Malgré le succès fulgurant du géant de la mode éphémère, dont la première boutique physique permanente à Paris a attiré 50 000 visiteurs en cinq jours, l’Europe et le Grand-Duché s’organisent pour contrer la surconsommation textile.
Début novembre, le géant de la fast-fashion chinois ouvrait son premier magasin physique et permanent à Paris au sein de la très célèbre enseigne BHV Marais. Une ouverture qui a suscité critiques et controverses. Pourtant, le succès commercial a été au rendez-vous. En cinq jours, la boutique Shein a accueilli, selon les médias français, plus de «50 000 visiteurs». Le Luxembourg, où la plateforme est disponible depuis plusieurs années, pourrait-il franchir le pas?
Pour Bob Schmitz, conseiller aux affaires européennes pour l’Union luxembourgeoise des consommateurs (ULC), le risque reste très faible. «Le Grand-Duché est un marché beaucoup trop petit. Il y aurait peu d’intérêts à ce que Shein s’y implante. Je n’y crois pas et ça serait une très mauvaise idée. Forcément, il y aurait un impact très négatif pour le commerce local», explique le spécialiste avant de poursuivre : «Pour autant, cela n’empêche pas les Luxembourgeois de consommer en ligne. Même si nous n’avons pas de chiffres sur la consommation de la fast-fashion dans le pays, ils sont parmi les consommateurs européens les plus habitués et les plus nombreux à acheter sur le Net».
«Je regrette la lenteur des procédures»
Mais, alors, comment lutter contre ce géant de la fast-fashion? Dans cette bataille qui se joue parmi les membres de l’Union européenne, le Luxembourg pourrait, selon Bob Schmitz, se positionner en tant pionnier. En effet, le Benelux et la France pourraient s’associer pour appliquer une taxe de quelques euros sur les colis venus de Chine.
Et ce, même si l’Europe faisait marche arrière. «C’est une très bonne chose. Le Luxembourg peut s’inspirer de la législation française qui reste très innovante et qui pourrait donner lieu à une harmonisation au niveau européen (…). En revanche, ce que je regrette et dénonce, c’est la lenteur des procédures.»
Bob Schmitz cite l’exemple d’une plainte déposée en juin dernier par l’ULC et 24 autres organisations européennes sur l’utilisation des pratiques trompeuses («dark patterns») par Shein. «Cette plainte fait partie des autres enquêtes de la Commission européenne. La procédure est en cours.»
Un combat difficile contre ce géant de la fast-fashion dont l’image ne s’est pas ternie à la suite des nombreuses polémiques de ces dernières semaines, notamment sur la vente de poupées sexuelles. «Il y a également le scandale des armes, des produits non conformes et dangereux. Les consommateurs réagissent, mais passent vite à autre chose. Malheureusement, je ne pense pas que cela a un effet durable sur leur consommation», regrette Bob Schmitz.
La France, pionnière dans la lutte contre la fast-fashion?
Depuis plusieurs mois, nos voisins français ont engagé un processus législatif important concernant la mode éphémère. Il s’agit d’une proposition de loi visant à réduire l’impact environnemental de l’industrie textile. Adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale en mars 2024, elle a été modifiée par le Sénat en juin 2025.
Parmi les propositions, les plateformes dont les pratiques relèvent de la mode ultra-express devront afficher sur leur site des messages de sensibilisation encourageant par exemple la sobriété, le réemploi, la réparation, la réutilisation et le recyclage.
L’origine géographique des produits textiles devra être affichée afin d’améliorer la traçabilité des produits. Cette proposition de loi pourrait interdire également la publicité relative à des produits ou des marques de mode par des personnes exerçant une activité d’influence commerciale.
Enfin, une taxe sur les petits colis hors UE est prévue. Celle-ci sera comprise entre 2 et 4 euros. Cette proposition est bloquée par l’Europe jusqu’au 30 décembre 2025.