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Le parquet a requis 12 ans de prison contre le terroriste présumé de Strassen


La mal a un visage d’adolescent, selon le procureur. (Photo : archives lq)

Le parquet s’est érigé en barrage contre la haine et le terrorisme jeudi. Dans un esprit de dissuasion et de lutte, son représentant n’a pas été tendre envers l’aspirant terroriste.

Il venait d’avoir 18 ans quand il a été arrêté par l’unité spéciale de la police à son retour de vacances et est jugé comme un adulte par la 12e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour terrorisme. «La police et les services secrets sont intervenus à temps pour l’empêcher de nuire. Il en avait l’intention et avait accepté l’éventualité de faire des victimes. Il nous l’a dit hier», a indiqué le procureur dans son réquisitoire hier. «Nous ne pouvions pas attendre plus longtemps. Nous savions qu’il produisait des explosifs.»

Le magistrat a requis une peine de réclusion de douze ans à l’encontre d’Alex, un jeune homme aujourd’hui âgé de 23 ans, après avoir cité Primo Levi. «Souviens-toi que le mal peut avoir un visage humain. Dans le cas qui nous occupe, il a le visage d’un adolescent.» Ou, d’un «enfant-roi» sans limites élevé par des «parents pas à la hauteur». Le procureur s’est substitué à eux pour les lui montrer.

Après deux semaines de procès durant lesquelles l’étudiant en chimie était apparu glacial et inébranlable, il a, hier, pour la première fois, laissé transparaître des émotions sur son visage. Il semblait avoir réalisé que cette fois, il ne s’en tirerait pas avec 7 mois de prison avec sursis, comme ce fut le cas en Suède où il avait été condamné pour l’incendie volontaire d’une ferme d’élevage de visons. Le procureur a expliqué qu’en concertation avec les autorités de ce pays, il avait été décidé que la justice luxembourgeoise se chargerait de le juger pour les faits de terrorisme.

Jihadistes blancs

«Le racisme, la haine et l’intolérance sont les aspects les plus affreux de l’humanité», a entamé le magistrat pour qui l’indifférence ne doit pas prévaloir. «Nous devons réagir, sinon nous nous rendons complices» de la «théorie du chaos» propagée par Alex et ses semblables pour faire exploser un système qui ne leur convient pas en semant la violence et la mort. «Les tribunaux sont les derniers barrages contre la haine qu’ils répandent.»

Ils, ce sont ces jihadistes blancs qu’Alex a rejoints au sein de The Base et The Green Brigade. Les parallèles entre le jihad classique et cette forme occidentale sont nombreux. Le prévenu a soutenu le système en mettant ses compétences à profit pour en gravir les échelons rapidement. Radicalisé derrière son ordinateur, frustré par un monde dans lequel il ne parvient pas à s’intégrer, il s’est préparé à tuer à distance. Il l’a reconnu la veille.

«Je ne veux plus être cette personne haineuse»

Alex est devenu un membre hyperactif de ces groupes. «On nous dit qu’il ne s’est rien passé. Mais en sommes-nous certains? Beaucoup de choses se sont passées», a poursuivi le magistrat qui a rappelé : «Il ne faut pas qu’il y ait un attentat pour pouvoir engager des poursuites. Il suffit de certains actes». Le prévenu coche apparemment toutes les cases, comme les enquêteurs l’ont révélé en présentant leurs résultats d’enquête lors des dernières audiences.

Les erreurs d’un adolescent perdu que le prévenu clame ne plus vouloir être. «Je ne veux plus être cette personne haineuse», lancera-t-il à la toute fin de l’audience d’hier avant de présenter ses excuses encore groggy par le réquisitoire du parquet. Son avocat, Me Says, a invoqué la clémence de la chambre criminelle. Alex ne doit pas être condamné à une peine de prison excédant les neuf mois passés en détention préventive. Le surplus devra être assorti du sursis probatoire.

«On juge un enfant»

«Je suis convaincu qu’il est conscient de la gravité de ses actes», a assuré l’avocat. «Il ne les conteste plus et sait sur quelle voie dangereuse il s’était engagé.» Sa détention préventive lui aurait ouvert les yeux. Notamment sur l’effet de loupe que peut avoir internet. «Il ne se cherche pas d’excuses et ne botte pas en touche», a encore ajouté Eric Says, selon qui il n’y aurait pas de preuves formelles que son client continuerait ses activités en ligne, comme l’affirment les policiers. Son client aurait compris la leçon et ne risque pas de récidiver.

Il conclut en rappelant «qu’on juge un enfant». Un enfant qui a enfilé un uniforme trop grand pour lui. Il sera fixé sur son sort le 27 novembre. Un de ses «anciens» modèles, Ted Kaczynski, dit Unabomber, a écrit dans son manifeste : «Il n’y a rien de mal à la violence en soi dans un cas particulier, le fait que la violence soit bonne ou mauvaise dépend de la manière dont elle est utilisée et du but pour lequel elle est utilisée.»

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