Le sort des victimes du faux site de la BIL émeut la fraction socialiste de la Chambre. La banque a envoyé aux clients lésés un premier courrier début juillet, puis un second mardi dernier.
Le 7 juillet, un premier courrier de la Banque internationale à Luxembourg (BIL) indique la marche à suivre aux clients qui se plaignent d’avoir été victimes d’une arnaque. En cas de fraude à la carte bancaire, le dossier est traité «sous l’entière responsabilité de Worldline». Le client doit «impérativement» contacter le fournisseur luxembourgeois de services de paiement et de transaction pour obtenir l’ouverture d’un dossier de fraude et une «prise de position» sur le cas de la fraude. Si le client n’est pas d’accord avec les conclusions de Worldline, il a la possibilité d’introduire une réclamation client, par écrit, auprès du service Quality and Claims Management de la BIL.
Cette réclamation devra comporter une copie du dépôt de plainte à la police, une copie de la réponse de Worldline et tous les détails de la fraude «définis avec précision et clarté». En cas de fraude par virement, le dossier est traité par plusieurs services internes de la banque. La banque précise aux victimes que «dès que les opérations contestées ont été communiquées», elle initie une demande de retours de fonds relative aux transactions frauduleuses. «Sans garantie de résultat», ajoute la BIL, qui indique que cette requête peut prendre quatre semaines. Sans réponse de la contrepartie, la demande est clôturée.
«Sous peine d’irrecevabilité de votre demande, vous devez impérativement fournir à votre gestionnaire, dans le meilleur délai, une copie du dépôt de plainte à la police, tous les détails de la fraude définis avec précision et clarté», mais aussi «des démarches complémentaires» à l’initiative du client. La BIL ne précise pas avec clarté de quelles démarches complémentaires il s’agit. Mais le client est en droit d’effectuer des démarches parallèles auprès de la banque du bénéficiaire de la transaction frauduleuse. «Nous vous conseillons à cette fin de vous faire assister par un organisme compétent dans le pays concerné (association de consommateurs, avocat…)», suggère la BIL.
Après avoir témoigné dans bon nombre de médias, Juliana Mondot, une des victimes de la fraude au faux site internet, a reçu un second courrier de la banque lui indiquant que son dossier était pris en charge par l’équipe du Quality and Claims Management. «Votre demande nécessitant de plus amples recherches, nous ne manquerons pas de vous tenir informée dans un prochain courrier», écrit la banque. Un ton nouveau qui convient mieux à la victime.
Cette affaire fait réagir la classe politique. Dans une question parlementaire adressée au ministre des Finances et à la ministre de la Justice, les députés Mars Di Bartolomeo et Ben Polidori (LSAP) s’émeuvent du sort des victimes du faux site internet de la BIL et de LuxTrust. Ils ne comprennent pas comment de tels faux sites peuvent rester actifs pendant des semaines après les premières plaintes de clients lésés. Ils interrogent les ministres sur les lois existantes pour lutter contre de telles attaques et sur les mesures de sécurité susceptibles de protéger les citoyens.
Le gouvernement constate-t-il des lacunes au niveau de l’application des instruments de protection numériques disponibles? Existe-t-il des modalités d’indemnisation? Quelle responsabilité ont les banques? Combien d’enquêtes et de condamnations sont-elles répertoriées pour ce genre de fraude? Que doivent faire les personnes concernées pour bénéficier d’une assistance rapide et, surtout, non bureaucratique? Comment se déroule la coordination entre les acteurs privés impliqués (par exemple, les banques, LuxTrust) et les autorités publiques, afin de garantir conjointement une réponse efficace à ces cas de fraude? Autant de questions qui attendent des réponses. Les victimes, aussi, veulent savoir.
Remboursement au cas par cas?
Alors qu’un collectif de victimes se met en place pour obtenir réparation, une soixantaine de personnes se sont déjà rassemblées dans un groupe WhatsApp et le préjudice total est chiffré à 550 000 euros. Ils espèrent revoir la couleur de leur argent, certains ayant vu toutes leurs économies disparaître dans cette arnaque.
Des clients ont-ils déjà été remboursés après être tombés dans le panneau du faux site de la banque? La BIL n’a pas répondu à nos sollicitations. Selon nos informations, au moins un gros client a pu récupérer les sommes qui lui ont été subtilisées par le biais de cette arnaque.
L’Union luxembourgeoise des consommateurs assure toujours de son côté n’avoir pas été contactée par l’une ou l’autre victime de cette fraude au faux site internet. L’association a déjà eu à défendre un dossier de fraude, mais il s’agissait d’un cas de phishing. Le modus operandi dont ont été victimes les clients de la BIL n’est pas encore apparu dans les annales de l’ULC, selon Patrick Schaul, du service contentieux.