L’herbe serait-elle plus verte ailleurs qu’au Luxembourg ? En matière de légalisation du cannabis certainement, regrette Xavier Thill dans sa pétition en faveur des Cannabis Social Clubs.
Lancée le 5 juin, la pétition n’a pas encore dépassé la barre des 5 500 signatures qui lui permettrait d’être débattue au Parlement. Loin de là. Elle a récolté 127 signatures à un mois de sa clôture. Une pétition du même auteur sur le même thème l’an passé avait fédéré 625 signataires.
Les fumeurs de joints semblent donc satisfaits de leur sort ou mal informés. La pétition 3704 a pour objet «d’autoriser ou d’encadrer légalement les Cannabis Social Clubs (CSC) afin de permettre aux adultes de cultiver et consommer du cannabis dans un cadre collectif, non commercial et sécurisé».
Les CSC sont des groupes de partage organisés sous forme d’association à but non lucratif qui gèrent la production et la distribution de cannabis en cercle fermé pour les besoins personnels de leurs membres. Ils amortissent les coûts de production par le versement de cotisations en fonction de leurs besoins. De tels clubs existent notamment déjà en Espagne, en Belgique, en France, aux Pays-Bas, en Slovénie et en Allemagne.
«L’idée n’a absolument pas été considérée par le gouvernement», explique l’auteur de la pétition, Xavier Thill, qui a lancé ses pétitions pour que le concept des clubs soit pris en compte lors de futurs débats politiques. «J’aimerais connaître l’avis des partis politiques et des ONG sur la question. Pour le moment, les CSC sont tabous.»
«Beaucoup de consommateurs n’ont pas la possibilité de cultiver du cannabis à leur domicile pour différentes raisons. Le club peut servir à cultiver et à se retrouver pour consommer en toute sécurité dans des conditions contrôlées», poursuit le pétitionnaire. «On peut y faire de la prévention ou proposer des aides aux gros fumeurs.»
Mettre en place un cadre légal pour les CSC au Luxembourg pourrait améliorer la sécurité sanitaire et la qualité du cannabis consommé, réduire les risques liés à l’autoproduction non encadrée, limiter l’influence du marché noir et offrir un lieu de sensibilisation, de dialogue et de prévention autour de la consommation responsable, indique le texte de la pétition en faveur d’une législation claire en la matière.
«La loi actuelle bafoue les droits humains. Il n’est pas possible d’autoriser la culture individuelle de cannabis et d’interdire les clubs. Je suis en lien avec la ligue des droits de l’homme et un avocat pour analyser la loi», ajoute Xavier Thill, qui continuera à défendre les CSC comme une alternative plus saine à l’achat de cannabis à des dealers dans la rue. «C’est également valable pour les consommateurs de cannabis médical et cela permettrait de contrôler la qualité du cannabis.»
Depuis le début de l’année, la prescription de fleurs séchées riches en THC par des professionnels de santé habilités est interdite en tant que cannabis médicinal. Selon les dernières données du ministère de la Santé, il serait plus efficace de prescrire les extraits huileux.
Le CSC, le bon plan
Le pétitionnaire est convaincu des nombreux avantages des CSC contrôlés par l’État pour les consommateurs. «Chaque gramme distribué sera légal. Ce sera un gramme en moins vendu au marché noir, un gramme en moins pour renforcer la criminalité, la mise en danger des jeunes et l’insécurité», insiste Xavier Thill. «Cela fonctionne chez nos voisins.»
Encore faut-il que le gouvernement en place souhaite changer la loi en ce sens. Pour l’instant, elle autorise chaque «communauté domestique» à cultiver quatre plants de cannabis sous certaines conditions que la majorité CSV-DP n’a pas prévu de modifier. L’accord de coalition 2023-2028 précise que «la culture du cannabis pour usage personnel telle qu’elle fut légalement encadrée sera maintenue. Le gouvernement observera la position des trois pays avoisinants sur la légalisation du cannabis.» Le gouvernement se pose en observateur des effets de la loi votée par son prédécesseur et des évolutions dans nos pays voisins.
En Allemagne notamment, qui bénéficie d’une législation similaire à la nôtre, si ce n’est que les CSC y sont autorisés. Cent quatre-vingts associations locales comptant environ 18 000 membres sont regroupées sous la tutelle de l’association Mariana Cannabis Social Clubs Deutschland. Le CSC de Trèves regroupe plus de 300 membres. La démonétisation d’une partie du trafic illicite, l’encadrement des consommateurs et l’assurance sur la qualité du produit seraient donc une bonne solution. Oui mais voilà, comme l’a relevé Xavier Thill, la loi votée au Grand-Duché n’autorise ni la consommation de cannabis sur la place publique, ni les associations de culture.
Pouvoir cultiver son propre cannabis à domicile n’a pourtant pas incité les non-fumeurs à s’initier à la fumette ou les consommateurs à consommer davantage. Au contraire, le nombre de consommateurs de cannabis n’a pas augmenté, selon une étude de l’Ilres lancée en partenariat avec le ministère de la Santé. Parmi eux, 4,7 % cultivent eux-mêmes leurs plants. Le reste se fournit auprès de connaissances ou dans la rue.