Trois ex-employés injustement mis à la porte de l’université du Luxembourg ces dernières années ont obtenu gain de cause auprès de la justice.
Interrogée la semaine dernière après les accusations de harcèlement et d’abus de pouvoir au sein de l’université, la ministre de la Recherche et de l’Enseignement supérieur, Stéphanie Obertin, indiquait qu’entre 2020 et 2025, l’institution avait enregistré 163 départs volontaires et procédé au licenciement de 50 personnes, dont quatre ont porté l’affaire en justice.
Parmi elles, cette ex-employée de la faculté des sciences, des technologies et de médecine, mise brutalement à la porte en 2022, contre l’avis des professeurs avec qui elle travaillait, après s’être confiée à des collègues à propos du harcèlement qu’elle subissait de la part d’une supérieure.
Elle avait été déboutée en première instance. La Cour d’appel vient de lui donner raison, reconnaissant son licenciement comme abusif.
«David contre Goliath»
Une victoire en trompe-l’œil cependant, avec des indemnités très faibles à la clé : à peine 2 000 euros au titre du préjudice moral et 1 500 euros de participation aux frais de procédure.
«Peu importe, je ne m’étais pas engagée là-dedans pour l’argent», réagit-elle, gardant le sourire. «Ça n’a pas été facile, dans le genre David contre Goliath! Mais je suis contente de pouvoir clôturer ce chapitre de façon positive.»
Avant elle, c’est une autre secrétaire, sèchement licenciée deux semaines après avoir demandé une mutation en réaction à du harcèlement dans son service, qui avait fait condamner l’université. Là encore avec une maigre compensation financière : 4 000 euros en tout et pour tout.
Un assistant postdoctorant harcelé
Et fin octobre, le tribunal du travail rendait sa décision dans l’affaire opposant l’université du Luxembourg à un ancien assistant postdoctorant de la faculté de droit, d’économie et de finance, mis à la porte en 2024, à la suite de la résiliation anticipée de son contrat.
Face au juge, il raconte avoir d’abord constaté une série de graves dysfonctionnements dans le processus de réforme du Code civil luxembourgeois en cours auquel il était associé.
Ce qui l’aurait poussé à effectuer plus d’une dizaine de signalements en interne : à ses supérieurs hiérarchiques, au service des ressources humaines, au chef du département Droit ainsi qu’au recteur.
Une escalade jusqu’à la rupture
Des alertes directement suivies, selon lui, de «mesures de représailles» consistant notamment en la suppression de sa liberté de déplacement, en des actes d’intimidation, de coercition et de harcèlement et des traitements inéquitables et défavorables.
Dans le détail, il rapporte que le professeur qui le supervisait en tant que postdoctorant aurait exigé un dévouement constant, avec une cadence de travail abusive et des changements d’instructions déstabilisants.
Il aurait aussi demandé à figurer en copie de tous ses e-mails tout en lui interdisant d’exprimer ses opinions.
Il décrit au tribunal une escalade étalée sur plusieurs mois, jusqu’à la rupture de son contrat de travail, «parce qu’il se montrait résistant», estime cet enseignant-chercheur.
Si aucune indemnité ni participation aux frais de justice ne lui a été accordée, le tribunal du travail est allé dans son sens, en confirmant le caractère abusif de ce licenciement.
Trois décisions en faveur d’ex-employés. De quoi contredire les propos de la vice-rectrice, Simone Niclou, qui déclarait récemment face à la presse : «Sur 10 000 personnes, il y en a toujours trois ou quatre qui restent frustrées. Et c’est peut-être parce qu’elles étaient en tort.»
Une procédure toujours en cours
Une autre procédure est, quant à elle, toujours en cours : celle lancée par un groupe de professeurs de la faculté de droit, d’économie et de finance, là encore, pour des faits d’abus de pouvoir et de harcèlement, cette fois dans le cadre de procédures de promotion.