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Moral des enseignants lorrains : «C’est le système dans son fonctionnement global qui est délétère»


Pour Nathalie*, la baisse du nombre de candidats aux concours de l’enseignement peut s'expliquer ainsi : « Manquent notamment aujourd’hui parmi les candidats aux concours les fils et filles d’enseignants, qui étaient autrefois nombreux et se détournent désormais massivement du métier… »

La rentrée est un moment fort pour l’ensemble des communautés éducatives. C’est aussi, dans un contexte de tension budgétaire et de crise des vocations, un moment compliqué pour nombre d’enseignants. Aujourd’hui, le point de vue d’une enseignante titulaire remplaçante dans l’académie de Nancy-Metz.

Nathalie* est titulaire remplaçante dans l’académie de Nancy-Metz depuis de très longues années. Elle a en fait réalisé l’essentiel de sa carrière dans ces fonctions dans diverses académies. Par choix d’abord, «car cela constituait une façon de me rapprocher plus vite et plus facilement de chez moi». Puis par obligation ou presque. «C’est un type de poste dont on ne peut plus sortir ensuite : le fait de voir beaucoup d’établissements permet de mieux savoir où on ne veut pas aller… De fait, au moment des demandes de mutation, on est un peu plus exigeante et on finit par demeurer remplaçante.»

De surcroît, depuis plusieurs années, observe l’enseignante, «une sorte de concurrence s’est installée avec les contractuels. Comme les concours ne font pas le plein, on fait appel à nous mais aussi à eux en masse, avant même la rentrée. Et comme il y a vraiment de gros besoins, les contractuels sont les premiers servis, de peur qu’ils refusent les postes. Nous passons après eux.» Cette année par exemple, Nathalie a appris son affectation au cours de la semaine précédant le jour de la rentrée. «Avant, c’était généralement à la mi-juillet», se souvient-elle. Et encore, elle ne se plaint pas : «J’ai une affectation sur un seul établissement. Dans d’autres disciplines, c’est plus compliqué!»

Double peine

Une situation qui participe à la dégradation des conditions de travail et à la baisse de moral ambiante, explique celle qui précise n’avoir, heureusement, eu aucun souci particulier avec les chefs d’établissement avec lesquels elle a été amenée à travailler jusqu’ici. «C’est le système dans son fonctionnement global qui est délétère. On nous propose des postes de moins en moins pérennes. Nous sommes victimes d’une double peine : au moment des inspections, il nous est parfois reproché de n’être pas assez impliqués dans les projets d’établissements où nous ne faisons, en fait, que passer.» Résultat : une progression de carrière qui n’est pas facilitée.

«Et dans le même temps, les contraintes spécifiques du remplacement ne sont absolument pas reconnues pour notre avancement, comme elles peuvent l’être pour les enseignants de Rep + (NDLR : réseaux d’éducation prioritaires renforcés) par exemple. Nos indemnités de déplacement sont nos seules bonifications salariales, et encore, avec des disparités d’une académie à l’autre.» Résultat : Nathalie gagne aujourd’hui quelque 2 300 euros net après prélèvements malgré vingt ans d’ancienneté. «Pour ce qui est de l’attractivité salariale, on a vu mieux…»

«Beaucoup baissent la tête»

De fait, cette dernière pense à sa réorientation professionnelle «à peu près tous les jours», pas tant du fait du changement de regard de la société sur sa corporation, mais surtout par «lassitude des politiques qui véhiculent une mauvaise image de nous, des réformes successives qui vont à l’encontre de l’intérêt des élèves et qui ne visent qu’à supprimer des postes, du manque de concertation, du fait de n’être pas consultés ni entendus quand nous faisons remonter des infos… À tel point qu’aujourd’hui, beaucoup baissent la tête et ont peur de s’exprimer.» Une «vitrine» qui ne suscite plus les vocations : «C’est logique, manquent notamment aujourd’hui parmi les candidats aux concours les fils et filles d’enseignants, qui étaient autrefois nombreux et se détournent désormais massivement du métier…»

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