Après une soixantaine d’amendements, le projet de loi relatif au recours collectif a pu être voté jeudi. Le Luxembourg était à la traîne, et le texte est une transposition stricte de la directive.
Après un parcours des plus chaotiques, le recours collectif a enfin été voté jeudi, à l’unanimité, après avoir passé cinq ans dans les tuyaux. «J’ai lu un historique de quatre pages et 27 avis», observe la ministre de la Protection des consommateurs, Martine Hansen (CSV). Rien que l’Union des consommateurs (ULC) a rendu sept avis sur le projet de loi initialement déposé par l’ancienne ministre Paulette Lenert.
Retoqué par le Conseil d’État, qui avait émis une centaine d’oppositions formelles pour la première mouture du projet de loi, le texte finalement adopté jeudi reflète «la directive, rien que la directive», comme le constate amèrement David Wagner (déi Lénk). Si les députés de l’opposition regrettent la limitation de son champ d’application par rapport au projet initial et la disparition d’une procédure spécifique de règlement extrajudiciaire financée par le budget de l’État, ils sont favorables au texte qui a, au moins, le mérite d’exister.
Le Luxembourg est un des derniers pays de l’UE à avoir transposé la directive européenne, en accusant un retard de plus de deux ans sur la date limite. La nouvelle procédure dite «de recours collectif» est censée faciliter l’accès à la justice pour les consommateurs lésés se trouvant dans une situation identique ou similaire. Elle leur permet d’introduire une action collective unique, tendant soit à la réparation du préjudice subi, soit à la cessation ou à l’interdiction du manquement constaté, soit aux deux à la fois.
Le projet de loi ne crée ni nouveaux droits à réparation au bénéfice des consommateurs ni nouvelles obligations à la charge des professionnels. Le mécanisme de recours collectif s’inscrit dans la continuité de la tradition juridique nationale et fait application, dans la mesure du possible, des règles de droit existantes.
Trois phases
Pour l’ULC, l’aspect financier des recours était capital, les associations agréées ne disposant pas des fonds suffisants pour ester en justice. Cette question avait fait l’objet d’une analyse approfondie avec plusieurs ministères dans le cadre d’un projet parallèle. Ils sont arrivés à la conclusion qu’aucune mesure financière spécifique n’était nécessaire, dans le strict respect de la directive européenne.
Il reste la médiation pour éviter trop de frais. La gratuité pour les parties du recours au règlement extrajudiciaire du litige collectif est une mesure jugée positive, vu que ces frais sont pris en charge par le budget de l’État. Ainsi, les consommateurs ayant subi un préjudice disposent d’une alternative efficace au procès en recourant à un médiateur afin d’être indemnisés sans frais et de manière plus rapide.
L’action des associations agréées se déroule en trois phases. Il y a d’abord un jugement sur la recevabilité. Aucun nombre minimum de cas n’est exigé par la nouvelle loi. Le demandeur fournit au tribunal des informations suffisantes sur les consommateurs concernés par le recours collectif. Le tribunal détermine le contenu et les modalités de publicité du jugement de recevabilité. S’il y a lieu, les consommateurs concernés sont informés individuellement.
Vient ensuite la recherche d’un accord amiable qui doit être conclu en principe dans un délai de 6 mois. La médiation en matière de recours collectif peut être confiée au médiateur de la consommation existant. Ce recours au médiateur de la consommation est gratuit, mais les frais d’instruction et d’avocat doivent être supportés par les parties, sans aide financière de l’État.
Pour toutes les victimes
L’accord de médiation doit préciser les éléments de preuve que le consommateur devra fournir afin de démontrer qu’il a subi un préjudice identique, causé par le même professionnel, condition nécessaire pour intégrer le groupe de consommateurs concernés et bénéficier de l’indemnisation prévue par l’accord.
À l’issue du processus de médiation, il appartient au tribunal de désigner un liquidateur qui veille à la correcte répartition des indemnités dues aux consommateurs concernés, selon les modalités convenues dans l’accord homologué.
Enfin, à défaut d’accord amiable dans les délais impartis, la procédure se poursuit devant le tribunal selon les règles procédurales usuelles, comme celles relatives à la charge de la preuve. Lorsque le recours collectif tend à la réparation des préjudices subis, le tribunal statue sur la responsabilité du professionnel au vu des cas individuels exemplaires.
Dans le même jugement, le tribunal définit le groupe des consommateurs à l’égard desquels la responsabilité du professionnel est engagée et en fixe les critères de rattachement. Le tribunal définit les modalités d’indemnisation des consommateurs concernés.
Toute victime, non seulement les membres de l’entité qualifiée, a le droit d’adhérer à un recours collectif sans en supporter les frais.