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[Cinéma] Mike Flanagan, accro à Stephen King


Le réalisateur Mike Flanagan et l’acteur Tom Hiddleston sur le tournage de The Life of Chuck. (Photo : 2024 dance anyway, llc. all rights reserved)

Avec The Life of Chuck, le réalisateur américain Mike Flanagan signe sa troisième adaptation d’affilée d’une œuvre du «roi de l’horreur». Et ce n’est pas encore fini!

Avec sa bonne bouille et son sourire généreux, on voit mal Mike Flanagan comme l’un des maîtres modernes de l’horreur. C’est pourtant ce qu’il est, comme le dit un CV qui donne des frissons : le réalisateur américain est ainsi l’auteur de Ouija : Origin of Evil (2016), film qui lance sa carrière et lui offre dans la foulée de belles opportunités chez Netflix, qu’il va évidemment saisir. Il se fait alors un nom avec des séries de qualité comme The Haunting, The Midnight Club et la non moins fameuse The Fall of the House of Usher. Au point que pour les fans et les critiques, l’expression «Flanaverse» va désigner un univers cinématographique cohérent, qu’il développe dans ses créations. Une sacrée trajectoire qui ne pouvait pas manquer de croiser celle d’un autre spécialiste de l’épouvante et du cauchemar psychologique. Un roi même : Stephen King.

Entre les deux, l’histoire commence en 2017 avec la rigoureuse adaptation de Gerald’s Game, roman datant de 1992 qui raconte l’histoire d’une femme attachée à un lit, à la suite d’un jeu sexuel qui tourne mal. La suite, deux ans après, sera d’un tout autre niveau, puisque le cinéaste se lance dans Doctor Sleep, qui n’est autre que la suite de Shining, livre devenu culte sur grand écran grâce au génie de Stanley Kubrick – bien que Stephen King ait notoirement détesté sa version. Redonner vie en images, quarante ans après, aux couloirs sanglants de l’hôtel Overlook, n’était en effet pas une mince affaire. «Un gros morceau», lâchera-t-il, et assurément le «moment le plus angoissant» de sa carrière, qui n’aura pas le succès escompté au box-office.

Qu’importe! Le voilà qui remet le couvert avec The Life of Chuck, courte histoire compilée avec trois autres dans le recueil If It Bleeds (2020). Une fois n’est pas coutume, il troque ici les esprits malins et les humains toqués contre un texte «lumineux, presque joyeux, sans une once de cynisme», reconnaît-il dans le dossier de presse. «Une célébration de la vie et de l’art», ose-t-il, ce qui est plutôt rare chez Stephen King. Le réalisateur, lui, conteste cette rareté, prenant comme exemple The Shawshank Redemption (Les Évadés en français) ou The Green Mile pour parler du côté «humaniste» de l’écrivain. «Il dit souvent que l’horreur ne fonctionne que s’il y a de l’amour au cœur de l’histoire. Et c’est vrai : même dans ses récits les plus sombres, il y a toujours de la beauté.»

L’idée de décevoir Stephen King me terrifie

On est ici servi avec la vie extraordinaire d’un homme ordinaire, Charles «Chuck» Krantz (interprété par Tom Hiddleston), banquier dont l’histoire est racontée à l’envers, découpée en trois chapitres et avec comme point de départ l’apocalypse à venir. Mark Hamill et Chiwetel Ejiofor complètent le casting d’un film qui pourrait se voir comme une variation de La vie est belle de Frank Capra, avec notamment une scène de danse enlevée façon Gene Kelly. «Je n’avais rien lu de tel, se remémore Mike Flanagan. J’ai été bouleversé. J’en ai pleuré du début à la fin.» Il explique avoir alors écrit à Stephen King avec ses mots simples : «Si je peux adapter cette histoire, ce sera le plus beau film que je ferai.» Projeté en avant-première au festival de Toronto en septembre 2024, le public lui donnera un début de réponse en le récompensant du People’s Choice Award, le prix le plus convoité de la manifestation.

Ce qui rassure le réalisateur, qui voit son travail d’appropriation comme une vraie «responsabilité» : «Stephen King est mon auteur préféré, mon héros littéraire. L’idée de le décevoir me terrifie. Comme lecteur passionné, j’ai grandi avec ses livres et j’ai vu nombre de ses adaptations. Je sais donc à quel point il est facile de rater le coche. Je ne veux surtout pas faire un film que je ne pourrais pas aimer, et dont il ne serait pas fier.» Le «roi de l’horreur» semble confiant, car il lui a cédé les droits d’une de ses œuvres phares, The Dark Tower (massacrée en 2017 par Matthew McConaughey et Idris Elba). Mieux : on retrouvera vite ce dernier sur Prime Video, aux manettes de la série Carrie, tout premier roman de Stephen King adapté au cinéma par Brian De Palma en 1976. D’une certaine façon, la boucle est bouclée, mais sûrement pas pour Mike Flanagan!

The Life of Chuck, de Mike Flanagan.