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«Le diabète peut être un tabou dans le milieu professionnel»


Les hôpitaux Robert-Schuman organisent, aujourd’hui, une journée de prévention au diabète. (Photo : archives lq/julien garroy)

Jessica Durbach, chargée de direction de la Maison du diabète, met en lumière les difficultés rencontrées par les personnes atteintes par cette maladie dans le milieu professionnel.

À l’occasion de la Journée mondiale du diabète, les associations et les centres hospitaliers du pays se mobilisent, aujourd’hui, pour parler prévention et sensibilisation.

Cette année, les acteurs du secteur ont décidé de choisir la thématique du diabète au travail. Un sujet complexe qui soulève de nombreuses questions. Jessica Durbach, chargée de direction à la Maison du diabète du Luxembourg, nous en dit plus.

Quels sont les problèmes auxquels sont confrontées les personnes ayant un diabète dans le milieu professionnel ?

Jessica Durbach : Cela dépend du travail et des individus. Au sein de notre association, certaines personnes atteintes par cette maladie nous disent qu’elles n’ont aucun souci. Pour d’autres, c’est tout à fait l’inverse.

Je dirais que le principal problème est la stigmatisation de la visibilité. Dans le milieu professionnel, certaines personnes ne vont pas comprendre les raisons pour lesquelles le malade a besoin de s’isoler pour s’administrer de l’insuline ou pourquoi il doit faire des pauses pour reprendre du sucre s’il a un niveau de glycémie insuffisant.

L’autre problématique est qu’il n’existe pas vraiment de statut pour les maladies chroniques, alors qu’il y en a un pour le handicap. Là aussi, c’est un peu le problème. Car on veut éviter que le diabète soit vu comme un handicap.

Parler ouvertement de cette maladie dans le milieu professionnel peut être parfois difficile.

Oui, cela peut être un tabou, mais je conseille aux personnes diabétiques de le dire à un interlocuteur de confiance. L’adaptation dans le milieu professionnel dépend aussi du type de diabète.

Certaines personnes ne sont presque jamais en hypoglycémie et ont des valeurs très stables (…). Pour d’autres, les adaptions doivent être plus importantes (…). De manière générale, il faudrait que le droit du travail prenne plus en compte cette question-là au Luxembourg. Mais aussi et surtout en Europe, car c’est là que tout se joue.

Comment concilier au mieux le diabète et le travail ?

Le plus important est d’écouter son corps. Le bien-être est un facteur important dans la gestion de cette maladie. Il faut être vigilant à ce qui touche au mental. Par exemple, éviter de se mettre dans une situation de stress, car cela aura un impact sur la glycémie (…).

Il faut souligner que le diabète ne touche pas uniquement la vie professionnelle. C’est une atteinte importante dans la vie personnelle du patient. C’est une maladie chronique présente 24 h sur 24 et 7 jours sur 7. Il y a aussi des effets sur la santé mentale. Souvent, les personnes atteintes de diabète ont plus de risques de développer une dépression.

De plus en plus de personnes sont-elles touchées par cette maladie ?

Si on regarde les chiffres actuels, on voit que la prévalence augmente partout dans le monde. Au Luxembourg, de plus en plus de personnes vivent avec un diabète de types 1 et 2. Selon les chiffres de l’International Diabetes Federation, en 2024, 33 000 personnes étaient atteintes par le diabète dans le pays.

Des chiffres conséquents et pourtant beaucoup de Luxembourgeois vivent avec un diabète sans le savoir.

Sur les 33 000 personnes diagnostiquées, il y a environ un quart qui vit avec un diabète sans le savoir. On parle souvent du diabète de type 2. On le remarque quand il y a déjà des complications.

Les symptômes peuvent, en effet, se développer sur plusieurs années. Ils peuvent être très légers. Cela peut être des maux de tête, la vision qui devient floue, la peau qui ne cicatrise pas très bien, les soifs intenses ou l’envie plus fréquente d’uriner.

C’est une idée reçue de dire que l’on est victime de cette maladie en mangeant trop de sucre ?

Oui, complètement. Il y a énormément de facteurs qui peuvent causer un diabète. Par exemple : le manque d’activité physique, une alimentation déséquilibrée ou les antécédents génétiques (…). Si on dit que c’est uniquement lié au sucre, c’est une stigmatisation. Au sein de notre association, nous avons beaucoup de personnes atteintes par un diabète de type 2 et qui ont une très bonne hygiène de vie.

Le Luxembourg Institute of Health (LIH) mène un projet sur l’utilisation de la voix pour détecter le diabète.

Nous travaillons avec eux sur ce projet pour améliorer les problèmes qui entourent le dépistage. C’est une nouvelle méthode qui s’appuie sur un symptôme bien particulier du diabète de type 2 : le changement subtil de la voix.

Par des marqueurs spécifiques, il est possible de déterminer le risque qu’une personne développe un diabète (…). Je pense que cela pourrait permettre, à terme, de réduire le nombre de personnes non diagnostiquées.

Vous évoquez l’importance d’une pratique physique dans la lutte contre le diabète. Le sport sur ordonnance serait-il une idée à développer ?

L’activité physique est importante dans la prévention du diabète et dans son traitement. Avec l’alimentation, c’est même le premier pilier de la thérapie du diabète (…).

Je pense que le projet pilote des ministères de la Santé et des Sports pour une prescription d’une activité sportive est une très bonne chose. Cela va être testé sur trois maladies. Le diabète en fait partie.

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