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Rétrospective éco 2025 : le Luxembourg se diversifie, non sans douleur


(Photo : AFP)

Tout au long de l’année, le gouvernement s’est efforcé de lancer et de développer de nouveaux secteurs d’activité, notamment dans l’IA et la défense. Le PIB devrait progresser d’environ 1 % en 2026. En parallèle, le travail de promotion a été entaché par des pannes et des coups portés à l’emploi. 

Le bulldozer Trump roule sur l’Europe

(Photo : AFP)

Le 2 avril 2025 est qualifié par Donald Trump de Liberation Day, le jour où les États-Unis se sont «libérés» de ce qu’il considère comme des échanges commerciaux injustes. «Notre pays a été pillé, saccagé, violé et dévasté par des nations proches et lointaines, des alliés comme des ennemis», assène le président américain, avant de présenter un tableau où figurent des tarifs aléatoires imposés à plus de 50 pays, dont la Chine, l’UE et le Japon. Sont aussi visés les îles Heard-et-MacDonald, un territoire australien, habitées par… des manchots. L’anecdote pourrait faire rire, mais l’impact des droits de douane américains sur l’économie mondial est important, en dépit de suspensions temporaires décidées pour permettre de renégocier les tarifs.

L’UE conclut le 27 juillet un accord commercial avec Donald Trump, que nombre d’observateurs qualifient de capitulation. Le «deal» prévoit une taxe de 15 % sur les produits européens exportés aux États-Unis, contre 20 % prévus au départ. L’UE s’engage en outre à 750 milliards de dollars d’achats d’énergie et à 600 milliards d’investissements supplémentaires aux États-Unis.

Les producteurs d’acier et d’aluminium sont plus durement frappés. Ils doivent, depuis juin, s’acquitter de 50 % de droits de douane. Au Luxembourg, c’est précisément le secteur sidérurgique qui souffre le plus de la guerre commerciale déclenchée par Donald Trump. Alors que le volume global des exportations vers les États-Unis connaît un recul limité à 2 % sur les huit premiers mois de 2025, les exportations de métaux et produits associés sont en baisse de 5 % par rapport à la même période en 2024. Le volume des exportations augmente dans les domaines du plastique (+180 %), du caoutchouc (+70 %) et des textiles (+50 %).

Les États-Unis restent le deuxième partenaire commercial du Luxembourg en dehors de l’UE.

ING Luxembourg supprime 124 emplois et 70 000 comptes

(Photo : Julien Garroy)

La décision d’ING de cesser son offre de banque de détail pour les particuliers, engagée en mai 2024, se solde, en octobre dernier, par un plan social touchant 124 salariés. L’accord signé avec les syndicats OGBL, LCGB et ALEBA prévoit pour les salariés licenciés des indemnités financières additionnelles et comprend un soutien consacré à la transition de carrière et à la formation. «J’ai pleinement conscience de l’impact personnel que cette transformation aura sur les collègues concernés», reconnaît, en septembre, Michael Burch, le directeur général d’ING Luxembourg. La direction affirme alors avoir déployé plusieurs mesures (mobilité interne, dispositifs de fin de carrière) pour atténuer l’impact de la restructuration. Mais ces dispositifs n’évite pas le plan social.

Sur les 90 000 clients que compte ING au Grand-Duché, quelque 70 000 se voient obligés de fermer leurs comptes, y compris des PME. Une offre visant à transférer leurs activités bancaires chez BGL BNP Paribas est ficelée. L’opération doit être achevée pour le 1er février 2026.

Au-delà des suppressions de postes et de comptes, les conséquences touchent aussi l’organisation du réseau. Les agences d’Esch-sur-Alzette et d’Ettelbruck ferment leurs portes le 30 novembre, réduisant à deux le nombre de points d’accueil physiques de la banque au Grand-Duché : Luxembourg-Gare et Strassen. Pour la direction, cette réorganisation est présentée comme «indispensable à la pérennité» de la banque au Luxembourg. «Pour préserver notre position à long terme, nous devons concentrer toutes nos ressources sur nos services de Private Banking et Wholesale Banking», insiste Michael Burch.

Le cœur du Luxembourg bat très fort à Osaka

(Foto: LSA)

Quelques chiffres illustrent l’enthousiasme des visiteurs, très majoritairement japonais, qui découvrent, entre la mi-avril et la mi-octobre, le pavillon luxembourgeois. Ils dégustent 2 000 Grillwurschten, 19 500 Gromperekichelcher et 7 800 brioches remplies de Feierstengszalot, une salade typiquement luxembourgeoise à base de viande bouillie de bœuf.

Le pavillon est placé sous le signe du «Doki Doki», l’expression japonaise désignant des battements de cœur enthousiastes et joyeux. Le Luxembourg figure dans le top 10 des pavillons les mieux cotés.

«Nous avons réussi à rassembler culture, gastronomie et innovation. Il a importé que le pavillon montre les différentes facettes du Luxembourg : l’ouverture et la diversité de notre société, la force de notre innovation et la beauté de nos paysages, pour aussi avoir un attrait touristique», soulignera Xavier Bettel, le ministre des Affaires étrangères, au moment de tirer le bilan de cette 25e participation du Grand-Duché à une Exposition universelle.

«L’objectif a été de promouvoir nos secteurs d’excellence, dont le spatial, l’IA ou encore l’économie circulaire. Autour de la tech, le Japon présente un grand nombre d’opportunités que nous souhaitons saisir», évoquera le directeur général de la Chambre de commerce, Carlo Thelen. En avril et en juillet, 160 représentants de 95 entreprises différentes font le voyage à Osaka et à Tokyo.

Le rendez-vous est-il déjà pris pour le 1er octobre 2030, jour d’ouverture de l’Expo 2030? Le ministre Bettel émet un «préjugé favorable», en attendant de soumettre le projet au Conseil de gouvernement, qui devra formaliser la participation du Luxembourg à la prochaine Exposition universelle.

Post, Tango et Luxtrust : le coup de la panne

Le 23 juillet, Post est victime d’une cyberattaque massive qui provoque le crash de ses réseaux. Identifiée vers 16 h 15, la panne dure jusqu’à 19 h 50. Elle concerne l’accès à internet et aux réseaux mobiles 4G et 5G et les téléphones fixes. Les clients de Post ne sont plus en mesure de joindre les services d’urgence et de secours (112 et 113), ce qui provoque de nombreuses interrogations.

Des travaux sont entamés pour assurer que le 112 et le 113 restent à tout moment joignables, y compris en cas de panne d’un opérateur. Les paiements par carte bancaire dans les commerces sont affectés. Des vols au Findel sont déroutés ou retardés.

Écartée dans un premier temps par le directeur Claude Strasser (photo), une cyberattaque «d’un niveau technique particulièrement avancé et sophistiqué» est confirmée trois jours après l’incident. Le 5 août, le réseau Tango connaît à son tour une panne technique, sans lien avec une cyberattaque, selon Proximus Luxembourg. Les services ne sont pas disponibles pendant quatre heures.

Plus récemment, le 16 décembre, LuxTrust est victime, à son tour, d’un incident technique majeur. Certains services, dont l’authentification, restent indisponibles pendant près de 24 heures. Tandis que la direction annonce une «analyse approfondie» de l’incident, le ministre Lex Delles affirme qu’«une panne aussi longue est inacceptable». Selon nos confrères de Luxembourg Times, le gouvernement luxembourgeois étudie la possibilité de recourir à un prestataire concurrent.

La défense, nouveau pilier de l’économie nationale

La hausse conséquente du budget consacré à l’effort de défense ouvre des portes à un tout nouveau écosystème. Après un travail préparatif minutieux, l’alliance LuxDefence est lancée, fin novembre. Elle regroupe quelque 80 entreprises engagées dans le domaine de la défense. «On n’est plus un simple spectateur, mais faisons partie intégrante des tractations à l’échelle européenne et de l’OTAN», met en avant André Wilmes, le président de LuxDefence.

Le gouvernement s’engage, au somme de l’OTAN à La Haye (24-25 juin), à consacrer, d’ici 2035, un total de 5 % de son revenu national brut (RNB) à son effort de défense. En 2026, pour atteindre le seuil intermédiaire de 2 % du RNB, le Luxembourg investira 1,3 milliard d’euros.

LuxDefence a pour mission de développer un écosystème qui vise une «intégration véritable, équitable et collaborative de l’industrie de la défense» afin de «produire des capacités de défense tangibles».

La ministre Yuriko Backes Backes estime que le Luxembourg dispose déjà «d’un écosystème (de la défense) absolument dynamique». «C’est pourquoi le gouvernement encourage vivement la création de synergies pour le développement de capacités et de technologies destinées à la fois à un usage double et à des capacités et applications purement défensives», développe-t-elle.

Des matériaux composites produits au Luxembourg sont déjà utilisés dans des avions de chasse, dont les F-35 fabriqués aux États-Unis et les Eurofighter Typhoon.

Début décembre, la deuxième édition du Luxembourg Defence Technology and Innovation Day a lieu à la Chambre de commerce, avec 480 participants. «Cet engouement est aussi le reflet de la stratégie de défense du gouvernement. Cela crée un environnement beaucoup plus favorable au développement de ces technologies», souligne, le 9 décembre, Mario Grotz, le directeur général de Luxinnovation.

Des robotaxis sur les routes dès 2028?

Le Pr Raphaël Frank. (Photo : archives lq/fabrizio pizzolante)

L’automne est marqué par les efforts du gouvernement pour positionner le Luxembourg comme hub européen majeur dans les domaines de l’intelligence artificielle (IA), des données et de la technologique quantique.

Le Premier ministre, Luc Frieden, effectue, à la mi-novembre, une visite de travail sur la côte ouest des États-Unis pour «soigner et approfondir» les relations commerciales avec plusieurs géants de la tech, dont Google, Amazon, Microsoft et Nvidia. Un mois plus tard, les ministres Xavier Bettel, en charge du Commerce extérieur, et Lex Delles (Économie), s’envolent vers San Francisco afin d’y promouvoir la nouvelle stratégie visant à positionner le Luxembourg en tant que pionnier de la conduite automatisée en Europe.

«Nous savons que les Américains figurent parmi les plus grands acteurs dans le domaine de la tech. Tous les géants du numérique ont leur siège sur la côte ouest. Si on veut leur parler, il faut aller à leur rencontre», plaide le chef du gouvernement. En parallèle, Luc Frieden cherche à «renforcer et soigner, dans ce contexte géopolitique très compliqué, nos relations économiques avec les États-Unis». La visite du Premier ministre chez Amazon est finalement entachée par l’annonce d’un plan social d’envergure par Amazon Luxembourg (lire ci-contre).

Pour leur part, Xavier Bettel et Lex Delles rencontrent en Californie plusieurs entreprises majeures du secteur de la conduite automatisée, dont PonyAI et Tensor, qui sont déjà implantées au Luxembourg. «Les échanges ont porté sur les avancées technologiques, les enjeux réglementaires et de sécurité, et les perspectives de coopération dans les essais sur route, l’analyse de données et l’intégration de véhicules autonomes dans des environnements urbains complexes», évoque le communiqué officiel. Une solide base pour relever le défi de faire circuler, dès 2028, des robotaxis sur les routes luxembourgeoises.

Vers une fin de la triste saga Liberty Steel?

La faillite officielle de l’usine Liberty Steel à Dudelange a été déclarée le 29 novembre 2024.

À l’abandon depuis maintenant plus de trois ans, le site dudelangeois de Liberty Steel, dont une partie a commencé à être démantelée, peine à trouver un repreneur, notamment depuis que le groupe turc Tosyali s’est retiré des négociations au printemps dernier. Au cours de l’été, le gouvernement dépose une offre auprès du curateur avec l’objectif de réaménager le site. Le 19 décembre, le ministre Lex Delles annonce que la proposition a été acceptée.

L’État débourse finalement 14,5 millions d’euros pour implanter sur le site industriel deux nouvelles activités : un Handwierkerhaff, une entité regroupant des entreprises artisanales, et des activités économiques relevant du secteur de la défense, notamment le Defence Campus.

L’avenir des anciens travailleurs de Liberty Steel, qui n’ont pas encore retrouvé d’emploi, reste incertain. Selon Lex Delles, la faillite de l’entreprise sidérurgique en novembre 2024 ne tombe pas sous les modalités offrant une priorité aux salariés pour occuper les nouveaux emplois créés sur le site.

En mai, le retrait fracassant du repreneur turc Tosyali est vécu comme une véritable douche froide par les 130 salariés que compte encore l’usine Liberty Steel de Dudelange, comme pour les syndicats. «Avec le retrait définitif de Tosyali, on est face à une catastrophe, à une échelle qu’on n’avait pas connue jusqu’ici au Luxembourg», soupire alors Stefano Araujo, le secrétaire central de l’OGBL.

Début décembre, les syndicats accusent le gouvernement d’avoir fait volte-face sur la question des préretraites. «Après plusieurs mois de concertation et des engagements clairs, les deux ministres et leurs conseillers invoquent désormais de prétendus obstacles juridiques», dénoncent-ils.

Une «catastrophe sociale» chez Amazon

Le gouvernement réitère son engagement à maintenir «un dialogue constructif» avec Amazon.

Le Premier ministre, Luc Frieden, n’a pas changé d’avis. Le plan social massif chez Amazon ne représente pas une claque pour lui et le Luxembourg, après qu’il a évoqué la restructuration avec les patrons du géant américain lors d’une visite en Californie (lire également ci-dessus). Il s’est notamment vu assurer qu’Amazon comptait «renforcer son hub européen» et rester ainsi «un acteur important au Luxembourg».

Poussé par les syndicats, le chef du gouvernement charge le désormais ex-ministre du Travail Georges Mischo de convaincre la direction d’Amazon Luxembourg de négocier un plan de maintien dans l’emploi. En vain.

Le 13 décembre est finalement annoncé le licenciement sec de 370 salariés, soit une centaine de moins qu’annoncé au départ. Quoi qu’il en soit, ce plan social constitue une vraie «catastrophe sociale», selon Olivier Landini, le porte-parole de l’OGBL. Il précise que le plan social est «d’une ampleur qu’on n’a plus connue depuis des décennies».

En octobre, Amazon annonce vouloir licencier quelque 14 000 personnes dans le monde, surtout dans les fonctions support ou stratégiques (ressources humaines, publicité, cadres, etc.), représentant 4 % de ses 350 000 postes de bureau. Cela ne concerne pas la main-d’œuvre des entrepôts, qui représente la majorité du plus de 1,5 million de salariés du géant du commerce en ligne.

Malgré les licenciements, Amazon continue à se développer au Luxembourg, notamment dans le domaine des satellites. La filiale spatiale Blue Origin est depuis peu présente au Luxembourg. Au 1er janvier 2025, l’entreprise américaine compte environ 4 400 salariés au Grand-Duché.

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