’est du pays en proie depuis dix mois à une insurrection séparatiste.
Des dizaines de chars, blindés légers et véhicules militaires ukrainiens ont quitté Debaltseve mercredi. (Photos : AFP)
Les Occidentaux peuvent blâmer les séparatistes et les accuser de torpiller le processus de paix en violant le cessez-le-feu décrété samedi, pour les séparatistes soutenus, selon Kiev et les Occidentaux, par Moscou, l’important est ailleurs : en prenant Debaltseve, ils parachèvent des avancées militaires débutées durant l’été.
La zone contrôlée par les rebelles est relativement homogène et fait la jonction entre les territoires séparatistes des régions de Lougansk et de Donetsk. La question qui se pose désormais : les rebelles vont-il s’arrêter là ou continuer de grignoter du terrain plus à l’ouest ?
Devant l’évolution du rapport de forces, François Hollande, Angela Merkel, Petro Porochenko et Vladimir Poutine devaient dans la soirée se parler lors d’une conférence téléphonique à quatre, a annoncé le gouvernement français. Le visage fermé, en tenue militaire, le président ukrainien Petro Porochenko a pris la parole depuis l’aéroport de Kiev pour annoncer l’abandon de Debaltseve avant de s’envoler pour la zone de guerre et y rencontrer les soldats épuisés qui ont dû fuir la ville. « Ce matin, les forces armées ukrainiennes avec la garde nationale ont achevé l’opération d’évacuation planifiée et organisée de nos unités militaires de Debaltseve », a déclaré le chef de l’Etat dans une adresse à la Nation. « A l’heure actuelle, 80% de nos unités sont sorties, nous attendons encore deux convois », a-t-il ajouté précisant avoir ordonné l’évacuation mardi.
Plus tôt dans la journée, des journalistes de l’AFP avaient vu des dizaines de chars, blindés légers et véhicules militaires ukrainiens en provenance de Debaltseve arriver à Artemivsk, ville à environ 35 kilomètres de là. Ces véhicules transportaient des soldats pas rasés et visiblement épuisés dont une partie se sont aussitôt rués vers des magasins d’alimentation.
> Kiev demande des armes à Washington
L’offensive rebelle sur Debaltseve avait été lancée mardi, au troisième jour de la nouvelle trêve arrachée la semaine dernière à l’issue des négociations marathon à Minsk entre les dirigeants allemand, français, russe et ukrainien.
L’Union européenne a dénoncé mercredi la prise de cette ville, qui constitue une « claire violation du cessez-le-feu ». « La Russie et les séparatistes doivent immédiatement et pleinement mettre en oeuvre les engagements pris à Minsk », a insisté la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini.
La Russie est accusée par l’Ukraine, l’UE et les Etats-Unis, d’armer les séparatistes et d’avoir déployé ses troupes en Ukraine, notamment pour gérer les opérations militaires séparatistes, ce que Moscou dément catéoriquement. L’Allemagne a également condamné la prise de Debaltseve, « très néfaste pour les espoirs de paix » en Ukraine.
Les autorités ukrainiennes avaient dans un premier temps démenti avoir abandonné la ville, théâtre de violents combats depuis une dizaine de jours et où plusieurs milliers de civils restaient bloqués par des hostilités. Au moins cinq soldats ont été tués en 24 heures à Debaltseve, a indiqué un porte-parole militaire, Vladislav Seleznev. Dans ce contexte, le président ukrainien Petro Porochenko a réitéré à Washington sa demande de livraison d’armes létales défensives lors d’un entretien téléphonique mardi soir avec le vice-président américain Joe Biden.
Petro Porochenko, qui s’est également entretenu mardi avec la chancelière allemande Angela Merkel, « a appelé les Etats-Unis a mettre en oeuvre des déclarations précédentes sur la fourniture à l’Ukraine de moyens supplémentaires pour renforcer ses capacités défensives », a indiqué son service de presse dans un communiqué.
AFP
> Lire aussi :
Ukraine : Washington condamne la violation du cessez-le-feu et met en garde Moscou (Vidéo)