La Turquie et Israël, en brouille depuis 2010, se sont entendus pour « finaliser » rapidement un accord de normalisation de leurs relations, ont annoncé vendredi les autorités d’Ankara au terme d’une nouvelle session de négociations à Londres.
Dans une déclaration publiée tard dans la nuit, le ministère turc des Affaires étrangères a fait état de « progrès » et de « rapprochement » lors de ces discussions et indiqué que les deux pays avaient « convenu que l’accord serait finalisé au cours de la prochaine réunion qui sera convoquée « très prochainement ». De son côté, un responsable israélien a indiqué que « les points de vue se rapprochent ».
Les pourparlers de Londres ont été menés par le sous-secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères Feridun Sinirlioglu côté turc. Israël était représenté par l’envoyé spécial du Premier ministre Benjamin Netanyahu, Joseph Ciechanover, et le président par intérim du Conseil de sécurité nationale, le général Jacob Nagel, selon Ankara.
Les précédentes sessions de négociations s’étaient déroulées à Genève.
Longtemps alliés, les deux pays ont quasiment gelé leurs relations depuis 2010 et l’assaut meurtrier lancé en 2010 par des commandos israéliens contre plusieurs bateaux affrétés par une ONG islamique turque, proche du régime de l’actuel président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan, qui voulait rompre le blocus imposé à Gaza. L’opération s’était soldée par la mort de dix Turcs.
Après plusieurs années de froid, largement entretenues par des déclarations incendiaires de M. Erdogan, les deux pays ont renoué contact. Dans un entretien accordé vendredi, avant le communiqué du ministère, au quotidien Vatan, le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu a estimé que « d’importants progrès ont été accomplis » par les deux parties.
La Turquie a posé trois conditions à une normalisation: des excuses publiques pour l’incident de 2010, des indemnisations pour les victimes et la levée du blocus imposé depuis 2006 par Israël à Gaza, contrôlé par le mouvement islamiste palestinien Hamas. M. Netanyahu a déjà présenté des excuses officielles et, selon Ankara, les négociations sur les compensations sont presque bouclées.
Le ministère turc des Affaires étrangères n’a pas précisé la nature des « progrès » accomplis à Londres mais Ankara a toujours précisé que la levée du blocus de Gaza, hautement improbable selon les analystes, était indispensable à un accord.
La Turquie est l’un des plus fidèles soutiens du Hamas et M. Erdogan qualifie régulièrement de « génocide » la politique israélienne envers les Palestiniens. « Nos conditions n’ont pas changé depuis 2010 », a encore rappelé jeudi M. Davutoglu devant la presse.
Plusieurs signes récents ont confirmé le réchauffement en cours entre les deux pays. M. Erdogan s’est entretenu au téléphone avec son homologue israélien Reuven Rivlin après l’attentat suicide qui a tué le 19 mars à Istanbul quatre touristes étrangers, dont trois citoyens Israéliens. Lors de sa visite aux Etats-Unis la semaine dernière, le président turc s’est également entretenu avec des représentants d’associations juives.
Les analystes suggèrent que le désir de rapprochement manifesté par Ankara a été accéléré par la crise diplomatique qui affecte ses relations avec la Russie autour de la guerre en Syrie, avec un intérêt particulier pour les réserves de gaz israéliennes. Moscou est le principal fournisseur d’hydrocarbures d’Ankara.
Le Quotidien / AFP