Le Mosellan était âgé de 94 ans. Il avait marqué l’émission de télé française culte Tournez… Manège !. Avec son orgue et ses «Formidable!», il a vite conquis le public.
«Formidable!» C’est une interjection qui est devenue sa marque de fabrique. Charly Oleg, l’organiste moustachu et rigolard de l’émission Tournez… Manège !, n’est plus. Il est décédé lundi à l’âge de 94 ans. «Notre ami, notre frère, notre merveilleux pianiste Charly Oleg, a été rappelé par Dieu ce matin», a écrit le chanteur José Todaro, souvent accompagné sur scène par le musicien, sur son compte personnel Facebook. De son vrai nom Charles Olejniczak, le musicien naît à Hayange le 7 août 1931 et grandit à Nilvange. «Je suis parti très jeune de la maison», raconte-t-il dans les colonnes du Républicain lorrain en 2015. «À 14 ans, mon père signait à la gendarmerie un papier attestant de mon émancipation. J’ai grandi vite. J’ai été adulte très tôt.»
Passionné de musique, il décide de devenir pianiste et obtient même un premier prix au conservatoire de Metz, à l’âge de 16 ans. Mais le métier de pianiste paye peu et le jeune homme court les cachets dans les bals populaires et autres mariages. Il prend le nom de scène de Charly Oleg, simplifiant son nom d’origine polonaise. «Je venais prendre mes cours à vélo, je logeais à l’époque dans une petite chambre où je pouvais caser mon piano», se souvenait-il. «Les soirs, j’enchaînais dans les cabarets, j’ai eu cette chance, car il fallait bien que je mange. Le lendemain matin, j’étais de retour au conservatoire.»
Charles décide alors de se rendre dans la capitale. «En fait, mes premiers pas à Paris, je les ai faits à l’occasion des championnats de Lorraine de ping-pong», décrit-il. «Je me suis tout de suite dit : C’est là que je veux vivre! Puis il y a eu le service militaire. J’ai intégré la musique de l’armée, porte de Clignancourt. Je continuais à travailler dans les cabarets pendant mes permissions. À mes débuts, je faisais les allers-retours entre Paris et Nilvange pour voir ma mère qui était malade. Après, il y a eu les émissions de télé, les concerts. Par la force des choses, j’ai mis mes racines de côté.»
Aznavour, Mireille Mathieu, Joséphine Baker
Là, il décroche des contrats pour accompagner Charles Aznavour, Mireille Mathieu, ou encore Joséphine Baker. «J’ai dû remplacer son pianiste malade au pied levé. À 20 ans, je me suis retrouvé devant elle, à Londres. (…) Au final, elle m’a beaucoup appris. Comme le fait de savoir s’effacer devant un chanteur. La star, ce n’est pas le pianiste.»
Mais c’est un autre contrat, en 1965, qui va lui ouvrir des portes : celui pour l’émission Télé Dimanche (qui a été diffusée de 1959 à 1972). Il y accompagne au piano une partie jeu, Le Jeu de la chance. De 1979 à 1982, il devient chef d’orchestre au théâtre de la Renaissance, où sont alors jouées de nombreuses opérettes. Télé Dimanche ne lui a pas apporté une gloire immédiate, mais la télévision le rappelle pour une nouvelle émission en 1985, sur TF1 : Tournez… Manège !. L’émission, dont le but est de former des couples, est un carton. Durant la séquence Les Refrains à la Une, Charly Oleg à l’orgue impose un blind test aux candidats, qui doivent reconnaître des chansons. La bonne ambiance entre les présentatrices –Évelyne Leclercq, Simone Garnier et Fabienne Égal– et lui participe au succès du programme, diffusé à midi. Tournez… Manège ! est l’un des programmes phares de TF1 jusqu’à son arrêt, en 1993.
Charly Oleg marque les esprits non seulement par ses talents de musicien, mais surtout son large sourire, sa moustache et son (trop ?) régulier «Formidable!». «Je me souviens des banderoles avec l’inscription Charly Oleg, Formidable!», se remémore-t-il en 2009 à Sud Info. «Ce sont les gens qui m’ont fait remarquer que je disais toujours « Formidable » lorsque les candidats trouvaient la bonne réponse. Je ne m’en étais pas aperçu. Au début, je me demandais pourquoi ils me disaient tous la même chose. C’était bizarre.»
En marge de Tournez… Manège !, Charly Oleg en profite pour jouer des petits rôles au cinéma, comme dans L’Insoutenable Légèreté de l’être de Philip Kaufman (1988) ou, plus tard, Ça n’empêche pas les sentiments de Jean-Pierre Jackson (1998). Après l’arrêt de Tournez… Manège !, Charly Oleg avait retrouvé un anonymat relatif, tourné dans toute la France avec son groupe musical et sorti quelques albums. Côté cœur, il s’était marié deux fois. Et pour la petite histoire, sa seconde épouse avait été candidate au Jeu de la chance, que le Mosellan animait dans Télé Dimanche. Ils se sont mariés en 1970, à Paris, et vivaient depuis des décennies au Blanc-Mesnil, en banlieue parisienne.
(le Républicain lorrain)