Accueil | A la Une | Plan d’action national contre le racisme : des mesures timides

Plan d’action national contre le racisme : des mesures timides


Max Hahn : «Au nom du gouvernement, nous nous engageons pour une société égalitaire où chacun a sa place.» (Photo : hervé montaigu)

Présenté ce lundi, le premier plan d’action national contre le racisme se concentre surtout sur la sensibilisation et la formation, là où les associations attendaient des mesures fortes.

Il aura fallu trois ans, une cinquantaine de rencontres impliquant une douzaine de ministères, six événements et une concertation avec des associations, des personnes racisées et des institutions de défense des droits humains, pour que les autorités accouchent enfin d’un plan d’action national contre le racisme et les discriminations raciales.

Une feuille de route inédite très attendue, pourtant critiquée dès octobre par le CLAE, l’un des contributeurs. En cause, selon le Comité de liaison des associations d’étrangers, des mesures finales jugées «insuffisantes pour transformer en profondeur notre rapport à l’autre, notre vision du monde et de l’humanité».

Le plan se contenterait de répondre aux obligations découlant de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, sans s’attaquer véritablement aux difficultés vécues sur le terrain.

Travail, éducation et logement

Rappelons que celles-ci sont réelles, largement répandues au Luxembourg, et désormais mieux documentées, grâce aux études menées par le Cefis et le Liser. Elles établissent que les trois domaines dans lesquels le racisme s’exprime le plus fortement sont l’éducation, le logement et l’emploi.

D’où la présence hier des ministres Claude Meisch (Logement, Éducation) et Georges Mischo (Travail) aux côtés de Max Hahn (Famille, Solidarités, Vivre-ensemble, Accueil) pour dérouler leur plan face à la presse.

23 objectifs et 118 actions, avec «l’ambition d’aborder la lutte contre le racisme de manière transversale et coordonnée» : voilà ce que contient le document de 60 pages, agrémenté d’indicateurs de progression et de délais pour concrétiser chaque mesure.

«Le racisme n’a pas sa place au Luxembourg, où chacun doit pouvoir s’épanouir indépendamment de ses origines», a rappelé Max Hahn, au nom de l’ensemble du gouvernement.

Un point de contact unique pour les victimes

En plus d’efforts menés tous azimuts en matière de sensibilisation, voici les éléments qui ont retenu notre attention.

D’abord, il est prévu de collecter des données ventilées par origine raciale dans le système de statistiques publiques, et d’inclure la thématique du racisme dans certaines enquêtes.

Ensuite, un point de contact unique offrant orientation, espace d’échange et conseils juridiques aux victimes est aussi annoncé.

Du côté du logement, l’adaptation du Code de déontologie des professionnels de l’immobilier est programmée, tout comme la formation des bailleurs sociaux et des élèves du BTS Professions immobilières. Un label «Je m’engage contre le racisme» avec des critères stricts à respecter, verra le jour pour les agences et syndics.

Les programmes scolaires adaptés

Dans l’emploi, une formation «Racisme, comprendre et agir» sera construite et proposée aux agents de l’Adem, ainsi qu’aux agents communaux, aux personnels des ressources humaines et aux intervenants dans l’éducation non formelle et l’aide à l’enfance, entre autres. Là encore, un label spécifique, destiné cette fois aux entreprises privées, sera introduit.

En matière d’éducation, le plan prévoit l’adaptation des thèmes de l’esclavage et du colonialisme dans les programmes scolaires, une «stopline» dès 2026 pour signaler facilement tout cas de discrimination, et une procédure claire, visible, et accessible, destinée à la prise en charge de faits liés au racisme ou aux discriminations dans les établissements.

Enfin, pour assurer le suivi de l’implémentation des mesures, un groupe de pilotage interministériel sera secondé par un groupe intégrant des représentants d’organisations de la société civile.

Chronologie

2019 – Le rapport européen «Être noir dans l’UE» agit comme un électrochoc : il place le Luxembourg en tête des États membres où les afro-descendants déclarent subir le plus de discriminations.

2020 – Dans le sillage du mouvement Black Lives Matter venu des États-Unis, des voix s’élèvent aussi Grand-Duché, et les députés poussent le gouvernement à lancer une enquête nationale sur le racisme.

2022 – La parole se libère, le racisme est davantage thématisé dans l’espace public. L’exposition «Le passé colonial du Luxembourg» au National musée, appuie là où ça fait mal. Le Cefis publie le premier volet de son étude sur le racisme (Constats et recommandations).

2023 – Le Cefis publie le deuxième volet de son étude sur le racisme (A l’écoute des victimes). Suite aux élections, l’accord de coalition promet un plan d’action national contre le racisme et la discrimination raciale pour 2024. Des travaux sont lancés.

2024 – L’élaboration du plan d’action national se poursuit avec la collaboration de plusieurs associations dont l’ASTI, le CLAE, Lëtz Rise Up et One People asbl.

2025 – Le CLAE publie un communiqué très critique sur le plan à venir, pointant «une réponse partielle à un défi global». Le plan est présenté en commission aux députés et à la presse.

Newsletter du Quotidien

Inscrivez-vous à notre newsletter et recevez tous les jours notre sélection de l'actualité.

En cliquant sur "Je m'inscris" vous acceptez de recevoir les newsletters du Quotidien ainsi que les conditions d'utilisation et la politique de protection des données personnelles conformément au RGPD .