La région Grand Est freinerait le développement de Climate City, à Chambley, estime le porteur de projet qui parle déjà d’aller voir ailleurs. Faux, rétorque la région, qui attend des éléments technico-financiers tangibles pour soutenir l’idée.
Drôle de partie qui se joue entre Laurent Husson, initiateur du projet Climate City sur Chambley et la nouvelle région Grand Est. Apportée par l’ex-région lorraine, cette cité, 100 % dédiée au climat, appelée à développer et vendre des nouveaux systèmes d’analyse du climat à travers le monde, patine sur le tarmac. Laurent Husson pointe du doigt un exécutif guère prompt à le soutenir : « Sans la région, propriétaire de l’aéroport, nous ne sommes rien. Or on nous a fait savoir qu’elle était particulièrement sceptique. »
Christophe Kieffer, directeur de cabinet du président Richert, s’inscrit en faux : « La région prend le projet au sérieux. Le site de Chambley est intéressant et nous voulons le développer. Climate City peut être une opportunité. » Une pierre dans le jardin de ceux qui douteraient de la volonté de la région Grand Est à développer un projet sur le territoire lorrain, initié par l’ex-président Masseret (PS). « Mais pour cela, nous avons besoin d’éléments tangibles aussi bien techniques que financiers », modère aussitôt le directeur de cabinet.
« Nous sommes attentifs et prudents. Sur le papier, le projet est intéressant, mais depuis la première rencontre avec le président Richert, pas une pièce complémentaire, technico-financière j’entends, n’a été versée au dossier. On ne demande qu’à être associé au tour de table, rencontrer les investisseurs intéressés. »
Syndrome Skylander?
Laurent Husson s’étonne : « Les rapports liés à l’engagement de la région sur 198 000 euros ont tous été remis en temps et en heure à l’équipe Lorraine. Chaque dépense y est détaillée. Il y a dix jours, j’ai envoyé à M. Kieffer un fichier confidentiel comprenant les 60 investisseurs potentiels privés et autres discussions en cours. Notre banque d’affaires a fait suivre un rapport de 18 pages sur son travail. »
Le moment est crucial puisque se joue actuellement la finalisation d’un tour de table de 15 millions d’euros qui doit se réaliser par étapes. « Nous avons besoin des acteurs du territoire pour être crédibles. Déjà que tout le monde s’étonne de nous voir nous installer en Lorraine et ne pas rester à Toulouse! »
Chambley s’est déjà crashé avec Skylander et Laurent Husson craint d’en faire les frais. « Nous ne sommes pas dans la même configuration. 198 000 euros d’aides, ça n’est pas comparable. » Christophe Kieffer assure que Philippe Richert n’est pas victime du syndrome Skylander, « puisqu’il ne l’a pas vécu. On entend le discours scientifique, mais ne comprenons pas la méthode. Nous avons besoin d’éléments opérationnels. »
Vendredi dernier, une réunion était prévue en sous-préfecture de Briey pour faire le point sur les engagements des uns et des autres. «La région devait être présente, mais M. Husson l’a annulée. Voilà qui n’instaure pas un climat de confiance. S’il nous fournit un début de faisabilité technico-financière, nous avancerons avec lui. »
La situation est-elle bloquée? « Nous sommes des gens sérieux, insiste Laurent Husson. Nous avons déjà engagé deux millions d’euros et continuons à croire en Chambley. Cela dit, nous avons repris les discussions avec les sites pressentis avant notre choix de Chambley compte tenu de l’attitude de la région.» Christophe Kieffer avertit : «La région ne portera pas la responsabilité du non-aboutissement du projet. »
Laurence Schmitt (Le Républicain lorrain)
Un projet novateur
Climate City, c’est de l’innovation pure et dure et la région Grand Est est bien obligée d’admettre qu’elle n’a pas forcément les ressources pour juger de la pertinence d’un projet aussi novateur et donc risqué. Il s’agit de créer une cité dédiée à 100 % au climat. À la fois pôle de recherche, centre de développement pour la mise au point de nouveaux systèmes et réseaux d’analyses climatiques et opérateurs de commercialisation à travers le monde. Cibles visées : les villes en urgence climatique.
Laurent Husson, ingénieur-chercheur toulousain qui a travaillé 25 ans dans le secteur spatial, a créé European XLab, une société laboratoire de recherche amenée à créer et développer des pôles d’activité innovants notamment dans le domaine de l’aéronautique et du climat. Si Chambley a obtenu les faveurs des scientifiques, c’est grâce à sa météo et le flux des courants continentaux qui y convergent. Sa qualité d’aéroport non commercial offrant une base de travail exceptionnelle à l’équipe.