Finalement, le Luxembourg se dote d’un système de reconnaissance automatique des plaques d’immatriculation qui sera réservé aux infractions d’une certaine gravité : terrorisme, grand banditisme, crime organisé, protection des frontières.
Le Luxembourg fait partie des cinq États de l’Union européenne n’ayant pas encore mis en place un système de reconnaissance automatique des plaques d’immatriculation, avec la Lettonie, la Lituanie, Malte et la Slovénie.
Le ministre des Affaires intérieures, Léon Gloden, a déposé un projet de loi dans ce sens, mais ce nouvel outil sera réservé aux infractions d’une certaine gravité. Son usage sera limité à la police grand-ducale, au Service de renseignement de l’État et à l’administration des Douanes et Accises.
Contrairement à la France, la Belgique ou l’Allemagne, l’intention du gouvernement n’est pas d’utiliser ce système de reconnaissance de plaques pour traquer des infractions routières, comme le non-port de la ceinture de sécurité, le défaut d’assurance ou de contrôle technique, ou pour gérer le trafic et les flux routiers ou encore à des fins fiscales ou statistiques.
Au Luxembourg, les finalités fondamentales de sécurité intérieure telles que la lutte contre le terrorisme, le grand banditisme, le crime organisé ou la protection des frontières seront retenues.
Actuellement, l’utilisation de systèmes identiques n’est possible que sur la base légale qui l’autorise dans le cadre d’une observation. Ce type d’utilisation est limité à un dossier pénal spécifique dans la phase de l’enquête préliminaire ou de l’instruction, et ne peut être mis en place que sur une décision du magistrat compétent.
Les auteurs du projet de loi indiquent que l’introduction d’un tel système de contrôle est devenue indispensable, ne serait-ce qu’au vu des exigences en matière de coopération internationale.
«Il s’agit en effet d’une mesure compensatoire aux contrôles aux frontières intérieures de l’Union européenne», selon l’exposé des motifs. Cet outil permettra de rechercher des personnes suspectées d’avoir participé à des infractions et déjà signalées, de même que de rechercher les auteurs d’infractions non encore nominativement identifiés.
«Cet outil présente une grande utilité en facilitant la recherche d’auteurs identifiés d’infractions, de véhicules signalés ou volés, d’auteurs non identifiés d’infractions ou dans les cas de disparitions inquiétantes», est-il indiqué dans le programme gouvernemental.
Le gouvernement précédent avait l’intention d’introduire un système, mais aucune action concrète n’avait été entreprise pour établir la base légale nécessaire à la mise en place d’un système ANPR (Automatic Number Plate Recognition, en français, lecture automatisée de plaques d’immatriculation).
Depuis que ce dispositif a été introduit en France, plus de 3 millions de plaques d’immatriculation ont été lues depuis avril 2007, près de 400 véhicules volés ont été retrouvés et 200 véhicules ont été détectés et mis sous surveillance.
Le projet de loi a une incidence sur les libertés publiques des citoyens qui sont garanties par la Constitution luxembourgeoise, reconnaissent les auteurs du texte.
La loi suprême exige en effet que toute limitation d’une liberté publique «doit être prévue par la loi et respecter leur contenu essentiel. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires dans une société démocratique et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui.»
Les caméras ANPR prennent en image tous les usagers de la route qui y passent et par conséquent toutes les données de tous les usagers sont enregistrées pendant une durée prédéterminée.
«La collecte de ces données est intrusive et soulève des préoccupations légitimes quant au respect de la vie privée des individus», admettent les auteurs du projet de loi.
Plusieurs jurisprudences ont établi que la collecte de données personnelles par les autorités compétentes est justifiée lorsque cette collecte est nécessaire pour atteindre des objectifs d’intérêt général, tels que la prévention et la répression des infractions pénales.
Comment fonctionne l’ANPR
La première étape consiste dans la prise d’une photo de la plaque d’immatriculation et, le cas échéant, du véhicule et des occupants, effectuée lors du passage d’un véhicule devant le dispositif.
La photo est ensuite convertie en format numérique et envoyée à un système de traitement. Les données collectées sont alors enregistrées, telles que le numéro d’identification du véhicule, le lieu de passage du véhicule, etc. Le logiciel peut, le cas échéant, enregistrer d’autres données telles que la photo du véhicule ou de ses occupants.
Les données collectées sont transmises directement à un fichier dans lequel elles sont conservées pendant un délai déterminé. Un logiciel informatique intelligent permet de traiter automatiquement les données enregistrées, qui sont croisées avec des données contenues dans d’autres fichiers, tels que le fichier SIS (Système d’information Schengen) ou le fichier des véhicules volés.
Les détections signalées comme positives par le dispositif sont alors analysées et traitées si nécessaire. Le cas échéant, une réaction directe de la police est possible, notamment en cas de signalement d’un véhicule volé où une patrouille de police prend directement la poursuite du véhicule.
Le système sera également utilisé à l’occasion d’événements publics d’envergure nationale ou internationale. Dans ce cas précis, il ne fonctionnera que pendant une période maximale de douze heures qui précèdent l’événement, et jusqu’à sa fin estimée.