Accueil | Economie | Accord UE/USA : l’automobile européenne entre soulagement et craintes pour l’avenir

Accord UE/USA : l’automobile européenne entre soulagement et craintes pour l’avenir


L’accord sur les droits de douane entre l’UE et les États-Unis marque une « désescalade » pour l’automobile européenne, mais risque malgré tout d’entraîner de lourdes conséquences, notamment pour l’industrie allemande.

Le lobby européen des constructeurs automobiles (ACEA) a salué lundi une « désescalade » bienvenue, « une étape importante pour limiter la grave incertitude entourant les relations commerciales transatlantiques ces derniers mois ».

Les États-Unis sont un marché clé pour l’industrie automobile européenne, qui y a exporté près de 750 000 voitures en 2024, soit près d’un quart (22%) de ses exportations.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont conclu dimanche un accord prévoyant que les produits européens exportés aux États-Unis soient taxés à 15%, alors que les voitures étaient taxées à 27,5% depuis le mois d’avril. Avant cette nouvelle administration Trump, les constructeurs automobiles européens n’étaient toutefois taxés qu’à 2,5%.

Lundi, les actions en Bourse des constructeurs n’ont que mollement réagi à l’annonce. L’accord avec l’UE était attendu, ont souligné des analystes de Bank of America, après un accord similaire des États-Unis avec le Japon, établissant 15% de droits de douane.

« Il sera plus important de voir si d’autres mesures de soutien sont prises pour l’automobile », ont-ils indiqué dans une note.

Cet accord « a deux avantages », a commenté lundi le directeur financier de l’équipementier français Forvia. « Ces droits de douane (sont) inférieurs à ce qui est exercé depuis quelques mois par l’administration américaine » et « ça permet de réduire la volatilité, l’incertitude (…) pour l’ensemble des acteurs économiques », a-t-il estimé.

L’Allemagne en première ligne 

Ces droits de douane à 15% auront cependant un « impact négatif pour le secteur, non seulement dans l’UE, mais également aux États-Unis », a prévenu la directrice générale de l’ACEA, Sigrid de Vries, dans un communiqué.

Les constructeurs américains comme Chrysler et Jeep (marques de Stellantis) ou General Motors scrutent notamment les négociations entre les États-Unis et le Mexique, où sont produites 15% des voitures vendues aux États-Unis ainsi que de nombreuses pièces détachées.

Côté européen, l’Allemagne est en première ligne. Les États-Unis ont représenté l’an dernier le premier débouché des véhicules exportés (13,1%) par une industrie automobile allemande déjà à la peine en Chine.

À court terme, même limités à 15%, les droits de douane américains coûteront « des milliards chaque année aux entreprises automobiles allemandes », a déclaré Hildegard Mueller, présidente de la fédération des constructeurs automobiles allemands VDA.

Les constructeurs allemands vont devoir relever leurs prix aux États-Unis, mais aussi absorber une partie des droits de douane. Face à cette situation, chaque groupe a revu ses objectifs pour 2025 et proposé des solutions.

Le patron de BMW Oliver Zipse a suggéré en juin que l’Europe fasse sauter ses droits de douane sur l’importation de véhicules fabriqués aux États-Unis.

BMW a exporté en effet 153 000 véhicules aux États-Unis en 2024, mais il a aussi importé en Europe 92.000 voitures assemblées aux États-Unis. Mercedes est dans une situation similaire.

Volkswagen souffre aussi des droits de douane américains sur les voitures fabriquées au Mexique, et a vu son résultat amputé de 1,3 milliard d’euros au premier semestre. En première ligne, ses marques premium Porsche et Audi, qui n’ont pas d’usine aux États-Unis.

Suppressions de postes

Audi a d’ailleurs abaissé lundi ses objectifs de chiffre d’affaires et de rentabilité pour 2025, avant un rebond prévu pour 2026.

Le patron de Volkswagen Oliver Blume a suggéré un accord ad hoc avec les États-Unis, qui prendraient en compte les investissements que le groupe y réaliserait.

Le Suédois Volvo a aussi annoncé une lourde perte au deuxième trimestre à cause des droits de douane.

Dans un deuxième temps, l’absence de contrepartie sur les exportations de voitures depuis les États-Unis vers l’Europe pourrait faire des « grands perdants » parmi les salariés de l’industrie automobile allemande, équipementiers compris, prévient Ferdinand Dudenhöffer, expert du secteur automobile en Allemagne.

Si les constructeurs américains (sauf Ford) se soucient peu de l’Europe, les usines américaines de BMW et Mercedes vont notamment continuer à expédier des SUV vers l’Europe sans frais supplémentaires.

« Sans compensation », les usines automobiles en Allemagne et en Europe, déjà mal en point, « vont réduire leur production », estime Ferdinand Dudenhöffer, avec jusqu’à 70 000 emplois à supprimer en Allemagne au profit des États-Unis

Newsletter du Quotidien

Inscrivez-vous à notre newsletter et recevez tous les jours notre sélection de l'actualité.

En cliquant sur "Je m'inscris" vous acceptez de recevoir les newsletters du Quotidien ainsi que les conditions d'utilisation et la politique de protection des données personnelles conformément au RGPD .