Les étrangers habitant à Ballymena se terrent en espérant que les émeutes racistes se calment.
Après trois nuits d’émeutes pendant lesquelles leurs fenêtres ont été brisées et leurs maisons incendiées, les habitants d’un quartier à forte population immigrée de Ballymena, en Irlande du Nord, sont terrifiés au point d’envisager de partir. Aucun d’eux ne s’attendait à ce que la violence d’une foule en colère frappe aveuglément lundi soir chez eux à Clonavon Road, après un rassemblement de soutien à la victime d’une tentative de viol présumée. La plupart des habitants sont soit cloîtrés, soit partis jeudi. Et parmi les rares qui rasent les murs, très peu veulent parler par peur d’être reconnus. «Les gens nous regardent de travers, ils me disent: “Fuck les Roumains“, “Rentrez chez vous bâtards“», raconte Maria (prénom modifié), vendeuse de 38 ans.
«Pourquoi nous attaquent-ils? Que faisons-nous de mal?», s’interroge cette Roumaine sur le pas de sa porte, les traits tirés. Les violences ont éclaté après l’inculpation de deux adolescents pour la tentative de viol d’une jeune fille dans cette ville ouvrière de 31 000 habitants, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Belfast. La police n’a pas communiqué sur l’origine des jeunes. Mais les médias ont rapporté qu’ils avaient eu recours à un interprète roumain au tribunal, suscitant cette colère visant notamment les immigrés d’Europe de l’Est. «Dehors les violeurs Roms», peut-on lire sur des murs de la ville. «Ce n’est pas à propos de cette fille, c’est une histoire de racisme», juge Maria, qui dort chez des amis avec son mari depuis lundi soir.
Même nettoyée, la rue porte les stigmates des affrontements entre les forces de l’ordre et les émeutiers, parfois très jeunes et souvent masqués, qui ont jeté sur elles cocktails Molotov et autres projectiles. Certains ressortissants étrangers ont dû se cacher dans des greniers ou des penderies, a indiqué la police nord-irlandaise, qui a dénoncé une violence «raciste» dans cette ville et quelques autres d’Irlande du Nord.
À ce stade, quatre personnes dont deux mineurs ont été inculpées, quinze ont été arrêtées et une quarantaine de policiers ont été blessés. Sur Clonavon Road, des drapeaux britanniques, nord-irlandais ou à l’effigie du roi Charles III ont fait leur apparition aux fenêtres. Il s’agit de se protéger, en montrant «que nous ne sommes pas contre» les manifestants, souligne Blanka Harnagea, 38 ans, arrivée de République Tchèque il y a cinq ans. Dans l’espoir d’être épargnés, certains ont placardé des affiches jaunes «Des locaux vivent ici», «Des Philippins vivent ici», ou encore «Foyer britannique».