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Hakim Menaï : «On a construit cette équipe du Swift en seulement deux semaines»


BGL LIGUE Hakim Menaï, le coach du Swift, a passé trois semaines de sa préparation à faire des tests pour créer un groupe ex nihilo. Alors, ce début de saison à 4 pts est… miraculeux.

Match nul contre Pétange, victoire contre l’Européen Strassen après avoir été mené deux fois : le début de saison du Swift ne ressemble pas du tout à la débâcle que tout le monde imaginait, quand il a annoncé la signature d’une quinzaine de garçons à dix jours de la reprise. Dimanche, contre l’UNA, sept joueurs de 23 ans ou moins ont débuté la partie et trois sont entrés en jeu. Leur baby-sitter, Hakim Menaï, nous a raconté ce tour de force incroyable de reconstruire un groupe de A à Z sans argent, en un peu plus d’un mois et avec une réputation désolante à faire oublier.

Il conviendrait peut-être de commencer avec une citation, quelque chose qu’a dit votre avant-centre, juste après le succès contre Strassen, dimanche : « Tout le monde dit qu’on est morts (…) On les a tous étonnés. »

Hakim Menaï : Forcément, vu le contexte, je suis assez d’accord. On était interdits de recrutement et notre vrai travail de préparation, il a duré deux semaines. Je n’ai repris le 3 juillet qu’avec des tests, des gens qui nous contactaient, qui voulaient venir tenter leur chance. J’ai ouvert les portes en grand. On a testé pas loin de 70 joueurs et c’était très compliqué. Vous imaginez la charge mentale? Il fallait organiser le déplacement de tous ces garçons.

Il faut absolument revenir sur un point : vous avez bien dit « deux semaines de préparation » ?

Oui. D’habitude, c’est cinq qu’il faut. C’est la raison pour laquelle j’avais énormément d’appréhension au moment où la saison a commencé. Mais il a fallu que je me force pour que les joueurs ne le ressentent pas. Parce que je connais la BGL Ligue et son intensité…

Je leur ai tout dit sur la saison passée. Je ne leur ai rien caché

Est-ce qu’on a le droit de dire que c’est un miracle d’avoir accroché Pétange puis battu Strassen ?

Un miracle? Oui, on peut le dire. C’est presque un miracle. Dans le sens des résultats, en tout cas. On s’entraîne dur, on essaye de combler notre retard sans avancer trop vite non plus pour ne pas griller les joueurs. Parce qu’on sait qu’on va avoir un contrecoup : on s’est mal préparés. C’est inévitable.

Vous voulez nous raconter comment le recrutement s’est passé ?

Eh bien, je passais dans le vestiaire à 17 h, je regardais qui était là, qui n’était pas venu finalement, combien j’avais de joueurs. J’avais préparé mes séances en amont, il fallait souvent adapter. Il y avait certains garçons que je ne connaissais même pas. C’était des candidatures spontanées. Et puis le reste arrivait par les réseaux, puisqu’on se connaît tous dans ce milieu. Après, mes journées ont été absolument interminables, à passer des heures et des heures au téléphone, à cibler des profils. Et il a fallu commencer à faire ça alors que rien n’était débloqué, qu’on n’avait pas encore l’autorisation de recrutement. Je dois avouer que j’ai beaucoup douté.

On aimerait s’incruster dans les conversations que vous avez eues avec les joueurs qu’il fallait courtiser, connaissant l’image du club. Que leur disiez-vous ? Que ne leur disiez-vous pas ?

Je leur ai tout dit.

Tout ?

Tout. Je leur ai dit ce qu’était ce club dans un passé récent. Je ne leur ai rien caché. Après avoir entendu ça, certains ont renoncé. D’autres n’ont pas froid aux yeux, et ceux-là m’ont dit « le passé, c’est le passé. Parle-moi plutôt du présent ». Là, quand j’entends ça, je sais à qui j’ai affaire. Ces nouveaux, ils n’ont rien à voir avec le passé, mais ils sont au courant de tout. Je dis bien tout. Il était hors de question qu’un jour, au vestiaire, un gars s’entende dire par un autre « Non mais tu ne sais pas où tu as mis les pieds ». Je ne voulais pas de ça. Je ne voulais pas qu’on puisse reproduire les mêmes erreurs. Et il a vite été certain que c’était des profils de garçons qui ne venaient pas pour l’argent, car c’est bien simple : on n’a rien du tout.

On entend que désormais le Swift ne propose plus de salaires à plus de 1 000 euros.

Je n’ai pas les chiffres exacts de ce que les garçons gagnent, mais de ce que j’ai entendu, non, cela ne vole pas très haut.

On est sur des profils kamikazes alors? Des garçons pour qui ça passe ou ça casse ?

Ce sont des garçons qui misent avant tout sur eux-mêmes. Quand on joue en N2 ou en N1 pendant des années, on s’essouffle, on fait vite le tour de la question. Le Luxembourg reste attractif, parce que c’est une première division et que ceux qui crèvent l’écran peuvent être repérés. On a quand même bien été aidés par le fait que les problèmes financiers de la Ligue 1, en France, ont un effet direct jusque sur le monde amateur. Il y a moins d’argent, moins de places. Cela devenait dur pour eux aussi.

Et on en arrive à dimanche et à ce succès dingue contre un candidat au titre.

Je leur ai dit de savourer après le match, que le lendemain, j’allais leur remettre les pieds sur terre. Le signal d’alarme s’est allumé dans ma tête. Il faut redescendre immédiatement. Il y a trop d’euphorie. On vient de battre un Européen et ils sont perdus par rapport à ce genre de performance. Il faut les recadrer, car c’est très jeune. Heureusement, Gerry (Prempeh) est là, avec nous. J’ai insisté très fort pour qu’il reste. Il ne s’exprime pas souvent, mais toujours à bon escient.

Il y a d’autres joueurs de la saison passée à qui vous avez demandé de rester, d’ailleurs ?

Oui. Ils m’ont tous dit « non, désolé Hakim, je ne peux plus ». Cela a été une leçon pour moi. Après, toutes nos recrues, je leur ai demandé « est-ce que tu es sûr? Est-ce que tu es vraiment sûr? Si tu as le moindre doute, s’il te plaît, ne viens pas ».

J’ai reçu des garanties financières de la part du président

Aucun coach qui s’engage à ce point dans le recrutement n’a envie de faire venir des jeunes en leur promettant des choses et que l’aventure se transforme en galère. Avez-vous eu des garanties financières ?

Oui, j’ai engagé ma parole d’homme auprès de tous ces jeunes. Parce qu’on n’a que des jeunes : si on ne voulait pas avoir le problème de joueurs transférés, c’était soit de très jeunes joueurs, soit des anciens. En tout cas, je voulais que le peu d’argent qu’ils allaient toucher, on le leur donne pour de vrai. Et depuis leur arrivée, certains ont déjà trouvé un boulot. C’est des débrouillards, mes joueurs!

N’avez-vous pas peur quand même, pour eux, que l’argent redevienne un souci majeur du club ?

J’ai reçu des garanties financières du président qui m’a dit « on a le budget, tout est calculé ». Il m’a donné sa parole. Et c’était important pour moi, parce que moi, les joueurs que j’ai eus au téléphone pendant 20 ou 25 minutes, jamais moins, je leur ai donné ma parole. Je sais que les dettes qu’on a, il faudra les rembourser, c’est inévitable. Je ne sais pas dans quelles conditions, mais si on veut que le club redevienne serein…

Est-ce une saison complètement différente de celle de la saison passée qui vous attend? Est-ce sur celle-ci qu’on va pouvoir juger Hakim Menaï sur ses qualités de coaching? En tout cas de recrutement…

C’est ma première vraie saison, avec un groupe que j’ai composé entièrement. La saison passée avait été dure psychologiquement. Là, on est dans un contexte différent, avec un petit portefeuille. On dit qu’un bon coach fait progresser ses joueurs. On verra à quel niveau ils seront en fin de saison. En tout cas, notre objectif, c’est le maintien.

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