ÉLIMINATOIRES DU MONDIAL-2026 Anthony Moris a fait souffler un vent de panique en disant, cet été, qu’il songeait à arrêter la sélection. Ces questionnements sont derrière lui.
Est-ce que Jeff Strasser, quand il vous a téléphoné, vous a fait changer d’avis?
Anthony Moris : Non, il ne m’a pas fait changer d’avis. Je lui ai juste exposé les faits, en lui expliquant comme je l’avais fait à Luc Holtz lors de notre dernière conversation, que je faisais face à un nouveau challenge sportif et humain, et que je devais aussi avoir des certitudes pour ma famille.
Car au moindre problème, ce n’est plus une heure de route, comme avant, depuis Liège, mais 10 heures d’avion. Mais on a réussi à trouver un équilibre sur place. Je veux dire que, jamais, je n’avais abandonné l’idée de continuer de jouer pour les Rout Léiwen. Et que je me rendais bien compte que plus le rendez-vous approchait, moins je pouvais m’imaginer rater ça.
Pourtant, les mots semblaient particulièrement bien pesés dans votre prise de parole.
Quand je m’en suis expliqué, j’étais encore en stage aux Pays-Bas. Je n’avais fait que huit jours en Arabie saoudite, seul, et je me demandais encore comment ma famille allait bien pouvoir s’adapter. Maintenant, je n’ai plus le moindre doute. Sinon, là, tout de suite, je serais dans mon canapé en Arabie saoudite et pas à Lipperscheid.
En avez-vous beaucoup entendu parler de cette interview que vous aviez donnée à la presse belge et dans laquelle vous expliquiez hésiter fortement à continuer votre carrière internationale?
On m’a beaucoup posé de questions, oui, y compris dans mon entourage, car très peu de gens sont au courant de la façon dont je veux faire évoluer ma carrière. Je consulte très peu de gens. Mais dans cette interview, je n’avais rien fait d’autre que d’émettre une hypothèse.
Jeff Strasser a-t-il aussi parlé à votre épouse pour s’assurer que tous les voyants étaient au vert?
Quand on en a discuté, il m’a dit «écoute, si je peux t’aider de quelque manière que ce soit…» Il a été joueur professionnel, il a des contacts. Alors non, il n’a pas eu ma femme au téléphone, mais il a toujours eu une pensée pour ma famille.
Et vos nouveaux dirigeants, qu’en disent-ils? Sont-ils, à l’américaine, de ceux qui n’auraient pas forcément vu d’un mauvais œil que leur nouvelle recrue puisse se concentrer entièrement à sa tâche en club?
Alors là, c’est tout le contraire! Et comme tout le monde sait que j’ai la double nationalité, ils ont insisté pour que le contrat soit fait avec ma carte d’identité luxembourgeoise, parce qu’ils sont extrêmement fiers de pouvoir dire qu’ils comptent des internationaux. Pour eux, c’est important.
Plus le rendez-vous approchait, moins je pouvais m’imaginer rater ça
Cela veut-il dire, aussi, qu’il n’y a pas la moindre lassitude?
Non, je viens toujours avec autant de plaisir. Et dans ces voyages au long cours, je vais trouver mon rythme de croisière pour être sûr d’arriver prêt physiquement et moralement en sélection. D’ailleurs, là, je ne me sens pas trop fatigué. Juste un petit peu plus que d’habitude.
Vous êtes-vous dit, à un moment, qu’après le départ anticipé de Luc Holtz, la mise à l’écart de Gerson Rodrigues, le refus de sélection de Brian Madjo, cela ferait beaucoup pour cette équipe de subir en plus la perte de son gardien de but?
Je pars du principe que personne n’est irremplaçable. Dès qu’il y a une vraie cohésion de groupe, comme c’est le cas chez nous, tout le monde peut être remplacé, que ce soit un sélectionneur, le meilleur buteur ou le gardien titulaire.
Même quand son numéro 2 a 18 ans?
Mais il a les qualités! Et il est très intelligent. Ce qui nous différencie, lui et moi, c’est qu’il voit ce que je fais, qu’il me pose des questions après les débriefings et que je lui réponds. Comme moi, j’aurais aimé qu’on me réponde quand j’avais son âge, ce que je n’ai jamais eu. Et puis dans les clubs, les gardiens commencent de plus en plus jeunes puisqu’il y a des logiques de revente, donc…
La question a été posée à Jeff Strasser, qui a répondu qu’il n’existait aucun arrangement entre vous pour que vous soyez laissé tranquille en cas de match amical, par exemple…
Je veux jouer tous les matches. Même à l’entraînement. Même les parties de cartes.
Surtout que cette campagne est excitante, avec l’Allemagne en ligne de mire, le mois prochain.
Pour moi, ça ne change rien du tout, le nom de l’adversaire. J’espère juste que mon ancien coéquipier de l’Union, Deniz Undav, sera sélectionné, pour pouvoir le revoir. Mais on est concentrés exclusivement sur l’Irlande du Nord et la Slovaquie, deux matches importants, chez nous, qui peuvent conditionner notre campagne.
Quand vous avez vu le tirage en Ligue des champions de l’Union, avec le Bayern, l’Inter, l’Atlético, l’Atalanta, Newcastle, Galatasaray, le PSV… vous n’avez pas éprouvé de déception? Même pas un petit peu, vous qui nous disiez qu’on n’est vraiment un footballeur que quand on a joué la C1?
Vous savez, en Europa League, j’ai déjà rencontré Liverpool, les Rangers, Fenerbahçe… Non, je n’ai pas de regrets. Il fallait que je fasse une chose dictée par beaucoup d’aspects et pas seulement le financier comme beaucoup de gens semblent le penser. J’ai intégré un championnat qui grandit et je vis une nouvelle expérience en famille.