Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Chaque dimanche de l’été, des bénévoles embarquent le public à bord de leurs répliques miniatures d’anciens trains ayant jadis sillonné le Luxembourg. Rencontre avec ces passionnés.
Avant même d’arriver sur le site, on entend déjà résonner au loin le fameux sifflet du train à vapeur, véritable joyau du chemin de fer Lankelz, géré par une douzaine de passionnés dans le quartier du même nom à Esch-sur-Alzette.
Au bout du petit chemin, après le passage à niveau, nous contournons le poste de gare et apercevons Jo, l’un des plus jeunes membres de l’association, du côté de la rotonde.
Muni d’une petite pelle, le jeune homme de 22 ans, étudiant en radiologie, charge la chaudière de la locomotive en charbon pour faire monter la température : «On doit chauffer pendant une heure environ avant d’atteindre le niveau suffisant de vapeur pour la faire rouler», explique-t-il, alors que les premiers visiteurs affluent.
Un virus de père en fils
Dans sa famille, le virus des trains se transmet de père en fils. Ainsi, c’est auprès de son papa qu’il a tout appris, dès son plus jeune âge : «On habitait dans le coin, donc on venait souvent, et j’ai tout de suite adoré. J’ai rejoint l’équipe quand j’avais 12 ans!»
À part deux locomotives diesel, tous les modèles que possède l’asbl sont des répliques d’engins qui ont roulé autrefois à travers le pays, comme cette machine à vapeur de près d’une tonne, au poste de commande très complexe.
Un robinet pour accélérer
«Ici, on a la jauge pour vérifier constamment le niveau d’eau dans la chaudière. C’est très important pour faire avancer le train, mais aussi pour refroidir le cuivre et les autres matériaux qui pourraient fondre sans ça.»
«Là, c’est pour mettre le charbon», montre-t-il. «On a aussi cette roue pour commander la direction, et ce robinet qui va envoyer plus ou moins de vapeur dans les cylindres pour les accélérations. Et pour ralentir : un frein à air, comme sur les vraies locomotives.»
Comme il n’existe plus de permis pour piloter ces engins atypiques, c’est désormais auprès des anciens que les plus jeunes acquiert ce précieux héritage. Jo, lui, a appris avec l’un des aînés de l’association et aussi en se plongeant dans des livres spécialisés.
Son collègue Jean-Paul se souvient des locomotives à vapeur dans les années 1960 : «Quand j’étais enfant, il y en avait encore du côté allemand de la Moselle. On voyait la fumée au loin, j’étais impressionné. C’était super!», confie ce retraité, arrivé dans l’asbl il y a peu.
1,3 kilomètre dans les sous-bois
Le quai s’est maintenant rempli de passagers : des familles avec enfants qui s’émerveillent devant le manège du train de voyageurs, du train de marchandises et de l’autorail qui circulent aujourd’hui.
Un coup de sifflet du chef de gare et c’est parti pour 1,3 kilomètre dans les sous-bois, avec un passage sur un pont et dans un tunnel.
De quoi ravir Maya et Emma, accompagnées par leurs grands-parents Anna et Mario : «On habite à deux pas, alors on vient souvent. Les filles aiment beaucoup!», raconte leur mamie. «C’est génial cette petite attraction», ajoute le papi.
Deux ans et déjà fan de train
Pour le petit Antoine, deux ans et demi et grand fan de trains, la visite va sans doute rester gravée. Ses parents, Jeff et Sofia, résidents dans la capitale, découvrent le site pour la première fois.
«C’est sympa, la petite gare est très mignonne, j’ai pris plein de photos. Tout est reconstitué en miniature, c’est intéressant pour les enfants», sourit la jeune maman.
«Bien reçu, je baisse les barrières»
Au poste de gare, un autre Jean-Paul s’occupe de l’accueil des visiteurs, de la billetterie et des commandes à distance du circuit. La voix de Jo, qui conduit le train de voyageurs, grésille soudain dans le talkie-walkie.
«J’arrive au niveau des barrières», prévient-il. «Bien reçu, je les baisse tout de suite», répond Jean-Paul, en actionnant l’un des nombreux boutons du panneau accroché au mur derrière lui.
Le chef de gare, c’est lui : Jean-Paul, jamais loin du panneau de commandes. (Photos : Alain Rischard)
Olivier, Jean-Paul, Patrick et Jo, sur le pont hier pour partager leur passion avec les visiteurs.
Il faut régulièrement charger la machine à vapeur en charbon.
La mini rotonde a tout d’une grande.
Peu répandu dans nos régions, ce type de modélisme est très commun en Angleterre, précise celui qui a vu naître l’association il y a une trentaine d’années. C’est là-bas que le matériel roulant a été acheté pour circuler sur les voies de taille 7 pouces ¼.
L’entretien se fait tout l’hiver
«C’est une échelle intéressante car elle permet de monter à bord et on peut manipuler le matériel roulant sans grue.»
Les wagons, comme toutes les infrastructures du site, sont 100% faits maison. «On assure nous-mêmes l’entretien de la voie, des wagons et des machines durant l’hiver, car il n’existe plus de pièces.»
Assis à ses côtés, Patrick a rejoint le groupe en 2018 et partage désormais son temps de loisirs entre Lankelz et le Train 1900 au Fond-de-Gras : «Ici, c’est comme si on retombait en enfance. C’est le rêve! On peut faire tout ce que les parents interdisent», s’amuse ce bricoleur chevronné.
Il faut dire que tout est à taille d’enfant et que les petits peuvent même piloter eux-mêmes l’autorail électrique. Une expérience magique pour beaucoup, dont peut-être de futurs membres, qui sait?
– Chemin de fer Lankelz asbl, rue du Dr Colling à Esch-sur-Alzette, à côté du stade.
– Ouvert tous les dimanches, du 1er mai au 15 octobre, de 14 heures à 17h30.
– L’association est aussi à la recherche de nouveaux bénévoles, n’hésitez pas!
