La défense du gynécologue accusé de viols met ses menaces à exécution. À l’issue du témoignage sous serment du docteur A. à la barre, elle a décidé de porter plainte pour faux témoignage.
Cinquième jour du procès contre un gynécologue accusé de viols et d’attouchements sexuels contre des patientes. La menace de plainte pour faux témoignage plane toujours dans l’air. Une victime présumée et un ancien associé pourraient en faire l’objet de la part de la défense, qui avance la thèse d’un complot pour nuire au médecin.
C’est la première fois que de tels faits sont dénoncés au Luxembourg. «Notre client a une longue carrière derrière lui. Les accusations sont difficiles à encaisser parce qu’il a toujours eu bonne réputation», résume l’un des avocats du docteur G., Me Rollinger. «Trois ou quatre personnes ont dénoncé les faits, alors que d’anciens collaborateurs ont témoigné jusqu’à présent ne jamais avoir constaté d’acte déplacé de sa part et attesté qu’il consultait rarement seul.»
Plusieurs victimes présumées, des anciennes patientes, dénoncent notamment des «massages du clitoris». L’une d’entre elles s’est confiée à un médecin en voie de spécialisation aux urgences du CHL «en 2012 ou 2013». Une autre, vers 2015, qu’il a opérée d’urgence pour une grossesse extra-utérine, lui a évoqué «des attouchements et des propos déplacés» de la part du docteur G., a indiqué le médecin entretemps devenu spécialiste à la barre de la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg mardi matin.
Sa garde terminée, il a rapporté la question à ses supérieurs. «Cela a fait du bruit. Certains collègues n’étaient pas surpris», souligne-t-il. «Cette question sur la pertinence d’un massage du clitoris lors d’un examen gynécologique sortait tellement du quotidien que je m’en souviens encore.»
Une rumeur courait au CHL et court vraisemblablement toujours. Qui l’entretenait? Difficile à dire pour les témoins. Une chose paraît certaine : le docteur G. et le docteur A., son ancien associé, ne s’entendaient plus et se disputaient souvent. Après le départ du docteur G. en 2018 du CHL, le docteur A. aurait relayé les déboires de ses anciennes patientes, selon un chef de service de l’époque. De là à affirmer que le docteur A. a tout «orchestré», il n’y a qu’un pas.
Le docteur A. se dédouane
«Une ancienne patiente ne maîtrise pas la langue dans laquelle la plainte a été rédigée, une autre est illettrée et a pu être aidée», note l’avocat qui a constaté de troublantes similitudes entre les deux textes et des écrits de cet ancien associé en possession du docteur G. «À commencer par la ponctuation et l’utilisation systématique de doubles points et de points d’exclamation ainsi que des mots soulignés ou l’utilisation de certains adjectifs. De manière objective, il n’y a pas d’autre explication possible que celle de la rédaction des plaintes par l’ancien associé.»
Le docteur A., lui, jure que son rôle dans cette affaire s’est limité à conseiller à une des victimes présumées «de signaler les faits aux autorités compétentes». Il n’aurait pas rédigé les plaintes de deux anciennes patientes du docteur G., comme en est convaincue la défense. «Ce n’est pas dans mes compétences.»
Il assure ne pas connaître toutes les victimes présumées et reconnaît être en guerre ouverte avec son confrère depuis son passage dans son cabinet pendant trois mois en 2013. Il l’aurait quitté sous les menaces avec un deuxième associé et les deux gynécologues se sont accusés du pire. Notamment de mettre en danger la vie de leurs patientes respectives. Les deux hommes sont irréconciliables et la suite que souhaite donner la défense au procès ne les amènera pas sur le chemin de la réconciliation.
Une plainte pour faux témoignage a déjà été remise au parquet contre une des victimes présumées qui ne s’est plus souvenu de l’identité de l’auteur de sa lettre de plainte auprès du collège médical, alors qu’elle était illettrée. «Au parquet de décider de ce qu’il compte en faire. Il semble convaincu que notre client a commis les faits qui lui sont reprochés», explique Me Rollinger. «Si sa représentante veut agir de manière objective, elle devra reconnaître que les circonstances sont étranges. J’espère qu’elle déclenchera l’action publique.»
Une deuxième plainte sera déposée «le plus rapidement possible» à l’encontre du docteur A. «Nous ne nous limiterons peut-être pas qu’à ces deux plaintes», annonce d’ores et déjà l’avocat sans dévoiler ses cartes. Le dépôt de cette deuxième plainte pour faux témoignage sous serment aura peut-être des conséquences pour la suite du procès.
Le chef de service explique que le docteur G. n’aimait pas s’occuper des accouchements. «La ménopause et la PMA sont ses spécialités, pas l’obstétrique», nuance le médecin. «Certains collègues peuvent être jaloux de sa réussite professionnelle.»