Encore un film sur la colocation ! Cette fois, c’est Adopte un veuf, une comédie plutôt sympathique de François Desagnat avec l’impeccable André Dussolier.
Il s’appelle Hubert Jacquin et, depuis la mort de sa femme, passe le plus clair de ses journées devant la télévision. Il est en pleine déprime. On nous a annoncé une comédie, donc il va y avoir un coup du destin dans ce film réalisé par François Desagnat, au titre bien racoleur : Adopte un veuf . Ainsi, alors qu’il cherche une femme de ménage, c’est Manuella qui se pointe chez lui – elle est en quête d’un appartement où vivre. Elle est jeune et vive…
Mieux, elle va convaincre Hubert d’accueillir dans son appartement deux autres personnes : Paul-Gérard, avocat rigide, bourré de tics et d’angoisses et largué récemment par sa femme, et Marion, jeune infirmière toute en retenue et qui jongle avec les gardes à l’hôpital… Rien moins qu’une famille recomposée, ce qui va donner son lot de surprises à l’histoire et au film de Desagnat qui, plus habitué aux potacheries qu’au cinéma d’art et d’essai, signe là son cinquième long métrage.
À l’origine, la production avait demandé au réalisateur un film sur un thème porteur et dans l’air du temps : la colocation, à condition qu’elle soit improbable, avec un veuf déprimé et une jeune étudiante qui sème la pagaille dans sa vie. Mais Desagnat confie qu’il a vu, dès le début du projet, « quelque chose de profond : l’histoire d’un homme qui n’a jamais eu d’enfant et qui tout d’un coup va devenir père »… Ah! toujours la famille, même recomposée, mais toujours la famille…
«La comédie me manquait vraiment»
Évidemment, et comme on parle ici de comédie qui se veut «sans prise de tête», on a droit à des stéréotypes plus qu’à des personnages et à des situations aussi prévisibles et attendues – ce qui peut donner au spectateur de voir plus une sitcom qu’un film. Mais il y a aussi du rythme, de la bonne humeur, de la générosité. Ce qui, ainsi, sauve du néant dans lequel aurait pu sombrer Adopte un veuf .
Et puis, dans le costume de Hubert Jacquin, veuf cabossé, un peu fané, bien déprimé, il y a un acteur immense : André Dussolier, 70 ans dont 44 de carrière avec, à ce jour, 129 films ciné et séries télé. Aussi brillant sur l’écran que sur scène, il avait, depuis quelque temps, la réputation d’un acteur «intello» – il était un des comédiens fétiches et réguliers d’Alain Resnais et, au théâtre, il a servi des textes exigeants. Alors, quand François Desagnat lui a proposé le rôle de veuf qui va retrouver goût à la vie grâce à la colocation, il n’a pas hésité.
Il explique : « Il suffit de jouer dans un film sérieux et que ça fonctionne pour qu’on ne vous propose que des rôles sérieux. C’est ce qui m’est arrivé. Pourtant, après des rôles graves, j’avais envie de comédie, de légèreté! » Et d’ajouter : « La comédie me manquait vraiment. J’aime ce télescopage des générations, l’opposition des caractères, ce qui est un grand classique du rire. C’était écrit drôle, et je crois qu’à l’écran, c’est drôle. »
Acteur de grande expérience, André Dussollier dit aussi avoir vécu, durant le tournage d’ Adopte un veuf , un véritable bain de jouvence. Mieux : à aucun moment il ne s’est senti dans un rapport de maître à élève avec les autres comédiens parce que, « sur un tournage, l’âge ne compte pas. Ce qui nous réunit, c’est le plaisir du jeu. Avec les autres acteurs, certes plus jeunes, la glace s’est vite rompue. Cela tient à l’essence même de notre métier, qui a quelque chose d’éternellement juvénile. Et puis, j’aime tant cette phrase célèbre : « L’âge véritable, ce ne sont pas les années qu’on a vécues mais celles qu’il nous reste à vivre… » »
Serge Bressan
Adopte un veuf, de François Desagnat (France, 1 h 37) avec André Dussollier, Bérengère Krief, Arnaud Ducret…