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Loi travail : El Khomri défend son texte devant les députés


Laurent Berger (CFDT) à son arrivée le 14 mars 2016 à Matignon à Paris. (Photo : AFP)

Myriam El Khomri a défendu mardi son projet de loi travail «profondément réformateur» devant des députés de tous bords, critiques pour des raisons diverses et réclamant des évolutions, un petit aperçu pour la ministre du Travail du débat parlementaire prévu début mai.

«Je comprends qu’un texte aussi profondément réformateur suscite des questionnements et nécessite des débats», a déclaré la ministre du Travail devant la commission des Affaires sociales, présidée par la socialiste Catherine Lemorton, une étape formelle mais délicate avant l’examen du projet de loi au Parlement le 3 mai.

La ministre du Travail a défendu un texte «équilibré» qui vise à «renforcer le dialogue social» au plus près de l’entreprise, mais avec «la conviction que c’est par le collectif que le salarié est le mieux défendu». Bien que les députés se soient tous dits conscients de la nécessité de réformer, son avant-projet a été accueilli par une vague de critiques, notamment sur l’insuffisance de protections pour les salariés, mais aussi pour les TPE-PME, la complexité ou la faiblesse du compte personnel d’activité, les risques du fameux article sur les licenciements économiques ou l’absence de lien entre code du travail et niveau de chômage.

L’absence de concertation entre l’exécutif et les partenaires sociaux sur cette réforme du droit du travail a également été mise en avant. «Nous avons là un texte qui mérite encore d’être précisé», a déclaré Christophe Sirugue (PS), rapporteur du projet. Dans l’article très décrié sur les licenciements économiques, doit être inscrite l’«ampleur» des baisses du chiffre d’affaire, des commandes ou du résultat d’exploitation évoqués par les entreprises pour justifier un licenciement, a-t-il suggéré.

En outre, selon lui, le texte doit également «évoluer» par rapport «aux demandes des TPE-PME» et «à la protection des salariés de ce pays qui ont besoin d’être rassurés». Suppression du plafonnement des indemnités prud’homales pour licenciement abusif, renoncement aux décisions unilatérales de l’employeur sans accord dans les entreprises de moins de 50 salariés pour le forfait-jour ou les astreintes: le gouvernement a déjà fait des concessions qui ont apaisé la majorité, d’abord vent debout contre ce projet visant à réformer le droit du travail.

«Beaucoup d’enthousiasme»

Mais frondeurs et écologistes, qui dénoncent une réforme reposant sur «une philosophie libérale» et des «régressions sociales», réclament le retrait du texte, comme les syndicats CGT, FO, Solidaires ou les organisations de jeunesse Unef et UNL, qui appellent à une «grosse mobilisation» jeudi.

En écho au patronat, les députés LR réclament une «réécriture». Leur chef de file, Christian Jacob, a prévenu mardi que si on n’y remettait pas les propositions «un temps évoquées», comme le forfait-jour, le plafonnement des indemnités prud’homales ou le temps de travail des apprentis, le texte ne pouvait «être votable» par les députés LR. La ministre du Travail, qui a dit mardi aborder le débat parlementaire avec «beaucoup d’enthousiasme», promet qu’il va «enrichir» la réforme avec des propositions émanant «de droite et de gauche».

Cette loi est censée, selon Manuel Valls, répondre au chômage de masse «auquel notre pays s’est habitué depuis trop longtemps» (3,59 millions de personnes sans emploi en février). L’étude d’impact du texte précise que certains articles (licenciement économique, référendum ou primauté de l’accord d’entreprise en matière de temps de travail) auront un effet sur la croissance économique et «par conséquent l’emploi», mais se garde d’avancer le moindre chiffrage.

Les syndicats représentatifs (CGT, CFDT, CFE-CGC, FO, CFTC) et le patronat (Medef, CGPME, UPA), qui ont commencé le travail de lobbying au Parlement, seront, eux, entendus par la commission des Affaires sociales mercredi. Et jeudi, le gouvernement va une nouvelle fois passer le test de la rue, avec des grèves et manifestations prévues partout en France. La mobilisation s’annonce large: fonctionnaires, salariés d’Air France ou des ports et docks sont appelés à cesser le travail, tout comme la RATP et la SNCF.

Les députés écologistes, dont Cécile Duflot et Noël Mamère, vont participer aux défilés. Les syndicats prévoient une mobilisation plus importante que celle du 9 mars, où plus de 200.000 personnes avaient défilé dans l’Hexagone (450 000 selon les organisateurs). Et ils menacent d’en organiser d’autres, afin de peser sur le débat parlementaire.

Le Quotidien/AFP