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Arrestation au Nigeria de Khalid al-Barnawi : quel impact sur Boko Haram ?


Capture d'une vidéo du groupe islamiste Ansaru, en décembre 2012. (AFP)

Saluée comme un « énorme succès » par les services de sécurité nigérians, l’arrestation début avril de Khalid al-Barnawi, chef du groupe islamiste Ansaru, aura cependant un impact incertain sur les activités de Boko Haram au Nigeria, selon divers analystes.

Dans la dynamique des relations entre groupes islamistes, l’impact de l’arrestation d’al-Barnawi, un des « terroristes » les plus recherchés par les Etats-Unis, est difficile à mesurer, estime Andrew Walker, journaliste indépendant auteur de plusieurs publications sur Boko Haram.

« Il est certain que le retrait de la scène d’une figure aussi charismatique peut provoquer une dissémination de ses combattants et de ses fidèles », note-t-il, ajoutant que les réseaux peuvent « éclater en divers groupes de bandits se combattant les uns les autres ». Mais « il est aussi possible que ces partisans se rallient à un nouveau leader », ajoute Andrew Walker.

Al-Barnawi était sûrement « très influent », admet Yan St-Pierre, du groupe de réflexion Modern Security Consulting, mais il n’était « qu’une pièce » d’une mécanique très disparate. Son arrestation « ne devrait pas changer grand chose aux activités terroristes d’Ansaru », poursuit Yan St-Pierre en rappelant que le groupe n’a pas mené d’opération majeure depuis 2013.

« Ce qui peut changer en revanche, c’est dans les ouvertures que certains groupes liés à Boko Haram ont faites en direction d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), selon l’analyste, alors que Boko Haram s’est officiellement affilié à l’Etat islamique (EI).

Formé au Soudan, en Afghanistan et en Algérie auprès d’Aqmi, Khalid al-Barnawi, 47 ans, était « un élément moteur » de ces contacts entre groupes islamistes en direction d’Aqmi, juge Yan St-Pierre.

Pour les services de sécurité nigérians en revanche, la capture d’al-Barnawi, le plus haut responsable islamiste arrêté au Nigeria depuis 2009, reste « un énorme succès ». « Son arrestation est un énorme succès et va avoir un effet profond sur les opérations anti-terroristes au Nigeria et au-delà », a assuré à l’AFP sous couvert d’anonymat un haut responsable des services nigérians.

Khalid al-Barnawi, de son vrai nom Usman Umar Abubakar et désigné en 2012 par les Etats-Unis comme un des membres les plus recherchés de la nébuleuse « terroriste », a été arrêté le 1er avril avec trois de ses complices à Lokoja, capitale de la province de Kogi, dans le centre du Nigeria, loin de la zone d’activités habituelle de Boko Haram.

Quatre téléphones satellitaires ont été saisis lors de ces arrestations. Ils ont fourni « plusieurs pistes » vers de hauts responsables de Boko Haram et d’Ansaru à Lokoja, dans la capitale nigériane Abuja et à Jos, plus au nord, selon un responsable des services de renseignement (DSS) nigérians.

« Nous avons plusieurs terroristes de haut rang sur notre radar grâce aux informations fournies par les téléphones, nous les coincerons le moment venu », a assuré un autre membre de ces services.

L’arrestation d’al-Barnawi a également relancé les interrogations sur le sort du leader de Boko Haram, Abubakar Shekau, son ancien chef avant la dissidence d’Ansaru en 2012.

Dans une vidéo publiée fin mars, Abubakar Shekau avait surpris les services de renseignement en affirmant que, pour lui, « la fin était venue ». Quelques jours plus tard, Boko Haram affirmait dans une autre vidéo son intention de « poursuivre (ses) activités sous les ordres du représentant de la branche ouest-africaine (du califat) sheikh Abubakar Shekau ».

Selon les services de renseignement nigérians, al-Barnawi « devrait bientôt être présenté devant un juge pour être inculpé ». Ce processus judiciaire, indique-t-on de même source, est particulièrement important compte tenu du fait que Boko Haram avait basculé dans la violence après la mort en détention de son fondateur Muhamad Yusuf en 2009.

« La dernière chose que les autorités veulent, c’est d’en faire un nouveau martyr », résume Yan St-Pierre.

Le Quotidien / AFP