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Criminologie : «C’est un vrai travail de prévention et d’action sur le terrain» 


Tom Oswald et Sophie Gosselin sont membres de l’Association luxembourgeoise de criminologie.

Créée en 2004, l’Association luxembourgeoise de criminologie (ALC) compte aujourd’hui une vingtaine de membres. Son but : sensibiliser le public à ce domaine très éloigné de l’image véhiculée dans les médias ou les films.

Depuis plus d’une dizaine d’années, Tom Oswald, qui en est le président, et Sophie Gosselin, criminologue de métier, sont membres de l’Association luxembourgeoise de criminologie (ALC). Réinsertion sociale des détenus, explications d’un passage à l’acte, criminalité au Luxembourg… Ils nous expliquent les dessous d’un métier bien loin du profiler des séries policières américaines.

Concrètement, la criminologie, qu’est-ce que c’est ?

Sophie Gosselin : C’est une science sociale, mais pas unique. Elle est pluridisciplinaire. Elle recouvre plusieurs domaines, comme la psychologie, la sociologie, la médecine, le droit. Concrètement, elle va s’intéresser à l’acte criminel. Par exemple, elle cherche à savoir, à travers son parcours, pourquoi et comment une personne en est arrivée à commettre un crime ou un délit. Le but est d’éviter un risque de récidive tout en protégeant la société. C’est un vrai travail de prévention et d’action sur le terrain (…) Il y a également tout le volet de recherche. Contrairement à d’autres pays comme la Belgique, il n’y a pas de criminologues travaillant dans le domaine de la recherche au Luxembourg.

Tom Oswald : La criminalité n’est pas simplement l’affaire de crimes, de meurtres ou de trafics de stupéfiants. Il y a aussi toute la criminalité en col blanc, mais aussi les questions relatives à la pénologie, la déviance, le sentiment de la sécurité, la prévention.

Prenons un exemple. Une personne commet un crime. À quel moment et dans quelle mesure allez-vous intervenir ?

S. G. : Si je parle de mon cas, dans le service de probation du service central d’assistance sociale, qui dépend du parquet général de Luxembourg, j’interviens à partir du moment où les personnes sont condamnées à des peines de prison fermes et lorsqu’il n’y a plus aucun recours possible. Le service d’exécution des peines du parquet général nous mandate pour prendre en charge le suivi de la personne détenue. En lien avec d’autres experts, comme les psychologues, nous faisons un vrai travail d’introspection avec le détenu (…). En concertation avec cette équipe pluridisciplinaire, on voit quel projet il est possible de mettre en place au niveau de la réinsertion sociale (…). On peut, par exemple, envisager un transfert au centre pénitentiaire semi-ouvert de Givenich ou une liberté conditionnelle.

On ne travaille pas dans des laboratoires, comme on peut le voir dans les séries américaines

Existe-t-il une formation en matière de criminologie au Luxembourg ? 

S. G. : Non, mais en Belgique oui. Le master en criminologie est présent dans les universités de Louvain-la-Neuve, de Bruxelles et de Liège. C’est un métier qui est peu demandé et les débouchés sont assez rares. Ce sont les secteurs de la police ou de la justice qui recrutent le plus.

T. O. : J’ai quand même l’impression, au moins au niveau de l’État, qu’il y a de plus en plus d’annonces de recherche de criminologue au Luxembourg. Alors que lorsque j’ai commencé, il n’y en avait presque pas.

Vous organisez des cafés criminologiques. Quels thèmes abordez-vous lors de ces rencontres ?

T. O. : Lors des précédentes rencontres, nous avons abordé la thématique des tutelles, celle des casiers judiciaires, les visions et les orientations des différents partis politiques dans les domaines de la sécurité publique et de la justice, la place de la victime dans le système pénal. Nous accueillons un public éclectique. Nous avons toujours des professionnels qui travaillent dans le milieu. Par exemple, des juristes, des avocats, des personnes directement concernées par la problématique. Nous avons parfois des auteurs d’infractions, des victimes, des représentants d’associations.

S. G. : Il ne faut pas forcément travailler dans la justice pénale pour écouter ce qui est dit. Notre souhait est justement que les informations et les débats qui sont apportés puissent enrichir les spectateurs. Nous intervenons également parfois dans les lycées pour présenter la profession de criminologue. Alors, souvent, nous avons beaucoup de jeunes intéressés. Mais ils sont déçus, car c’est un métier très différent de l’image perçue à la télévision. On ne travaille pas dans des laboratoires, comme on peut le voir dans les séries américaines. Ce sont bien des criminologues, mais qui ont des études très différentes des nôtres.

Le phénomène criminel au Luxembourg présente-t-il des particularités ?

T. O. : C’est difficile de l’affirmer, car au Luxembourg on ne dispose pas de l’ensemble des statistiques sur le phénomène criminel qui, comme nous l’avons dit, revêt plusieurs formes. Le pays est l’une des plus grandes places financières d’Europe. Mais nous n’avons que peu de rapports sur les phénomènes criminels qui peuvent s’y produire.

S. G. : Tous les pays européens ont des statistiques ou des recommandations spécifiques sur le phénomène délinquant. Nous, nous n’avons pas grand-chose, si ce n’est les quelques chiffres que la police, l’administration pénitentiaire et la justice exposent.

Quel serait le rôle de la criminologie dans la société luxembourgeoise de demain ? 

T. O. : Le rôle de notre association est de sensibiliser et d’ouvrir le débat. En tant que criminologue, notre mission est de trouver des réponses au phénomène criminel.

S. G. : Engager des criminologues au sein de l’État pour faire de la recherche sur les phénomènes délinquants serait quelque chose de très intéressant.

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