L’opérateur téléphonique Tango refuse-t-il aux réfugiés présents dans le pays de souscrire un abonnement téléphonique ? C’est ce qu’affirme une avocate du barreau de Luxembourg.
Un réfugié syrien s’est vu refuser un abonnement mensuel auprès de Tango en raison de son statut. Assisté par une avocate, il n’a pu obtenir d’explication convaincante auprès de l’opérateur qui affirme au contraire avoir assoupli ses règles en faveur des réfugiés.
Alors que le Luxembourg s’est encore récemment engagé à accueillir 500 demandeurs d’asile, il semblerait que les réfugiés déjà présents au Grand-Duché rencontrent quelques difficultés quant à la possibilité de souscrire un abonnement téléphonique. Une démarche qui serait en tout cas impossible auprès de l’opérateur Tango, selon M e Hakima Gouni, avocate au barreau de Luxembourg, qui dit avoir tenté en vain de souscrire un abonnement pour un réfugié syrien possédant pourtant tous les documents nécessaires.
Lors de leur arrivée sur le sol luxembourgeois, les réfugiés sont dans l’obligation de confier l’intégralité des papiers d’identité qu’ils possèdent à l’administration afin d’obtenir une carte de séjour. Ils n’ont alors plus que ce document à présenter pour toute demande officielle. De plus, même en obtenant le statut de résident permanent, le statut de réfugié reste mentionné sur leur titre de séjour.
C’est en se rendant dans l’une des boutiques de l’opérateur Tango qu’un homme originaire de Syrie aurait donc essuyé un refus lorsqu’il a demandé un abonnement téléphonique à son nom. Le vendeur a affirmé, selon M e Hakima Gouni, que le statut de réfugié était incompatible avec l’ouverture d’une ligne. Cet homme possédant une carte de résidence avec une adresse au Luxembourg et un compte à la Poste présente pourtant toutes les garanties nécessaires pour souscrire un abonnement auprès de l’opérateur.
Seul moyen de rester en contact avec la famille
Afin d’obtenir des réponses plus précises sur les raisons de ce refus, l’homme s’est à nouveau rendu dans la boutique en question, accompagné cette fois de M e Hakima Gouni. Une deuxième tentative qui s’est à nouveau soldée par un refus malgré les documents que l’homme était en mesure de produire. À défaut de pouvoir proposer une ligne à ce réfugié syrien, le vendeur l’a alors orienté vers le service client de l’opérateur, raconte l’avocate.
Après s’être renseignée auprès de sa hiérarchie, l’opératrice du service client a alors confirmé les propos du vendeur quant à l’impossibilité de proposer un abonnement à une personne possédant la mention «réfugié» sur sa carte de résident, soutient M e Hakima Gouni. Une directive incompréhensible pour l’avocate qui dénonce une discrimination de plus pour des personnes qui ont besoin de garder le contact avec les membres de leur famille et pour qui le fait d’avoir une ligne de téléphone reste le seul moyen de communiquer avec eux. D’autant qu’il est impossible pour ces personnes de présenter une pièce d’identité sans cette fameuse mention.
La carte prépayée : solution en trompe-l’œil
De son côté, Tango déclare que la souscription d’un abonnement téléphonique nécessite une identification précise et qu’il est donc systématiquement demandé aux futurs clients une carte d’identité ou un passeport afin d’ouvrir une ligne. L’opérateur précise d’ailleurs que les règles concernant les réfugiés ont été modifiées en leur faveur, en ce sens qu’il leur suffit désormais de délivrer un document de protection internationale pour obtenir une carte prépayée. Selon une responsable de la communication à Tango, « il n’y a donc pas de discrimination ou, au contraire, il y a une discrimination positive à l’égard des réfugiés pour les cartes prépayées ». Mais une carte prépayée est une solution compliquée à envisager pour ces personnes fragilisées, étant donné le coût des communications vers l’étranger par ce biais.
Aucun problème pour les cartes prépayées donc, mais il serait malgré tout impossible pour un réfugié possédant une carte de séjour avec une adresse fixe et un compte en banque au Luxembourg de souscrire un abonnement mensuel. Des conditions qui correspondent pourtant aux demandes de l’opérateur qui déclare que pour un abonnement avec téléphone, « les règles sont identiques à l’ensemble des personnes quant aux documents à fournir : domiciliation bancaire et ensemble des coordonnées de la personne incluant une adresse fixe ». Des règles identiques pour tout le monde? M e Hakima Gouni en doute.
Mathieu Rosan