SÉLECTION NATIONALE Fatalement, le nouveau sélectionneur national est sous l’œil attentif des médias allemands. Et il est redevenu très mordant, pour l’occasion.
On trouve Jeff Strasser extrêmement souriant depuis la signature de son contrat comme sélectionneur national. Comme si le technicien avait atteint une sorte de plénitude béate qui cache très facilement la bête de compétition qu’il reste et qu’on avait presque oubliée.
Et c’est là que la DFB, qui voulait se fendre d’une interview avec le plus gros CV de joueur pro de l’histoire du XXe siècle au Grand-Duché (comme tout le monde en Allemagne semble avoir envie d’en faire à l’heure actuelle), a posé la question la plus logique qui soit. Mais la poser à un coach qui préférerait éviter d’être ramené à ce qu’il a été plutôt qu’à ce qu’il est, c’est-à-dire un coach ambitieux, même face à la Mannschaft, est aussi la plus casse-gueule.
La même promotion que Nagelsmann
«Ce match contre l’équipe nationale allemande vous tient-il particulièrement à cœur ?», a ainsi demandé le service communication de la fédération. Bateau. La réponse initiale du sélectionneur : «Bonne question. Oui et non. Oui, j’ai passé la majeure partie de ma carrière en Bundesliga, mes meilleures années». Il a alors fallu relancer : «Et « non« pourquoi ?». Retour de bâton immédiat : «Je ne viens pas pour une réunion d’anciens camarades de classe, mais pour faire un bon match.»
Le message est clair. Parlez-moi de football. Et de football actuel. Sur ce terrain-là, Strasser est prêt à s’aventurer avec beaucoup plus de gourmandise. Quitte à donner son avis sur le travail de son homologue, Julian Nagelsmann, avec qui il a passé ses diplômes d’entraîneur, il y a une décennie, au sein de la 62e promotion de l’Académie Hennes-Weisweiler de Hennef : «Les équipes de Julian ont toujours une signature. Sous sa direction, l’équipe veut dominer, l’élément déterminant est le jeu avec le ballon.»
C’est le moment que choisit la DFB pour replonger les deux pieds dedans : «Vous réjouissez-vous de ces retrouvailles ?». «Avant tout, il s’agit d’un match de qualification. C’est donc du sérieux.» Bim…
Il n’en fallait finalement pas beaucoup plus pour justifier le titre «pince-sans-rire» de la Sportschau, qui a dédié un portrait à «Jeff Strasser, maître du tacle sanglant» (littéralement), un titre qui lui avait été attribué par Bild il y a peu. Curieux pour un garçon qui n’a pris que 50 jaunes et 2 rouges en carrière, mais il en a hérité… en août dernier, quand son ancien club de Mönchengladbach a fêté ses 125 ans.
L’ancien capitaine des Fohlen avait honoré de sa présence le match des légendes, rappelant au public pourquoi il était leur coqueluche, du haut de son «enthousiasme et de son travail défensif souvent intransigeant», pointe Sportschau. Bild avait lui joué les prolongations et fait un peu de zèle.
«L’impensable deviendra peut-être envisageable»
Le quotidien aurait sûrement été mieux inspiré de demander au sélectionneur quelles seraient ses intentions au moment d’envisager de venir défier la Mannschaft à Sinsheim. Il n’aurait pas été déçu du voyage. Puisque voilà ce que Strasser, entre autres (bonnes) choses, a déclaré au Funke Medien Gruppe : «L’équipe allemande est vulnérable aux contre-attaques. La Slovaquie en a déjà profité».
Où l’on découvre un nouveau sélectionneur tout aussi ambitieux que son prédécesseur et peut-être même un peu plus puisqu’il assume que la destinée du Luxembourg puisse être, comme l’Allemagne, d’aller voir plus haut si elle y est : «Si un jour tout s’imbrique parfaitement, alors l’impensable deviendra peut-être envisageable. Nous devons être ambitieux et humbles.»
La DFB avait en effet bien remarqué que les Rout Léiwen sont désormais capables de battre la Suède (1-0, en mars dernier). «Le fait que nous ayons actuellement une génération en or y contribue également. Mais contrairement à avant, où l’objectif était simplement d’encaisser le moins de buts possible, cette époque est révolue.» Jeff est prêt à mordre. Même si c’est l’Allemagne.
«Kiki», toujours un point d’interrogation
Christopher Martins, un mois après son impasse totale, reste incertain.
Le patron est là. Physiquement, ses deux jambes et sa tête sont à Lipperscheid, mais il y a un flou qui demeure. Après avoir dû zapper l’Irlande du Nord (contre laquelle sa présence aurait fait un bien fou au cœur d’une deuxième période moins bien maîtrisée) et la Slovaquie, Christopher Martins espérait sûrement se retaper plus vite que ça de son pépin musculaire. Mais son temps de jeu, à l’heure actuelle, du côté du Spartak Moscou, dit la fragilité des certitudes que le milieu de terrain peut afficher devant son staff.
Blessé fin août, il avait semblé reprendre ses bonnes habitudes avec une titularisation immédiate dans un derby contre le Dinamo, le 13 septembre. On ne se faisait alors plus aucun souci quant à sa présence contre la Mannschaft et en Slovaquie. Et puis la semaine suivante (après avoir fait l’impasse en Coupe contre Rostov, pour ce qui était une semaine anglaise), contre Samara, il est sorti à la pause. Depuis, il a fait huit minutes contre Pari NN et deux seulement contre le CSKA.
Que fait-on avec ça ? Jeff Strasser lui-même ne semble pas encore le savoir. À la question de savoir s’il y avait des bobos à signaler, il a commencé par répondre «non», avant de préciser qu’il fallait voir «quel est l’état physique de « Kiki ». Il ne serait pas là si cela n’allait pas mieux que le mois précédent. Mais il a eu un temps de jeu très variable depuis, alors il faut voir.» C’est donc, entre les lignes, qu’il faut quand même s’en inquiéter a minima.
J. M.