Nouvelle entrée dans la (trop) longue liste de films d’horreur bis s’étant frayé un chemin jusque sur le grand écran cette année, Clown in a Cornfield a au moins le mérite d’être à la hauteur de son titre.
Ce qui, il faut bien l’avouer, n’a rien de très compliqué pour un «slasher», d’autant que celui-ci combine deux lieux communs du genre – les clowns et les champs de maïs, donc. Le film, en salles mercredi prochain, ne fait certes que reprendre le titre du roman d’Adam Cesare (2020) dont il est l’adaptation cinématographique, et derrière le marketing très actuel – le concept de base expliqué par le titre –, cache une vraie affection pour ses modèles d’une autre époque. «On se croirait dans un mauvais film d’horreur des années 1980», lâche un personnage avant l’un des innombrables jump scares qui rythment le film; à peu de choses près, c’est exactement cela.
Les prémisses du film, néanmoins, viennent avec leur part de réconfort, lorsque l’on sait que c’est Eli Craig aux manettes, son troisième film après l’archiculte Tucker & Dale vs. Evil (2010), dans lequel deux rednecks bourrés de bonnes intentions, mais fort maladroits et un peu bas du front, se font prendre pour une paire de tueurs en série par une bande d’étudiants, et Little Evil (2017), qui suit un homme fraîchement marié dans la certitude que son nouveau beau-fils de 5 ans est l’Antéchrist en personne. Au vu du CV, aussi bref que réjouissant, on était en droit d’attendre de Clown in a Cornfield un nouveau long métrage en forme de pirouette afin de dépoussiérer les codes maintes fois rebattus du slasher, et livrer un divertissement aussi sanglant qu’hilarant.
Un film maîtrisé mais mitigé, qui n’avait pas de quoi se prendre autant au sérieux
Le résultat est pour le moins mitigé. Si l’on peut applaudir le fait qu’avec un million de dollars de budget, le film se suit sans trop d’ennui, avec même une certaine maîtrise dans la mise en scène des quelques moments cruciaux – en comparaison, Terrifier 3 (Damien Leone, 2024), autre récent film de clown tueur, vomissait son esthétique infiniment plus «cheap» – et le refus fort louable de recourir aux effets spéciaux numériques, on regrette que Clown in a Cornfield se prenne autant au sérieux. Tiraillé de toute évidence entre sa fidélité au matériau de base et son propre style d’écriture empreint de second degré, Eli Craig a au moins pour lui de s’amuser à mettre en scène des meurtres inventifs – quoi d’autre sinon l’essence même de ce genre de films?
Il n’y a en tout cas pas de quoi effacer la trop grande prudence d’un scénario qui, sans même penser à les remettre en question, colle à tous les clichés du slasher. Le décalage par l’humour, pourtant bien présent, se limite à quelques répliques et situations qui donnent au film sa respiration. Et quand, d’un autre côté, le scénario ose la nouveauté (en jouant par exemple sur la figure du couple au cœur de l’histoire), c’est encore dans le souci de rester fidèle au livre.
Il y a malgré tout quelques points à retenir dans cette histoire de clown terrorisant les jeunes habitants d’une ville de campagne. Tout un discours sur la confrontation entre tradition et progrès, qui s’exprime la plupart du temps à travers des gags amusants (exemple : deux jeunes filles tentent d’appeler de l’aide, mais échouent lorsqu’elles ont seulement à leur disposition un vieux téléphone à cadran, dont elles ne savent pas se servir), devient le sujet principal du film. Et quand bien même l’on voit venir depuis longtemps la résolution du mystère – un twist à mi-film, très réussi par ailleurs, a du mal à contenir ses secrets –, le fin mot de l’histoire propose un point de vue sur l’horreur assez passionnant. Dommage qu’il survienne trop tard et se perde en explications : ce qui marche le mieux, dans Clown in a Cornfield comme dans les précédents films d’Eli Craig, ce sont les instants de pur chaos, jouissifs parce qu’ils se passent de commentaires.
Clown in a Cornfield d’Eli Craig
Avec Katie Douglas, Aaron Abrams, Carson MacCormac, Kevin Durand…
Genre horreur / comédie
Durée 1 h 36