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Les mormons, une place à part dans la culture


De la série Big Love jusqu’à la téléréalité The Secret Lives of Mormon Wives, ce mouvement religieux inspiré du christianisme et typiquement américain veut dépoussiérer son image, notamment en mettant les femmes au premier plan.

La principale Église mormone, dite de Jésus-Christ des saints des derniers jours, compte sept millions de membres aux États-Unis, soit environ 2 % des habitants. Les groupes fondamentalistes mormons, qui pratiquent la polygamie, réunissent moins de 100 000 personnes.

Pourtant, les mormons occupent une place «unique dans l’imaginaire américain», constate Brenda Weber, professeure à l’université de l’Indiana et autrice d’un livre sur le mormonisme dans les médias et la culture.

Succès récent de la téléréalité américaine, The Secret Lives of Mormon Wives, dont la saison 3 a débuté hier sur Hulu (Disney+ à l’international), illustre la fascination des Américains pour ce mouvement religieux inspiré du christianisme, minoritaire aux États-Unis.

La naissance de cette religion, en 1830 dans l’État de New York, coïncide historiquement et géographiquement avec l’essor de la presse écrite qui lui servira de tremplin, analyse Brenda Weber.

Le mormonisme, et particulièrement sa pratique de la polygamie, a aussi inspiré la première aventure de Sherlock Holmes (Une étude en rouge, 1887) et l’un des grands succès du cinéma muet dans le monde anglophone (Trapped by the Mormons, 1922).

L’Église mormone, qui valorise la pratique du chant et de la danse, a vu grandir de nombreux artistes, à l’instar du chanteur révélé dans les années 1970 Donny Osmond ou, plus récemment, de l’acteur Ryan Gosling.

Les Jeux olympiques de 2002 à Salt Lake City, bastion de l’Église mormone, marquent le début de ce qui sera qualifié de «moment mormon». Les ambitions présidentielles du républicain mormon Mitt Romney en 2008 et 2012 cohabitent avec des programmes télévisés consacrés à des familles polygames de l’Utah (la série Big Love, diffusée entre 2006 et 2011, la téléréalité Sister Wives depuis 2010). À Broadway, la comédie musicale satirique The Book of Mormon, des turbulents créateurs de South Park, Trey Parker et Matt Stone, est un succès depuis 2011.

À la même période, des mères de famille investissent les réseaux sociaux naissants. Parmi elles, de nombreuses mormones. Plus souvent mères au foyer, plus éduquées et plus riches que la plupart des Américaines, les contenus qu’elles créent ont un «potentiel puissant», remarque Matthew Bowman, spécialiste des religions américaines à l’université de Claremont. Dans une religion axée sur le prosélytisme, «les femmes ont un rôle d’écriture de récits de vie (…) Elles produisent des supports destinés à attirer les gens», ajoute Brenda Weber.

Découvertes sur TikTok, les héroïnes de The Secret Lives of Mormon Wives en sont les héritières. Mais c’est la révélation par l’une d’elles de pratiques échangistes qui sert de base à l’émission, dont la première saison en 2024 a fait mieux que l’autre téléréalité phare de Hulu, The Kardashians.

Femmes d’affaires, divorcées ou mères hors mariage, buvant de l’alcool ou consommant des drogues… Taylor Frankie Paul, Mayci Neeley, Jen Affleck et les autres – invitées récemment dans des programmes télévisés de premier plan comme Dance with the Stars ou The Bachelorette – clament vouloir dépoussiérer l’image des mormons.

Il est souvent question de leur position dans une culture où les hommes sont chefs et soutiens de famille. Non sans contradictions, pointe Brenda Weber, les «épouses mormones» revendiquent de mieux gagner leur vie que leurs maris mais se présentent aussi comme des «tradwives» (épouses traditionnelles).

L’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours n’a pas partagé sa position sur le programme. Un communiqué publié peu avant la saison 1 déplore des représentations médiatiques récentes «reposant souvent sur le sensationnalisme et des inexactitudes qui ne reflètent pas fidèlement et pleinement la vie des membres de notre Église ou (leurs) croyances».

«Depuis la sortie de The Book of Mormon, l’Église doit s’interroger sur comment gérer une publicité qui, à première vue, ne semble pas très favorable en raison de (…) cette longue histoire de représentations sordides ou scandaleuses», commente Matthew Bowman.

Elle a réagi à la comédie musicale avec ses propres publicités invitant avec humour à lire son texte fondateur. Mais, «dans bon nombre de ses déclarations publiques, l’Église peut se montrer plutôt défensive ou simplement essayer d’ignorer ce genre de choses», retrace le professeur.

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