Saïd Arab (24 ans) est le nouveau meneur de jeu romantique du Titus. Rencontre avec un pro à la tête bien faite et d’une sensibilité qui va le faire aimer au pays.
Quand on regarde votre parcours, dans la course traditionnelle aux centres de formation d’un jeune apprenti, on remarque une année à… Oran, en Algérie. Pourquoi ?
Saïd Arab : Ah ça… c’était une expérience qu’on s’est offerte avec mon père. On vivait à Paris et un jour, on s’est dit que ce serait bien de voir comment était la vie, là-bas, en Algérie, dans le pays de nos origines. Un truc qu’on voulait faire en famille et ça nous a tous fait kiffer. On voulait comprendre à quoi cela ressemblait de vivre dans ce pays, ce qu’était leur vie. Donc on est partis un an (en 2014) et il a vite été évident que l’existence était quand même bien plus simple en France, qu’on n’y manque de rien. Là-bas, je voyais des enfants de 13 ans attraper un bus sans argent pour aller à l’entraînement, sur un terrain en terre et sans crampons… Le niveau technique était exceptionnel, mais après, pour ce qui était de la tactique et du physique, ce n’était pas « wouah »… Mais bon, les centres de formation français, en axant autant sur le physique, ont un peu amoché le football. On y met moins d’insouciance.
Bon, ça c’est ce que vous avez vécu au fil d’un parcours moins atypique, au Paris Saint-Germain et au FC Metz.
J’étais au centre de formation du PSG, mais je me suis retrouvé dans une génération costaude et donc c’était assez bouché. On m’a proposé d’être aspirant externe, de garder ma vie chez mes parents et de venir tous les jours au centre. Mais à cet âge-là, ton rêve, c’est de vivre le truc de l’intérieur, d’avoir l’adrénaline et de tout faire avec les copains. Il y avait Le Havre qui s’intéressait à moi, mais mes parents et moi, on avait été tellement bien reçus à Metz que mon père m’a dit « si tu as envie, go! ».
On a une sensation d’enfermement, l’impression d’être robotisés
En général, beaucoup de joueurs disent, après coup, qu’ils en sont revenus, de cette expérience du centre de formation…
C’est marrant que vous disiez ça, parce qu’avec énormément de recul, aujourd’hui, je peux le dire, ce n’était pas la meilleure période de ma vie. Déjà parce que ma mère était tombée gravement malade et que moi, j’étais là, à essayer de devenir footballeur pro alors que je voulais être auprès d’elle… qui me disait de rester là-bas pour mon bien. Très vite, je n’étais plus heureux au centre. En vrai, on a une sensation d’enfermement, l’impression d’être robotisés. Tu perds des années importantes, celles de la jeunesse. Tu les sacrifies. Moi, ça s’est doublé d’un pincement au cœur : je n’ai pas vu grandir mes deux petits frères qui avaient deux ans. Ils sont tellement mignons à cet âge-là, on dirait des petites poupées, tu ne peux pas ne pas les aimer. Et quand je suis rentré, ils marchaient, ils parlaient…
Et décider de quitter la Lorraine a eu une grosse influence sur votre carrière ?
J’ai été à Metz de 15 à 17 ans et partir a été le meilleur choix de ma vie. J’ai retrouvé ma famille, puis j’ai eu la chance de signer au Red Star et, six mois plus tard, je découvrais la Ligue 2.
Mais ce passage à Metz a aussi préparé votre arrivée au Luxembourg. Puisqu’on imagine que vous connaissez des joueurs en DN, non ?
Yannick Schaus, qui vient de signer à Pétange, et moi, on s’est croisés quelquefois, même s’il venait de quitter Metz quand j’y suis arrivé. Mais je connais aussi Clayton Duarte et Hamadou Karamoko du Progrès, Yann Godart de Mondorf, Amine Zenadji de Strassen, Vancy Mabanza, qui vient d’arriver au RFCU… Je connais presque un joueur par club, en fait! (il rit).
Pas payé pendant six mois, pile l’année où je décide de me marier
Vous venez pour faire quoi, dans ce championnat, dans cette équipe ?
J’ai juste envie de retrouver du plaisir, parce que depuis que j’ai résilié au Paris FC (en novembre 2022) parce que je ne m’entendais plus avec mon coach, Thierry Laurey, j’ai fait quelques mauvais choix. Comme d’aller à Sétif, où je n’ai pas été payé pendant six mois, pile l’année où je décide de me marier. Je jouais gratuitement. C’est injurieux. Alors, au bout d’un moment, tu refuses de jouer pour montrer que tu n’es pas content. Et derrière, je vais au Goal FC. Un beau projet avec une belle vie sociale dans le club, des gens impeccables… mais on m’avait vendu le National 1 parce que le club devait être repêché et finalement, c’est en N2.
La première journée, le club décide de la boycotter, parce qu’il pense obtenir gain de cause, et on prend moins trois points. Puis moins dix points à cause de problèmes dans l’homologation des contrats. Un nouveau coach arrive parce que des joueurs font sa promotion. Je ne suis pas dans ses plans, alors je disparais un peu et, à la trêve hivernale, il finit par s’en aller en nous annonçant qu’il ne croit plus en nous, les joueurs. On finit la saison à courir après les points, on descend, mais cette fois, on est repêchés. Voilà pourquoi j’ai besoin de retrouver le plaisir.
Dans un club qui a quelles ambitions ? Parce que nous, on ne le sait pas…
On ne m’a pas vendu quoi que ce soit et, franchement, c’est justement ça que j’ai aimé. On veut juste le haut de tableau sans pression et dans une bonne ambiance. Cela fait un mois que j’ai donné mon accord et je ne savais même pas qui serait le coach (NDLR : le Bulgare Kiril Rachev, 35 ans, a été nommé cette semaine). Je ne sais d’ailleurs toujours pas : j’ai raté la reprise, parce que je gère mon déménagement depuis Lyon.
Quel joueur les supporters de Pétange vont-ils découvrir ?
Un joueur qui a un gros volume de jeu, qui court pour les autres, avec de la qualité technique, une bonne vision de jeu et une capacité à répéter les efforts. Je peux jouer plusieurs postes du milieu : 6, 8 ou 10, mais je suis quand même plus à l’aise en tant que meneur de jeu, avec une liberté d’expression.