Resté deux septennats complets à l’Elysée, de 1981 à 1994, François Mitterrand est décédé le 8 janvier 1996, à l’âge de 79 ans des suites d’un cancer longtemps tenu secret.
Ce cancer de la prostate avait été diagnostiqué en 1981, après sa prise de fonctions. Opéré une première fois en septembre 1992, il avait alors évoqué publiquement sa maladie et, depuis, était soumis à d’éprouvants traitements chimiothérapiques et radiothérapiques. Il avait subi une deuxième intervention en juillet 1994.
Sa mort est survenue à 08H30 dans l’appartement parisien du 9, de l’avenue Frédéric Le Play, mis à sa disposition par l’Etat après son départ de l’Elysée. Il y menait une existence discrète et travaillait à la rédaction d’un ouvrage sur sa politique étrangère.
Fréquemment, puis de moins en moins souvent, il allait se promener au Champ de Mars voisin, accompagné d’un garde du corps et d’amis. «Les derniers temps, il était très affaibli, il marchait à l’aide de béquilles, le corps plié, soutenu par son médecin. Depuis une quinzaine de jours, il ne sortait plus», confiait un voisin en apprenant son décès.
Selon son urologue, le professeur Guy Vallancien : «la mort ne lui faisait pas peur, mais il se posait beaucoup de questions sur l’après».
En 1995, il avait préfacé l’essai de la spécialiste de la fin de vie, la psychologue Marie de Hennezel, «La mort intime»: «Comment mourir ? Nous vivons dans un monde que la question effraie et qui s’en détourne. (…) Jamais peut-être le rapport à la mort n’a été si pauvre qu’en ces temps de sécheresse spirituelle où les hommes, pressés d’exister, paraissent éluder le mystère. Ce livre est une leçon de vie».
Ce 8 janvier, le président Jacques Chirac s’est très rapidement rendu rue Frédéric Le Play. Il a ensuite annoncé lui-même le décès de son prédécesseur devant des centaines de journalistes rassemblés à l’Elysée, où devait se dérouler la cérémonie des voeux à la presse. Il est aussi intervenu au début des journaux télévisés de 20H00 pour saluer la mémoire de l’ancien chef de l’État.
Une émotion mondiale
De nombreuses personnalités sont venues ce début de semaine avenue Le Play. Parmi les premières, Pierre Bergé, un ami personnel de M. Mitterrand, et l’un de ses frères, Robert. Ont suivi des responsables politiques, toutes tendances confondues, dont le Premier ministre Alain Juppé et l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing. L’hommage a réuni l’ensemble de la classe politique française, à l’exception de l’extrême-gauche et du Front national.
Cette disparition a également suscité une intense émotion à travers le monde. Le chancelier allemand Helmut Kohl, l’ancien président américain George Bush et l’ancien Premier ministre britannique Margaret Thatcher ont été parmi les premiers à réagir. Yasser Arafat, le président de l’Autorité palestinienne, a été le premier dirigeant étranger à s’incliner devant la dépouille.
Des centaines d’anonymes ont défilé devant l’immeuble où reposait le défunt. Parmi eux, beaucoup de jeunes, certains arborant une rose rouge à la main.
M. Mitterrand avait passé les fêtes de Noël à Assouan, en Haute-Egypte, en famille, comme il le faisait depuis des années. Ses médecins lui avaient déconseillé d’entreprendre ce long déplacement, en raison de sa fatigue. Il avait passé l’essentiel de son temps dans la suite de l’hôtel ou il était descendu.
Le soir du réveillon de Noël, il avait pu dîner avec les siens, dégustant huîtres et foie gras venus de Paris. Il était rentré en France, très éprouvé, le 29 décembre, pour se rendre dans sa propriété de Latche, dans les Landes, où il célébrait chaque année le Nouvel an. Il était revenu à Paris le 2 janvier.
AFP/M.R.