Alors que le Luxembourg est cité à plusieurs reprises dans les documents des «Panama Papers», les réactions se faisaient encore attendre lundi soir.
Avec quatre des dix principales banques citées dans les «Panama Papers», le Luxembourg est une nouvelle fois sous les projecteurs sur le sujet de la fraude fiscale. Mais au milieu des vacances de Pâques, le calme était de mise, hier.
La première réaction est venue, sans surprise, du parti politique déi Lénk qui a officiellement demandé que l’affaire soit abordée par la commission des Finances et du Budget. «Il nous paraît important que le gouvernement communique à la Chambre des députés les informations relatives aux divulgations de l’ICIJ qu’il détient ainsi que les mesures appropriées qu’il entend prendre», peut-on notamment lire. Cette sortie est la seule d’un parti luxembourgeois.
Plus tôt dans la journée, le régulateur financier suédois avait annoncé avoir contacté son homologue luxembourgeois au sujet des révélations sur la première banque scandinave, Nordea, qui aurait facilité l’évasion fiscale de ses clients.
Les documents montrent qu’une filiale luxembourgeoise de la banque suédoise conseillait ses clients en ce sens. La télévision publique SVT, membre du Consortium, a qualifié Nordea de «lien des riches avec les paradis fiscaux», Nordea International Private Banking leur permettant de monter des structures complexes pour cacher leurs avoirs.
«Nous n’étions pas du tout au courant jusqu’à lundi, c’est pourquoi nous avons immédiatement contacté nos homologues au Luxembourg, a affirmé lors d’une conférence de presse à Stockholm un cadre de l’Inspection du service financier, Christer Furustedt. D’une part, pour voir s’ils étaient déjà au courant, d’autre part, pour voir quels renseignements nous devons récolter pour donner suite.»
Dans un communiqué, Nordea a reconnu que «fin 2009», sa filiale luxembourgeoise avait «commencé à prendre des mesures d’anticipation au-delà des lois et règlements en vigueur dans le secteur».
Mais «tous les clients n’ont pas apprécié cette façon de faire et par conséquent le nombre de ceux bénéficiant de ces structures a été réduit depuis 2009», a-t-elle ajouté, affirmant : «Nous n’acceptons pas d’être utilisés comme plateforme à l’évasion fiscale.» Les noms de 400 personnes morales et physiques suédoises figurent dans les «Panama Papers».
Explications de la BIL et de la Société Générale
Parmi les établissements bancaires luxembourgeois cités dans l’affaire, deux ont réagi. La BIL, dont une filiale, Experta, apparaît en tête des transactions avec Mossack Fonseca, a fait savoir qu’elle prenait «les accusations au sérieux» et qu’elle «enquêtait sur celles-ci». La BIL précise qu’Experta a toujours respecté «les cadres légaux nationaux et internationaux».
De son côté, la Société générale, à propos de sa filiale luxembourgeoise Société générale Bank&Trust, se contente de rappeler la position qu’elle avait adoptée devant la commission d’enquête du Sénat française… en 2012. Comme la BIL, l’établissement rappelle qu’il respecte le Common Reporting Standard de l’OCDE, un mécanisme «permettant aux autorités fiscales d’avoir connaissance en toute transparence des comptes financiers détenus à l’étranger par leurs contribuables, qu’ils soient détenus directement ou par le biais de sociétés patrimoniales offshore».
Les banques J. Safran Sarasin et Landsbanki ne se sont pas exprimées.
« De toute évidence » des clients luxembourgeois
La liste détaillée des clients de Mossack Fonseca est dans les mains des médias partenaires de l’ICIJ. Nous avons contacté l’un de ses membres à qui nous avons demandé si des clients luxembourgeois figuraient parmi les documents. S’il n’a pas le droit de répondre de manière détaillée à ce type de question, comme le stipule le règlement de l’ICIJ, il confirme que «de toute évidence c’est le cas».
Aucun journaliste luxembourgeois ne fait partie du Consortium international des journalistes d’investigation. Une situation qui a pour conséquence l’absence de données sur le Grand-Duché. Il faudra donc attendre de nouvelles révélations officielles pour que les premiers noms locaux sortent du chapeau.
Christophe Chohin