Le président du Parlement ukrainien, Ruslan Stefanchuk, s’est adressé, mardi, à la Chambre des députés. Il a martelé que son pays «veut rester ce qu’il est», aussi grâce au soutien du Luxembourg.
Trois ans après l’adresse historique du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, aux députés luxembourgeois, la Chambre a vécu, hier, un autre «événement extraordinaire avec une grande importance», comme l’a souligné d’emblée Claude Wiseler. «Pour la première fois, la Chambre accueille en séance plénière le président d’un parlement dont le pays est en guerre», fait remarquer le premier citoyen luxembourgeois, au moment de saluer son homologue ukrainien, Ruslan Stefanchuk. «Avec cette séance, la Chambre pose un signal clair, un signal pour la solidarité, la cohésion et la résilience», ajoute-t-il.
Cette visite a eu lieu dans un contexte toujours aussi lourd pour l’Ukraine, qui a encore été victime d’une salve de bombardements par l’armée russe, dans la nuit de lundi à hier. Les députés ont observé une minute de silence pour toutes les victimes de la guerre d’agression, lancée le 24 février 2022 par la Russie contre son pays voisin. «Je suis content et honoré que vous ayez rendu hommage aux victimes», réagit Ruslan Stefanchuk.
«Vous connaissez le prix de la guerre»
Tout d’abord, le président de la «Verkhovna Rada» a dit en luxembourgeois «être content de pouvoir être parmi des amis». Des amis qui siègent dans un parlement qui aurait pris d’«importantes décisions» pour soutenir l’Ukraine. Les liens avec le Luxembourg seraient étroits, aussi en raison de vécus partagés : «Comme nous, vous connaissez le prix de la guerre et de l’occupation par l’ennemi. Comme nous, vous avez enduré des tragédies et des chagrins. Comme nous, vous avez péri, pour la seule raison de vouloir rester ce que nous sommes.»
Ruslan Stefanchuk répète alors les propos de Volodymyr Zelensky, tenus le 2 juin 2022 devant la Chambre des députés : «Nous voulons rester ce que nous sommes. Cette devise est devenue aussi la nôtre. Car, comme vous, nous affectionnons et protégeons la plus précieuse chose qu’une nation peut avoir : son identité, sa dignité et sa liberté.» Le président du Parlement ukrainien a aussi tenu à dire aux élus luxembourgeois que «l’Ukraine ne va jamais capituler». «Nous n’allons jamais arrêter de se battre pour notre existence. Si nous arrêtons notre résistance, l’Ukraine va disparaître. Mais, si Poutine et l’armée russe sont stoppés, cette guerre va prendre fin», reprend le président du Parlement ukrainien. Or, la Russie ne serait pas prête à une «paix équitable et durable». «Elle continue ses actions criminelles», fustige-t-il.
Le soutien du Grand-Duché, de l’Europe et de l’OTAN resteraient donc plus que jamais indispensables pour faire pression sur le Kremlin. Ruslan Stefanchuk n’a pas manqué d’applaudir la contribution du Luxembourg («un grand pays, une grande nation») et rendre hommage à son «peuple courageux». «Mes applaudissements s’adressent à l’ensemble de la population luxembourgeoise, à la famille grand-ducale, à la Chambre des députés et au gouvernement», souligne-t-il.
Auparavant, Claude Wiseler avait rappelé que le gouvernement luxembourgeois avait revu son aide militaire pour l’Ukraine à la hausse, de 80 à 120 millions d’euros pour cette seule année 2025. Kiev s’attend désormais à un soutien supplémentaire et plus appuyé, notamment pour ouvrir à l’Ukraine les portes de l’UE et de l’OTAN. «La Russie doit être contrainte à la paix. Et, il n’existe que trois chemins pour y parvenir : l’unité européenne et transatlantique, de douloureuses sanctions contre l’agresseur et la livraison d’armes efficaces et de haute technologie». S’ensuit une mise en garde sans équivoque : «Si l’Europe abandonne l’Ukraine, cela équivaudra à une capitulation de l’Europe».
Entrevues avec Frieden et le Grand-Duc
Le président de la Chambre des députés a également eu des mots poignants, adressés à son homologue, mais aussi à la population ukrainienne. Présent à Kiev pour les trois ans de la libération de Boutcha, Claude Wiseler affirme «ne pas vouloir ni pouvoir oublier» ses échanges avec les survivants du massacre commis dans cette localité par l’armée russe. «Ils nous ont démontré que la lutte pour la liberté, l’État de droit, la démocratie, et tout simplement l’humanité, sont les raisons fondamentales pour quoi l’on est engagé en politique.».
Il ajoute qu’«il est de la responsabilité de nous tous de vous aider à ne pas perdre votre volonté de vivre, votre humour et l’espoir.» «Vous avez cité notre devise nationale. Je pense que tous ceux qui sont réunis ici sont prêts, dans les mois et années à venir, à s’engager pour que vous puissiez rester ce que vous êtes», termine Claude Wiseler.
Avant de s’adresser à la Chambre, Ruslan Stefanchuk, arrivé lundi au Luxembourg, a aussi été reçu par le Premier ministre, Luc Frieden, et le Grand-Duc Henri.
Un appel à l’aide pour libérer les enfants ukrainiens enlevés
Ce sont des dizaines de milliers d’enfants ukrainiens qui ont été déportés illégalement par la Russie. «Cela sonne fou, mais la Russie propose à l’Ukraine d’échanger les enfants contre des prisonniers de guerre. Les enfants ne sont pas des prisonniers de guerre. Ils ne doivent pas devenir une monnaie d’échange», s’insurge Ruslan Stefanchuk, au moment d’appeler le Luxembourg à continuer à soutenir l’Ukraine pour y parvenir. «Ils doivent être ramenés à la maison, sans conditions préalables et le plus vite possible», enchaîne le président de la «Rada».
Il réclame aussi la mise en place d’un tribunal spécial pour que la Russie puisse «être tenue responsable des crimes qu’elle a commis». «Nous poussons pour qu’un tel tribunal voit le jour», assure Claude Wiseler.