Pas de coup de pied dans la fourmilière prévu après les nombreux témoignages de climat toxique et d’abus de pouvoir à l’Université : seuls un bilan et un groupe de travail sont annoncés.
Après plusieurs articles de presse parus depuis la rentrée dénonçant du «harcèlement», des «abus de pouvoir» et un «climat d’impunité» au sein de l’Université du Luxembourg, la prise de parole du recteur Jens Kreisel était très attendue.
Mais ce jeudi, au 17ᵉ étage de la Maison du savoir sur le campus de Belval, celui qui pilote l’institution depuis près de trois ans a plutôt minimisé l’ampleur du malaise.
«Ces situations ne reflètent ni notre Université ni nos valeurs qui sont le respect, la transparence et l’attention authentique que nous portons à notre communauté», a-t-il d’abord déclaré face à la dizaine de journalistes présents.
Avant de pointer qu’avec 7 500 étudiants et 2 500 employés «qui apprennent et enseignent ensemble, toujours avec bienveillance», il n’est pas surprenant que surviennent «des désaccords et tensions».
«Renforcer nos processus là où c’est nécessaire»
Dans un français parfait, le recteur a rappelé que l’Université dispose d’une série de structures et procédures internes — qualifiées par certains de «paravent» — destinées au traitement des conflits. «On veut aujourd’hui réaffirmer notre engagement, en étant à l’écoute, en comprenant et en mettant en place les mesures nécessaires pour renforcer nos processus là où c’est nécessaire», a-t-il assuré.

(Photo : alain rischard)
Une réaction qui fait suite à une demande directe de la ministre de la Recherche et de l’Enseignement supérieur, relayée mercredi par Le Quotidien. Jens Kreisel a dit y voir «l’occasion de faire un bilan et de s’améliorer».
Des personnes «frustrées»
Il a ensuite émis une série d’hypothèses, censées expliquer en partie les accusations portées par des membres de la communauté universitaire. Pour les étudiants, ce serait ainsi «le coût de la vie» et la difficulté que peut représenter l’apprentissage de la vie en autonomie.
Les doctorants auraient du mal avec «le chemin individuel et exigeant» de la recherche. Quant aux jeunes professeurs, «l’environnement très compétitif» et les refus de promotion seraient «vraiment difficile à vivre».
Une vision partagée par la Vice-rectrice, Simone Niclou : «Nous passons beaucoup de temps avec les gens en situation conflictuelle, on trouve des solutions, et ça, personne ne le voit. (…) Sur 10 000 personnes, il y en a toujours trois ou quatre qui restent frustrées. Et c’est peut-être parce qu’elles étaient en tort», a-t-elle ajouté sans ciller.
Pas de chiffres disponibles
Les différents moyens de signaler un abus en interne ont été détaillés. Des options «informelles et confidentielles» pour commencer, à travers le Bureau du médiateur et ses trois Ombudsman indépendants, ou la délégation du personnel «quand cela ne suffit pas».
Et la voie officielle, avec dépôt de plainte formelle au service RH, ou encore la plateforme de dénonciation réservée aux cas graves.

(Photo : didier sylvestre)
Interrogé sur le nombre de contacts et de litiges enregistrés chaque année par le Bureau du médiateur, Jens Kreisel a invoqué la confidentialité de ces données, «réservées au Conseil de gouvernance».
Il a cependant fait état d’une légère augmentation des signalements et plaintes, qui s’expliquerait par une campagne de sensibilisation récente, tandis que le service RH recevrait quatre à cinq plaintes par an.
«On fera un rapport avec des propositions»
Le recteur a conclu en faisant valoir les bons résultats obtenus lors d’enquêtes internes, et sur une longue liste d’indicateurs, «tous au vert», regroupés dans un «bilan social».
Si ce document est «strictement réservé à l’usage interne», Claire Audollent, responsable RH de l’Université, a tout de même révélé les trois domaines les moins bien notés : «santé et bien-être, procédures, et communication».
Enfin, c’est lors des questions-réponses avec la presse que la création d’un «groupe de travail avec les étudiants et le personnel» a été annoncée par Jens Kreisel pour ces prochaines semaines. «C’est le moment de faire un bilan. Avec ce groupe de travail, on fera un rapport avec des propositions.»