La Chambre des salariés (CSL) livre un avis contrasté sur l’ajustement prévu de l’assurance pension. Très critique sur l’essentiel du projet, elle salue la hausse du taux de cotisation.
L’incapacité du gouvernement à trouver un accord avec les partenaires sociaux forme la base des critiques émises à tour de rôle par le patronat et le camp salarial. Mais tout n’est pas mauvais, comme l’illustre l’avis de la CSL publié vendredi.
Plus précisément, trois mesures sont expressément saluées. La hausse du taux de cotisation global, de 24 à 25,5 % (lire également ci-contre), fait partie des points de satisfaction. L’Union des syndicats OGBL-LCGB avait d’ailleurs revendiqué une telle augmentation lors des rondes sociales, avec succès. La CSL avance dans son avis que la hausse envisagée permet de «repousser de trois à quatre ans» les dates critiques du système.
Les adaptations du système, qui doivent entrer en vigueur au 1er janvier, prévoient que le déséquilibre entre recettes et dépenses reculerait de 2026 à 2029. La réserve passerait sous le seuil légal d’une fois et demie les dépenses annuelles en 2042, et non pas en 2038. L’épuisement des réserves deviendrait réalité en 2048, contre 2044 sans ajustement du système.
700 millions d’euros supplémentaires
Malgré l’«apport indéniable» de la hausse des cotisations, la CSL réclame, à moyen et long terme, des mesures alternatives de financement. Une proposition demeure le déplafonnement de l’assiette cotisable, limitée à cinq fois le salaire social minimum (SSM). Le régime de pension serait ainsi doté d’environ 700 millions d’euros supplémentaires, «tout en ne concernant qu’une minorité – environ 5 % – des assurés aux revenus les plus élevés».
Aux yeux de la CSL, il «semble logique et évident de recourir, au-delà au financement supplémentaire, à la réserve» du fonds de compensation «pour faire face à une augmentation des dépenses de pensions». Actuellement, la CNAP verse des pensions à hauteur de 30 milliards d’euros, soit plus que les 32,6 milliards d’euros de dépenses inscrits au budget de l’État pour 2026. La CSL dit ne pas être opposée à une hausse supplémentaire du taux de cotisation global.
Les deux autres bonnes notes attribuées au ministre des Finances, Gilles Roth, sont le maintien de l’allocation de fin d’année et la flexibilisation pour la reconnaissance des périodes d’études.
Carton rouge pour l’allongement de carrière
Par contre, la CSL «réfute fermement l’obligation» de prolonger sa carrière pour pouvoir partir à la retraite avant 65 ans. Le projet de la ministre Martine Deprez prévoit un allongement progressif de la durée de cotisation de huit mois à l’horizon 2030. La CSL considère cette hausse comme «un précédent dangereux qui risque de marquer le début d’une détérioration importante de notre système de pension». De plus, elle serait «inefficace pour assurer la pérennité du régime général».
L’introduction d’une «prétendue» pension progressive ne serait pas non plus une «réponse adéquate». «Il ne s’agit pas d’un droit effectif, mais d’un dispositif lourd, dépendant du bon vouloir de l’employeur et susceptible d’être fortement sous-utilisé», estime la CSL. Elle fustige également le manque d’amélioration de la pension minimum. Une hausse de 10 % constituerait un coût supplémentaire limité à 0,4 %. Comment expliquer dès lors la «véhémence avec laquelle le gouvernement actuel s’oppose à toute revalorisation de cette pension?», s’interroge la CSL.
Dernier point de critique : l’augmentation du plafond de déductibilité en matière de prévoyance vieillesse, une option «très inégalitaire» qui bénéficierait «principalement aux hauts revenus». «Ces dispositions, coûteuses pour la collectivité», ne contribueraient «en rien à la viabilité du système» et «détournent des moyens qui pourraient utilement renforcer la solidarité» au sein du régime général».
Un demi-milliard d’euros de plus grâce aux cotisations
Avec la hausse du taux de cotisation de 24 à 25,5 %, soit 0,5 point de plus pour l’État, les salariés et les patrons, la Caisse nationale d’assurance pension (CNAP) bénéficierait, d’une année à l’autre, d’une augmentation de ses recettes d’environ 500 millions d’euros (0,6 % du PIB).
La CSL rappelle au camp patronal, réticent face à cette mesure, que les cotisations sociales à la charge des entreprises (15 %) demeurent parmi les plus faibles de l’UE. «Même après la réforme, seuls cinq pays afficheraient un taux de cotisation (…) inférieur à celui en vigueur au Luxembourg», à savoir la Roumanie, la Lituanie, Malte, le Danemark et l’Irlande.