Dans un courrier confidentiel que nous nous sommes procuré, la LFL n’est pas très loin de demander la tête de Paul Philipp. Elles exige en tout cas beaucoup de choses.
C’est une lettre de trois pages à caractère «strictement confidentiel, du moins privé», arrivée le 2 juillet dernier dans les locaux de la fédération. Elle tracasse depuis deux semaines le conseil d’administration installé à Mondercange et qui se remet à peine d’un début d’été calamiteux.
En ce mois de juillet, ses membres sont sur des braises, puisque les clubs de DN et PH exigent désormais des réponses et pèsent de tout leur poids pour impulser une nouvelle politique fédérale. Demandant l’abandon du principe de comité d’éthique pourtant porté par Tun Di Bari, le président d’Etzella, membre de la Ligue que l’on pressent très enclin à une révolution des mentalités (et de l’organigramme?), et réclamant de la «transparence» sur certains points n’ayant rien à voir avec les histoires du mois de juin, ce qui témoigne d’une sévère distanciation par rapport au mode de fonctionnement de la FLF. Voire d’une défiance.
«Discuter de vive voix»
Selon nos informations, alors que la Lëtzebuerger Football Ligue (LFL) demande à en «discuter de vive voix», Paul Philipp reste réticent à sortir de son calendrier visant à solutionner un par un les points qui ont posé problème lors du dernier rassemblement national.
Il faut dire qu’alors que la fédération espérait que les affaires «sélection de Gerson Rodrigues», «atteintes à la liberté de la presse», «arrachage de banderoles au stade» et «failles béantes dans la communication de crise» se tasseraient avec l’été, la Ligue et sa présidente, Karine Reuter, ont rouvert les plaies, y ont mis un peu de sel et même quelques giclées de jus de citron. Le ton est acide et même carrément véhément.
Ils sont contre la commission d’éthique
À se demander, même, si ce n’est pas la tête de Paul Philipp qui est demandée, entre les lignes. Notamment dans ce passage relatif à l’exclusion d’un journaliste d’un point presse précédant le match contre la Slovaquie : «Si le sélectionneur et le juriste ont agi de leur propre initiative, des sanctions doivent être prises (…) S’ils ont agi avec accord de la FLF, dès lors, la responsabilité doit être prise au sein du conseil d’administration pour ces agissements.»
Or la LFL, comme tout le pays d’ailleurs, sait que Paul Philipp a au moins été averti par téléphone avant les faits, puisque le président l’a concédé de lui-même… Il semblerait que la non-reconduction annoncée du contrat de Luc Holtz n’est pas suffisante, même si elle a été annoncée après l’envoi du courrier. La Ligue, tentée par le «dégagisme», alors qu’il se murmure que Paul Philipp pourrait briguer un nouveau mandat ?
«Amateurisme effrayant»
C’est sans doute la raison pour laquelle, dans une interview qu’elle nous avait donnée dans la foulée des événements, Karine Reuter, au nom de la Ligue qu’elle préside, avait bien indiqué que les clubs de l’élite réservaient leur avis, ne souhaitant pas le faire connaître publiquement. Les clubs ont beau avancer masqués, cette missive le répète : «Eu égard aux dommages d’ores et déjà causés à l’image de la FLF et du football en général, nous avons décidé de ne pas effectuer de prise de position publique, malgré l’insistance de certains acteurs du monde du foot.»
Les mots sont forts, en tout cas. «Amateurisme effrayant», «méconnaissance totale des règles les plus élémentaires de communication». Et au sujet de la création annoncée d’un comité d’éthique (mais toujours pas d’un service com digne de ce nom) : «L’idée qu’une commission issue de la société civile puisse s’immiscer dans les décisions de la FLF est une fausse bonne idée qui fait penser que les membres du conseil n’ont pas de boussole morale.» Voici énumérés les griefs qui sont la partie visible de l’iceberg.
Des problèmes pour le vote du budget?
La partie immergée est bien plus conséquente. Dans son courrier, la LFL pose ouvertement la question d’une séparation des pouvoirs à la tête de l’instance fédérale, posant que le président pourrait conserver les fonctions de représentation et de direction sportive, mais déléguer les «fonctions administratives et financières à un directeur».
C’est que les clubs, sans le dire trop fort, commencent à se poser des questions sur certains aspects de la gestion mondercangeoise, notamment liés au train de vie des Rout Léiwen. Et que cela déborde du cadre qu’auraient pu tracer les problèmes de juin. Introduction d’un rapport détaillé des revenus et dépenses pour un contrôle réel des dépenses autour de la sélection notamment, obligation de motivation des décisions des instances fédérales à l’égard des clubs dans le cadre des championnats nationaux, établissement de procès-verbaux lors des CA… La LFL brasse large et saisit l’opportunité de poser ses conditions.
C’est que le vent tourne. Poser de telles questions relatives aux dépenses laisse deviner que les clubs sont prêts à mener une bataille lors de l’assemblée générale d’octobre, sachant que la DN et la PH disposent d’un peu plus de la moitié des suffrages exprimables. Or si le budget n’est pas adopté, le CA tombera et l’élection présidentielle 2026 va devenir furieusement d’actualité. C’est bien pour cela que cette lettre est inquiétante, pour la fédération et ses représentants aux affaires.