Secouées par des crises successives, les entreprises luxembourgeoises alertent sur un climat d’incertitude qui fragilise leur confiance envers le gouvernement.

La Chambre de commerce a dressé ce mardi le bilan de l’année 2025. L’occasion de mesurer l’impact d’une série ininterrompue de crises sur l’économie. Dans son Baromètre de l’économie, une enquête menée auprès de 757 entreprises d’au moins 6 salariés nommée, le deuxième semestre de 2025 confirme ce climat : l’indice global atteint 51,8 sur 100, alors qu’il était de 63,3 en 2019. La confiance envers l’économie luxembourgeoise chute à 67 points, soit 10 points de moins qu’en 2019, tandis que la confiance envers l’économie mondiale recule, elle, de 20 points.

Ce recul marqué de la confiance conduit 82 % des entreprises interrogées à consacrer une partie de leur rentabilité à absorber l’incertitude géopolitique et économique. Dans un pays dont l’économie demeure fortement exportatrice, les tensions internationales se «répercutent sur le prix du client final, ce qui réduit les marges», résument les experts de la Chambre.

Depuis 2020, les entreprises évoluent dans un environnement instable marqué par la pandémie, des perturbations logistiques, la crise énergétique puis inflationniste, l’invasion de l’Ukraine et désormais des tensions commerciales exacerbées, notamment après le renforcement des droits de douane américains en 2025. «Pour une économie aussi ouverte et dépendante de ses partenaires commerciaux que le Luxembourg, cette situation génère des risques immédiats et persistants», souligne Christel Chatelain, la directrice des Affaires économiques.

Avoir «un gouvernement qui tienne le cap»

Carlo Thelen, le directeur général de la Chambre de commerce, dresse un état des lieux sans détour : «Tout n’est pas noir, mais il y a un ras-le-bol général». Il pointe à ce sujet que depuis le covid, les coûts de production sont en forte augmentation, alimentés par l’indexation automatique des salaires, la hausse des cotisations et la réforme des pensions.

«On a ouvert la boîte de Pandore : le système doit être sauvé à long terme, pas seulement prolongé de deux ou trois ans. Plus on attend, plus ça fera mal.» La Chambre de commerce dit avoir proposé des mesures «impopulaires mais nécessaires» pour éviter une crise au Luxembourg.

Le directeur général revient sur le recul de la confiance observé. «Les patrons n’ont plus confiance dans le gouvernement, mais uniquement en eux-mêmes.» L’absence de simplification administrative, les délais trop longs pour obtenir des terrains ou autorisations, ou encore l’absentéisme croissant compliquent encore la donne.

Carlo Thelen témoigne au nom des membres de la Chambre que «personne, même les décideurs, ne semble pouvoir expliquer ces complications.» Dans l’Horeca, certains établissements renoncent même à ouvrir en semaine faute de personnel. À cela s’ajoute la diminution de l’attraction des talents : depuis 2024, le nombre annuel de travailleurs frontaliers belges et allemands continue d’être en baisse, une première depuis une quinzaine d’année.

Si Carlo Thelen salue certaines orientations telles que le plan d’action contre la pauvreté ou l’intégration progressive de l’IA, il demande, au nom des entrepreneurs, «un gouvernement qui tienne le cap» et «prenne des décisions rapides et ambitieuses».

La Chambre plaide pour un cadre réglementaire plus prévisible, une maîtrise des coûts salariaux, une trajectoire budgétaire soutenable et des marges de rentabilité permettant aux entreprises d’investir et d’innover. Le volet santé, dont les coûts exploseront en 2026, est perçu comme «un des gros dossiers de 2026», qui «coûtera cher à tous» appréhende le directeur général pour l’agenda prochain.

En conclusion, il regrette que «ces complications empêchent de s’occuper du côté business, ce qui devrait être la priorité.»