Le rapporteur du budget, Maurice Bauer (CSV), a choisi la lutte contre la pauvreté comme thème central de son discours. Mais l’économie doit suivre et le triple A doit être conservé.
La situation économique et géopolitique est morose. Le rapporteur du budget, Maurice Bauer (CSV), reste moyennement optimiste et choisit d’axer son discours sur l’aide aux plus défavorisés. Pas de triple S (comme social) sans triple A, ou autrement dit, pas de lutte contre la pauvreté sans croissance économique et des finances publiques saines.
Pour 2026, avec une amélioration des résultats du secteur financier, la croissance du PIB pourrait atteindre les 2%. Sur la période 2027-2029, le Statec anticipe une croissance moyenne de 2,4%, des prévisions revues à la baisse par rapport aux projections antérieures, qui prévoyaient 2,7% de croissance en moyenne sur 2025-2027.
Pour continuer sur les chiffres bruts, l’équilibre n’y est pas, comme le détaille le rapporteur. Les recettes sont estimées à 31,1 milliards d’euros, soit une hausse de 1,5 milliard d’euros (+4,9%), et les dépenses devraient passer de 30,8 milliards d’euros en 2025 à 32,6 milliards d’euros en 2026, soit une augmentation de 1,8 milliard d’euros (+5,7%). Le déficit de l’État central s’établit à 1,49 milliard d’euros.
Cela étant, le triple A est garanti par un endettement qui ne dépasse pas les 27% du PIB et qui permet d’assurer le triple S auquel Maurice Bauer consacre en grande partie son discours.
«Un budget n’est pas qu’une simple liste de dépenses et de recettes, c’est un instrument qui doit améliorer la vie dans notre pays», déclare Maurice Bauer, en s’attardant quelques instants sur le «PIBien-être» qui a été intégré pour la première fois à un budget pour analyser quelles dépenses publiques contribuent réellement et directement au bien-être de la population. Près de 15 % du budget, soit 4,9 milliards d’euros, contribuent directement à l’amélioration des conditions de vie.
«Les contributions les plus importantes sont consacrées à la lutte contre la pauvreté, à l’amélioration du pouvoir d’achat et à l’accès à un logement abordable», rappelle-t-il.
Maurice Bauer propose d’affiner et d’élargir les indicateurs du PIBien-être et d’envisager une «budgétisation verte» afin d’atteindre les objectifs environnementaux et climatiques. Il s’agit d’examiner les dépenses sous un angle écologique.
Pour l’heure, c’est la lutte contre la pauvreté qui occupe son discours. «Le budget 2026 prévoit 14,99 milliards d’euros, soit plus d’un demi-milliard de plus que cette année, malgré des dépenses militaires élevées. Cela représente encore 46% du budget total», souligne le rapporteur avant de lister toutes les mesures entreprises depuis 2023.
La plus importante, selon lui, reste le versement automatique, instauré cette année, de l’allocation vie chère et de la prime énergétique. Le Statec avait estimé qu’en 2022, 44% des personnes éligibles ne réclamaient pas l’allocation vie chère. Concernant la subvention au logement, près de 75% des personnes éligibles au Luxembourg pourraient en faire la demande, mais ne le font pas.
«L’automatisation permet de lutter efficacement contre le non-recours», insiste le rapporteur. Résultat? D’après les informations du Fonds national de solidarité, 12 203 ménages ont bénéficié du versement automatique de l’allocation vie chère et de la prime énergétique contre 9 248 ménages qui ont introduit une demande en 2024, soit une augmentation de 25 %, grâce à l’automatisation des paiements par le FNS.
Le rapporteur propose de poursuivre dans cette voie et d’étendre, autant que possible, ce versement automatique à l’aide au logement et, éventuellement, à d’autres formes d’assistance. «Les communes devraient également passer à l’automatisation pour les aides qu’elles proposent», suggère Maurice Bauer.
Juguler le risque des extrêmes
Il rappelle qu’un faible risque de pauvreté renforce la cohésion sociale, laquelle contribue à la paix sociale. «La paix sociale est un facteur d’attractivité et un atout majeur, au même titre que la fiscalité, l’efficacité de nos services publics au niveau des communes et de l’État, les infrastructures ou la qualité de la main-d’œuvre». Elle permet surtout d’éloigner, selon lui, toute tentation de bascule vers les partis extrémistes.
Maurice Bauer se félicite des mesures mises en place pour lutter contre la pauvreté. Selon le Statec, le risque de pauvreté a diminué de 18,8 % à 18,1 % en 2024 par rapport à 2023, ce qui n’est pas forcément réjouissant.
«Mais au moins, la tendance de la dernière décennie, marquée par une augmentation du taux de risque de pauvreté, semble s’être interrompue pour le moment».
Mais il reste inconcevable, pour le rapporteur, que dans l’un des pays les plus riches, près de 20 % des enfants «vivent dans des logements insalubres, avec des murs humides et des toits qui fuient».
Maurice Bauer ne pouvait pas faire l’impasse sur la crise du logement, un thème récurrent dans les rapports sur le budget. «Le budget 2026 est très ambitieux, avec des dépenses d’environ 2 milliards d’euros sur les quatre prochaines années», rappelle-t-il.
Il recommande la création d’un fond public pour encourager les projets immobiliers, des mesures supplémentaires pour inciter la construction de logements et l’introduction d’un concept de leasing immobilier par lequel les entreprises pourraient proposer le «leasing» d’appartements à leurs salariés.