Le tribunal se trompe de coupable, jure Me El Handouz, qui a fait sien le proverbe selon lequel les absents ont toujours tort. Saïd n’est pas un assassin, contrairement à son neveu.
Meurtre de Diana : Said, une main forte, pas un bras armé
«J’ai coupé la main gauche et la jambe droite», avoue Saïd, interrogé une dernière fois par le président de la chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Diekirch, vendredi matin.
Les experts légistes ont constaté deux manières différentes de démembrer Diana avant de disperser les morceaux dans toute la Grande Région en septembre 2022. Saïd et son neveu, qui a fui au Maroc, s’accusent mutuellement du crime. Saïd prétend avoir seulement aidé le jeune homme à découper le corps.
Durant les trois ans de l’instruction, Saïd a tenté de mettre les enquêteurs sur de fausses pistes, déclare le procureur en préambule de son réquisitoire. L’enquête, «un travail de fourmi», a permis de dégager un mode opératoire et un mobile «très sérieux».
«Il s’était investi dans sa relation avec Diana et n’a pas supporté qu’elle ait un nouvel amoureux», avance le procureur, convaincu que le prévenu a égorgé la quadragénaire dans son lit. Lit qui a disparu après les faits «sans doute pour cacher des traces de son ADN».
Saïd accuse son neveu Gibran du meurtre. Diana et ce dernier avaient contracté un mariage blanc contre de l’argent. Gibran a dénoncé le meurtre à la police depuis le Maroc une semaine après la découverte du tronc à Mont-Saint-Martin. Les images de vidéosurveillance filmées depuis la maison voisine du lieu du crime à Diekirch ont permis aux enquêteurs de reconstituer les faits.
Jaloux, Saïd n’aurait pas supporté que la jeune femme retrouve son nouvel amoureux dans l’après-midi. «Cela a déclenché en lui une colère froide», estime le magistrat. Les images montrent tous les allers-retours des deux prévenus au domicile de la victime. Les parties du corps ont été déposées dans des endroits proches des domiciles de deux des frères de Saïd. Seuls les bras n’ont pas été retrouvés.
«Se pose la question des tatouages», note le procureur. «L’un d’entre eux, sur une des mains, aurait pu mettre la police plus rapidement sur sa piste. Il est désormais clair qu’il était à la manœuvre et qu’il a tué Diana.» Tout accuse Saïd dans ce dossier.
Le procureur demande à la chambre criminelle de retenir l’assassinat à l’encontre du prévenu ainsi que l’atteinte à l’intégrité d’un cadavre. Il requiert la réclusion criminelle à vie «pour ce crime crapuleux» avant de souligner le «mépris» du prévenu à l’égard de la victime et de son neveu.
«Une grossière erreur»
«Je pense, je crois, j’ai l’intime conviction que vous n’avez pas le bon coupable devant vous», lance l’avocate de Saïd, persuadée qu’il est «le coupable idéal» «d’une enquête à charge».
«S’il a une part de responsabilité, il n’est pas l’auteur de l’assassinat. Je crains que mon client soit sacrifié pour satisfaire l’opinion publique alors que son coaccusé a fui au Maroc.» Le pays d’où sont originaires les deux hommes n’extrade pas ses ressortissants. Les mandats d’arrêts émis contre eux restent donc lettre morte.
Le parquet confondrait incertitudes et certitudes. Me El Handouz assure que son client était amoureux d’une certaine Susanna. On plonge en pleine telenovela berbère entre mariage blanc, ruptures et nouvelles amours. Désargenté, Gibran devait de l’argent à Diana en échange du mariage. Un possible mobile pour l’éliminer.
Beaucoup de zones d’ombre et d’incertitudes émailleraient ce dossier. Pour l’avocate, cela ne fait aucun doute : Gibran est l’auteur du crime. «Quelqu’un d’innocent n’aurait pas fui du jour au lendemain sans prendre ses affaires», constate l’avocate. De plus, les images de vidéosurveillance ne montrent pas ce qui s’est passé à l’intérieur de la maison, ajoute l’avocate.
Son client aurait en revanche eu un geste altruiste et paternel envers son neveu qui venait de commettre un crime. «Une grossière erreur qu’il va se reprocher toute sa vie» pour aider un jeune homme qu’elle prétend avoir été dépeint «de manière inquiétante» par ses proches en «psychopathe», que «toute sa famille pense coupable», contrairement à Saïd, «incapable de tuer Diana».
«D’où cela sort-il?», demande le procureur, qui n’apprécie pas les accusations de l’avocate à propos du travail de la justice et de la police. «Je ne fais le procès de personne», réplique Me El Handouz, qui a déconstruit toute l’instruction pour conclure que son client n’est coupable que d’atteinte à l’intégrité du cadavre.
Le prononcé est fixé au 5 février 2026.