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Vers un crash fatal?

Le lobby de l’industrie automobile, qui a trouvé des alliés politiques dans le camp des conservateurs – et de l’extrême droite –, peut se réjouir. Mardi, la Commission européenne a proposé de renoncer à l’interdiction de vendre, à partir de 2035, tout véhicule neuf équipé d’un moteur thermique.

Dans les faits, la mesure n’a jamais consisté en une interdiction stricte : elle prévoyait que les nouvelles voitures ne devaient plus émettre de gaz à effet de serre. La porte à une alternative au tout-électrique était donc déjà entrouverte, à condition que les constructeurs parviennent à faire rouler leurs véhicules avec des carburants affichant 0% d’émissions de CO₂.

La marche arrière enclenchée par Bruxelles ne change, en réalité, rien à la liste des alternatives potentielles. À l’horizon 2035, des carburants synthétiques (e-fuels) ou l’hydrogène devront être produits en quantités suffisantes et à un prix compétitif pour pouvoir être commercialisés.

Les défenseurs de la fameuse «neutralité technologique» – un terme derrière lequel se cache souvent une résistance au virage climatique, voire le refus de le prendre – n’ont, au mieux, remporté qu’une victoire d’étape.

La proposition de la Commission devra encore être approuvée par les États membres et par le Parlement européen. Dans l’hémicycle, les conservateurs du PPE, farouches opposants au bannissement supposé du moteur thermique, semblent une nouvelle fois contraints de s’allier aux formations d’extrême droite pour dégager une majorité.

Car, au sein même du parti, des voix dissidentes se font entendre. C’est notamment le cas au CSV. Le ministre de l’Environnement, Serge Wilmes, s’oppose au rétropédalage porté par le chancelier allemand, Friedrich Merz.

L’eurodéputée Martine Kemp, opposée à la réglementation en 2023, estime aujourd’hui qu’un retour en arrière ferait plus de mal que de bien à l’industrie automobile.

De nombreux experts économiques plaident dans le même sens, en invoquant notamment les exemples de Nokia et de Kodak. Les deux géants ont manqué le virage de l’ère numérique – une erreur stratégique fatale.

Répéter ce scénario équivaudrait à un crash pour les constructeurs européens, déjà dépassés aujourd’hui par leurs concurrents chinois.

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